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Ouvrages généraux et thématiqu

La grande conspiration de l'an XII

En 1802, Georges Cadoudal, l'un des plus éminents chefs de la chouannerie bretonne, n'a pas renoncé à rétablir les Bourbons sur le trône de France et projette de faire disparaître le général Bonaparte, alors Premier consul, en l'enlevant lors d'un de ses déplacements. Dans ce but, il entraîne un groupe de royalistes émigrés en Angleterre et persuade le frère du roi Louis XVIII, le comte d'Artois, de revenir en France dès qu'aura été exécuté ce qu'il appelle "le coup essentiel" , afin de préparer le retour du roi. Le prince l'assure de son soutien, et promet sa présence en France le moment venu. Dans le même temps, le général Pichegru débarque en Angleterre après une spectaculaire évasion de la Guyane où il avait été déporté par le Directoire. Cadoudal le rencontre et parvient à l'intéresser au complot. Toutefois, Pichegru souhaite s'assurer de la participation du général Moreau dont il connaît les sympathies royalistes et son opposition à Bonaparte. La liaison entre Londres et Paris, où réside Moreau, se fait par des intermédiaires peu fiables qui rapportent néanmoins une réponse favorable du général. Une nuit d'août 1803, un navire anglais débarque clandestinement près de Dieppe. Cadoudal et un groupe de conjurés gagnent Paris où ils se cachent. Le 16 janvier 1804, c'est au tour de Pichegru. Vive déception de Cadoudal qui attendait le comte d'Artois, lequel ne semble plus être aussi enclin à l'action... Bientôt, la méfiance et la discorde s'installent parmi les conjurés. Fouché et sa police veillent. Plusieurs d'entre eux sont arrêtés sur dénonciation. On sait que Cadoudal, alias Georges, est à Paris. On connaît aussi la présence de Pichegru et ses rencontres avec Moreau. Celui-ci est arrêté sur ordre de Bonaparte et incarcéré à la prison du Temple. Puis, c'est au tour de Pichegru. On le retrouve un matin étranglé dans sa cellule. Officiellement, c'est un suicide. Reste "Georges" . Il est finalement arrêté après une chasse à l'homme à travers Paris, au cours de laquelle il tue un policier. Cadoudal, Moreau et 45 autres accusés sont jugés le 28 mai 1804. Moreau est condamné à l'exil, Cadoudal à la peine de mort avec 12 de ses complices. Ils sont guillotinés le 25 juin 1804 en place de Grève. Ancien rédacteur en chef-adjoint chez Bayard-Presse, Jean-Claude Demory a été directeur de collections historiques aux éditions Hachette-Collections de 1998 à 2018. Auteur de nombreux romans, essais, biographies et récits historiques, il a notamment publié La mort du lieutenant Charles Péguy (Le Félin, 2023), Claude-François Malet, ou l'obsession du complot (Le Félin, 2021), Le Régiment de sapeurs-pompiers de Paris 1939-1945 (ETAI, 2019), ou encore le roman Le Rendez-vous du Palais-Royal (Plon, 2019).

02/2024

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Voyage astral

Fantastiques expériences de voyage astral

Mis au défi à l'époque par des directeurs de la CIA et des militaires de prouver qu'on peut sortir de son corps et que ce qu'il exposait dans ce livre était vrai, Robert Monroe leur fournit les preuves nécessaires, à la stupéfaction des officiers (en particulier du général de la NSA Albert Newton Stubblebine, à la tête du Intelligence & Security Command). Les militaires ont alors vu dans ces "sorties hors du corps" un outil peu conventionnel mais fascinant pour obtenir des renseignements, comme par exemple localiser les lance-missiles nucléaires disséminés un peu partout sur le territoire soviétique, Robert Monroe a sidéré le monde avec les récits et descriptions de ses fabuleux voyages hors du corps. Ingénieur en acoustique et à la tête d'une chaîne de radios américaines, du jour au lendemain Robert Monroe a vécu des sorties spontanées de son corps ce qui l'avait totalement paniqué. Essayant de comprendre rationnellement ce qu'il vivait, il a alors pris des notes de ce qu'il voyait au fur et à mesure de la maîtrise de ses "déplacements". De par sa formation d'ingénieur, il a compris que c'était un son spécifique qu'il entendait et qui induisait dès lors la " sortie" de son corps. Après plusieurs années, il a mis au point le système audio Hemi-Sync qui synchronise -avec des sons basse fréquence décalés- les parties gauche et droite du cerveau, favorisant d'abord la relaxation puis la "sortie" du corps. Au cours de ses innombrables voyages pendant plus de 30 années, Robert Monroe a précisément identifié 4 zones qui nous entourent : - La Zone-1 contient une sorte de monde matériel tel qu'on le perçoit ici bas, et tout ce qui est vu "hors du corps" est confirmé par la suite. Pas de personnes décédées, ni d'Anges, de Saints ou des dieux dans cette zone. - La Zone-2 se trouve "au-dessus" ou "après" la "1" et comprend plusieurs mondes, notamment celui où se retrouvent les "morts", et que Robert Monroe a classée comme très proche de ce que les religions ont identifié, à savoir des mondes violents, mornes, d'autres neutres, certains paradisiaques et dans lesquels on rencontre toutes sortes d'entités avec des guides, Anges, etc. La communication avec elles est possible. Le temps y est différent dans le sens où une demi-journée làbas correspondrait à environ 10 minutes ici. - la Zone-3 contient un autre monde physique, similaire au nôtre, mais où vivent des gens bénéficiant de technologiesévoluées, et avec des comportements différentes des nôtres. - la Zone-4 regroupe un monde radicalement différent où passé et futur ne constituent qu'un seul endroit - Monroe les a fragmentés en Focus 10, 12, etc.

03/2024

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Poésie - Comptines

Poème sucré de mon enfance. Edition bilingue français-arabe

Quand Assam Mohamed est arrivé en France, après un long parcours en provenance du Soudan, il ne parlait pas français. Il a appris grâce à des cours d'alphabétisation avec Elsa Valentin. Lorsqu'il ne savait pas dire le mot en français, il le disait dans sa langue maternelle, l'arabe, et Elsa Valentin notait phonétiquement le mot prononcé avant de chercher à le traduire en français. Tout en lui apprenant les mots qui lui manquait, elle s'est constitué un petit lexique de mots arabes pour apprendre elle aussi. Ainsi, le récit d'enfance d'Assam Mohamed s'est tissé dans les deux langues. C'est comme cela que l'on apprend à parler, par besoin de se raconter et de dire le monde. Pour rendre compte de ce tissage entre le français et arabe, nous avons gardé certains mots arabes au milieu du texte français, et inversement. Cette mise en page invite le lecteur à chercher le mot manquant dans la langue de l'autre. Dans la même page et dans la même couleur, on retrouve la retranscription phonétique de ce mot manquant, dans l'une et l'autre langue. La version sonore, publiée en même temps que le livre, en accès libre et gratuit sur notre site, permettra aussi d'entendre ce tissage entre les deux langues, et de savoir comment le mot se prononce dans la langue que l'on ne lit pas, que l'on ne connaît pas. Par sa forme, ce recueil témoigne du déplacement de soi qu'exige l'apprentissage d'une langue nouvelle très éloignée de sa langue d'origine. Ce que cela provoque de perturbation intérieure, d'enthousiasme parfois, de désespoir et d'inquiétude d'autres fois. L'effort que cela demande. Le courage. Dans le fond, ce texte raconte l'enfance d'Assam Mohamed. Il y a un enfant gardien de troupeau, un père qui veille, une chèvre espiègle, un voisin qui se fâche, un enfant qui grandit, un adulte qui se souvient. Ce long poème est une ode à l'enfance, une mémoire sensorielle que chacun, chacune d'entre nous garde blottie au fond, et que l'on dit mieux dans la langue de son enfance. Elsa Valentin écrit pour les enfants en jouant avec la langue et les langues. Elle revisite parfois les contes traditionnels, comme dans Bou et les 3 zours qu'elle écrit dans un langage mêlant mots d'autres langues, mots inventés, et mots-valises. Par ses cours de français aux demandeurs d'asile et la rédaction de leurs récits de vie pour l'OFPRA, elle poursuit cette réflexion sur les niveaux de langues, les mots justes pour se dire, la langue appropriée pour parler le monde. En ce sens, elle travaille le bilinguisme, voire le plurilinguisme, qui trouvent leur écho dans cette publication du Port a jauni. Pour traduire ces mots en images, nous avons choisi Frédéric Hainaut, qui dessine comme dans un souffle, avec l'énergie et le geste dru, sec, assuré et naïf d'un enfant. Auteur et illustrateur de dessins animés, Frédéric Hainaut se lance aussi dans des séries picturales impulsives, comme la frise que nous avons choisie, où l'on voit tout à la fois la marche, les herbes sèches, la course, le paysage sec, le sauvage.

03/2022

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Sociologie

L'incendie de l'hôtel Paris-Opéra, 15 avril 2005. Enquête sur un drame social

Que valent des vies humaines ? Dans la nuit du 14 au 15 avril 2005, un hôtel meublé, géré par le Samu social, habité par des familles, la plupart originaires d'Afrique, flambait à Paris près des Galeries Lafayette. Vingt-quatre personnes, dont onze enfants, y laissent la vie. Il fallait en témoigner, ne pas laisser s'installer l'oubli. En avril 2010, lors d'une rencontre commémorative dans le square de la Trinité, où s'élève la stèle portant le nom et l'âge des victimes, Aomar Ikhlef, porte-parole et fondateur de l'Association des familles des victimes, et Claire Lévy-Vroelant, la sociologue des hôtels meublés, ont décidé du projet dans ses grandes lignes. L'épreuve des deuils, l'interminable marche de la justice, la solidarité, les espoirs et les combats, ne pouvaient être narrés, décrits, écrits, que par ceux-là mêmes qui les avaient vécus. Le désir de passer outre les formes canoniques de l'analyse sociologique a permis d'ouvrir un espace de parole dont ceux qui acceptaient de témoigner étaient entièrement les maîtres. Le pacte d'écriture a nécessité du temps, de la clarté et de la confiance. Enregistrés et réécrits, ces récits ont pris corps, dessinant des lignes de vie et de migration confrontées à la violence d'un système. Fidèle aux objectifs de départ, ce livre témoigne du désir partagé de rendre publique une expérience extrême et de donner lieu et sens à une mémoire de l'événement. Quinze hommes et femmes racontent, cheminant à travers les mots pour exprimer l'indicible. Ces témoignages sont leur oeuvre, tissée à plusieurs mains. Claire Lévy-Vroelant, sociologue de l'habitat et de la ville, enseignante et professeur à l'université Paris 8. Au cours de ses très nombreuses recherches et publications, Claire Lévy Vroelant s'est d'abord interrogée, d'un point de vue démographique, sur les mouvements et la constitution de populations aux XIXe et XXe siècles puis, à une échelle plus humaine, sur les situations des individus et de leur famille dans l'univers de la ville. La question de la place faite aux nouveaux venus et aux étrangers dans la société urbaine se situe dans le cadre plus global des questions liées à l'histoire des migrations contemporaines. Logiquement, les interrogations sur les mobilités résidentielles en France et en Europe sur une longue durée ont développé en elle non seulement l'expertise mais aussi le goût pour la nature des relations entre déplacement, logement et dynamiques familiales. Ces études conduisent aussi à l'interprétation, par les politiques publiques, des ruses et adaptations de la famille. Ces questions sont approchées aujourd'hui sous l'angle des politiques de logement et des politiques sociales (logement social, protections, interventions sociales), mais aussi sous celui des solidarités ordinaires intégrant la question des mémoires dans la fabrication plurielle de la société urbaine. Depuis janvier 2014, elle coordonne la recherche " Penser la ville contemporaine " à la Maison des Sciences de l'Homme de Paris Nord. Elle est aussi membre du Conseil scientifique du Centre de recherche sur l'habitat, CNRS et membre du Conseil de l'Ecole Doctorale Sciences sociales de Paris 8 Saint-Denis. Elle a notamment publié aux éditions Créaphis Hôtels meublés, Enquête sur une mémoire de l'immigration, avec Céline Barrère (2012) et Une chambre en ville. Hôtels meublés et garnis à Paris, 1860-1990, avec Alain Faure (2007).

03/2018

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Littérature anglo-saxonne

Home [EDITION EN GROS CARACTERES

L'histoire se déroule dans l'Amérique des années 1950, encore frappée par la ségrégation. Dans une Amérique où le « White only » ne s'applique pas qu'aux restaurants ou aux toilettes, mais à la musique, au cinéma, à la culture populaire. L'Amérique de Home est au bord de l'implosion et bouillonne, mais c'est ici la violence contre les Noirs américains, contre les femmes qui s'exprime. Les grands changements amorcés par le rejet du Maccarthisme, par la Fureur de vivre ou le déhanché d'Elvis n'ont pas encore commencés. En effet, les Noirs Américains sont brimés et subissent chaque jour le racisme et la violence institutionnalisés par les lois Jim Crow, qui distinguent les citoyens selon leur appartenance « raciale ». Pour eux, le moindre déplacement, même le plus simple, d'un état à l'autre, devient une véritable mission impossible. En réponse à cette oppression, l'entraide et le partage – facilités par l'utilisation du Negro Motorist Green Book de Victor H. Green qui répertorie les restaurants et hôtels accueillant les noirs dans différents états – sont au cœur des relations de cette communauté noire dans une Amérique à la veille de la lutte pour les droits civiques. rnLa guerre de Corée vient à peine de se terminer, et le jeune soldat Frank Money rentre aux Etats-Unis, traumatisé, en proie à une rage terrible qui s'exprime aussi bien physiquement que par des crises d'angoisse. Il est incapable de maintenir une quelconque relation avec sa fiancée rencontrée à son retour du front et un appel au secours de sa jeune sœur va le lancer sur les routes américaines pour une traversée transatlantique de Seattle à Atlanta, dans sa Géorgie natale. Il doit absolument rejoindre Atlanta et retrouver sa sœur, très gravement malade. Il va tout mettre en œuvre pour la ramener dans la petite ville de Lotus, où ils ont passé leur enfance. Lieu tout autant fantasmé que détesté, Lotus cristallise les démons de Frank, de sa famille. Un rapport de haine et d'amour, de rancœur pour cette ville qu'il a toujours voulu quitter et où il doit revenir. Ce voyage à travers les États-Unis pousse Frank Money à se replonger dans les souvenirs de son enfance et dans le traumatisme de la guerre ; plus il se rapproche de son but, plus il (re)découvre qui il est, mieux il apprend à laisser derrière lui les horreurs de la guerre afin de se reconstruire et d'aider sa sœur à faire de même. rnrnrnHome est le dixième roman de Toni Morrison. À travers l'histoire dure et torturée de ce jeune soldat, c'est un roman de la rédemption que nous offre ici l'auteur. Ce retour à l'Amérique du XX e siècle, avec une focalisation sur les années 1950, est un développement nouveau dans l'œuvre de Toni Morrison, mais on retrouve pourtant les thèmes qui caractérisent son œuvre. Elle laisse le lecteur découvrir ces années 1950 qui ne sont finalement que suggérées qu'à travers de petits indices. Elle laisse le souvenir de cette époque se reconstruire à travers les images distillées dans notre inconscient collectif. C'est encore et toujours dans la suggestion que l'art de Toni Morrison se révèle. Elle réussit à faire d'un roman finalement assez court une véritable œuvre tout en subtilité, en vérités voilées qui se glissent progressivement jusqu'au lecteur avant d'exploser au grand jour.

03/2024

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Beaux arts

Les Civilisations de l'Islam

L’islam est une religion caractérisée par un monothéisme absolu et rigoureux. Sa vision du monde est simple et radicale, indifférente aux spécificités historiques, culturelles et raciales des personnes qui y adhèrent. En l’espace de quelques années après la mort de Mahomet, les armées islamiques, initialement formées d’Arabes, puis de divers peuples assujettis et convertis, conquirent des territoires immenses qui avaient vu fleurir la civilisation gréco-romaine puis judéo-chrétienne en Occident et la civilisation perso-zoroastrienne en Mésopotamie, remportant un succès éclatant. Quelques décennies plus tard, l’islam pénétra en Europe, conquérant l’Espagne et une partie de l’Italie du Sud, franchit le désert du Sahara pour convertir les populations d’Afrique noire en se superposant aux cultes locaux, et s’étendit aux vastes régions asiatiques jusqu’à atteindre l’Inde et rencontrer les cultes védiques et le bouddhisme, tandis que vers le nord il s’introduisait en Transoxiane (aujourd’hui l’Ouzbékistan), surpassant les conquêtes d’Alexandre le Grand lui-même, pour atteindre les frontières de l’empire chinois. Sur le plan de la culture et de l’expression artistique, le monde islamique assimila les énergies créatrices, les techniques et les coutumes des peuples assujettis, extraordinairement riches et diverses, et sut les refondre en une expérience complètement nouvelle et originale, tout en restant fidèle à la révélation coranique, qui impose à tout croyant de suivre ses préceptes et de répandre sa doctrine. Celui qui embrasse l’islam, considéré comme la seule vraie religion, fait alors partie du Dar al-Islam, la « maison de l’islam » : des concepts ancestraux tels que nation, race, activité, culture deviennent alors, du moins en théorie, dénués de signification. L’ensemble du monde islamique parle la même langue, l’arabe, la langue du Coran, dont les lignes directrices ont façonné les différentes traditions culturelles avec une homogénéité surprenante – homogénéité qui a caractérisé, et qui imprègne encore, la culture et le vécu spirituel et politique de centaines de millions de personnes et de nations entières. À l’intérieur de cet horizon culturel commun se sont élaborés au fil du temps des langages artistiques et des coutumes nationales, à travers la réémergence graduelle – quoique au sein de l’identité islamique commune – d’énergies locales vigoureuses, auxquelles l’arrivée de nouvelles populations et les déplacements pour motifs religieux, commerciaux et scientifiques ont apporté par la suite des éléments féconds. Tout discours de caractère général, comme les sujets abordés dans cet ouvrage, doit donc être pris comme une indication globale, à approfondir et clarifier parfois. Il est clair, par conséquent, que dans ce monde islamique diversifié existent côte à côte des réalités culturelles, spirituelles et artistiques d’une richesse et d’une complexité remarquables, mais le substrat commun éthico-politico-religieux, inséparable dans ses composantes, a donné naissance et produit encore des manifestations bien reconnaissables, unies par une spécificité que l’on peut définir comme islamique.

04/2010

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Histoire de France

Les année 39-45 vécues et racontées par le "malgré nous" François Schaller

Depuis plus de 30 ans, Danièle Lheureux se consacre à la recherche des Combattants de l'Ombre de la région Nord-Pas-de-Calais. Pour les retrouver, elle a parcouru la France. Au cours de ses déplacements, elle a fait la connaissance de résistants d'autres régions. Comme dans la majorité des cas, beaucoup sont restés dans l'anonymat par modestie. Elle désire les faire connaître afin qu'ils prennent leu r place dans l'Histoire . de la Résistance. Cet ouvrage est dédié à François Schaller et relate son parcours durant les années d'occupation. En septembre 1939, l'université de Strasbourg s'étant repliée sur Clermont-Ferrand, François Schaller, jeune bachelier né à Muttersholtz (Bas-Rhin), s'inscrit à la Faculté de Lyon. Sur les insistances de ses parents, il est en Alsace en fin d'année scolaire 1940. A la rentrée suivante, il reprend ses études à Fribourg. Mais, très vite, les mesures prises par les autorités nazies menacent les jeunes Alsaciens. A leur embrigadement, suit le Service du Travail du Reich en mai 1941, la conscription obligatoire en août 1942, l'incorporation dans la Wehrmacht en septembre. Utilisant des astuces, François Schaller évite le départ d'octobre. Fin septembre 1943, il reçoit son ordre de mobilisation à Ulm, deux mois plus tard au Kühberg. La situation évolue, le 7 février il doit aller à Màhrisch-Weisskirchen (Tchécoslovaquie). Classé au service de garnison à l'hôpital-vétérinaire, il suit la progression sur tous les fronts, il voit passer les nombreux bombardiers alliés, les raids s'arrêteront à l'arrivée des troupes soviétiques sur la zone. Le 1er avril 1945, François Schaller est incorporé dans la 3ème Cie, puis la 1er Cie du bataillon d'assaut qui se dirige le 8 vers la Slovaquie. Le 14, les hommes sont en première ligne où ils relèvent une troupe épuisée, face à des soldats roumains sous commandement russe qui attaquent le 17 avril. A 19 h, la compagnie de Schaller est encerclée et doit se replier... mais un officier renvoie les hommes au front ! Les pertes sont lourdes... peu importe, il faut retourner au feu ! Schaller est blessé et envoyé à l'arrière. Déclaré guéri, il est renvoyé le 24 dans la 3ème Cie. Le 29, alors que le départ au front est prévu à 16 h, la rencontre avec un Alsacien fait basculer le destin de Schaller. Cantonné dans la zone, cet homme est introduit chez le chef local des partisans. Les deux hommes décident de déserter. Leur plan mis au point, ils rejoignent les Tchèques jusqu'à la fin de la guerre. Le 29 mai, ils entreprennent le voyage du retour vers la France avec les passages délicats d'une zone d'occupation à l'autre. Le 5 juin 1945 à 14 h 30, François Schaller pose le pied sur le sol de France.

03/2016

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ouvrages généraux

Internationalisme ou Résistance (1940-1957). Une Vie Contre le Capitalisme (4e partie)

1929 Premier contact avec des ouvriers spartakistes ; il milite dans le cadre des jeunesses communistes et sera instructeur politique sur un district à Düsseldorf. 1933 Arrêté par les nazis, envoyé au camp de concentration de Börgermoor. Il y assiste à la naissance du Chant des Marais. Libéré faute de preuves au bout de 6 mois, il milite dans la clandestinité sous Hitler. 1934 Sous le coup d'un mandat d'arrêt pour préparation à la haute trahison, il se réfugie en France, et milite au PC allemand en émigration. Confronté aux comportements bureaucratiques de la direction, il s'y oppose, est mis en relégation. Acculé jusqu'au suicide, il est recueilli par des militants parisiens du PCF. Il est effaré de l'inconscience qui règne en France face au danger fasciste. 1936 Choisit de ne pas rejoindre les Brigades internationales en Espagne, où il risque d'être liquidé. Il s'engage fin 1938 dans l'armée française pour y militer et contribuer à combattre le fascisme. 1939 Mariage avec Denise Neveu, jeune ouvrière couturière. Suite à une grève de la faim au 17ème RAD, il est envoyé en centre psychiatrique militaire, puis réformé. 1940 Le PCF est interdit. Gengenbach est arrêté, interné au camp du Vernet (Ariège) où la "République française" interne les "suspects politiques" . Malade, il est hospitalisé à Toulouse, d'où il s'évade avec la complicité de Denise et de médecins du centre hospitalier militaire. 1941-1944 Retour à Paris dans la clandestinité. Ecoeuré par le chauvinisme du PCF ("à chacun son boche"), il milite en internationaliste. Il contacte des soldats allemands, monte un réseau d'informations sur les déplacements de troupes et organise des filières de faux papiers. Il dénonce le désintérêt des organisations de résistance, gaullistes comme PCF, face aux rafles anti-juives. Il trouve les moyens d'en être prévenu, et en informe la communauté juive de Paris. Il organise l'élimination d'un officier SS, en évitant les représailles habituelles. Il prépare l'assassinat de l'antisémite Céline. Arrêté par la Gestapo, il ne reconnaît que ses convictions. Condamné à la pendaison pour ses activités en France, il est envoyé à Düsseldorf. 1945 Interrogatoires à la prison de Ratingen, "l'épreuve la plus barbare" de sa vie de militant. Himmler décide la solution finale pour les communistes encore vivants. Wilhelm Gengenbach s'évade de justesse lors d'un dernier "transfert" . 1946 Naturalisé français, il reste un exilé éternel. Il choisit de militer en France où existe une opposition à la politique droitière dans le PCF. 1951-1956 Il s'installe à Hermé en Seine et Marne, où il anime une cellule d'ouvriers mineurs en argile, un rare moment heureux pour lui. Il soutient les nationalistes algériens, malgré l'interdiction du PCF. 1958 Il obtient une concession de bouquiniste sur le quai Voltaire, à Paris. 1970-1980 Décès de Denise et de plusieurs de ses enfants.

07/2023

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Beaux arts

Sigalit Landau. Edition bilingue français-anglais

Quatre mois par an, pendant l'été, les résidents de la cellule d'habitation 516 de la Cité Radieuse Le Corbusier (Marseille) invitaient un artiste de renommée internationale à prendre position avec ses oeuvres dans ce lieu mythique de l'architecture du xxe siècle. En 2015, c'est l artiste israëlienne Sigalit Landau qui a séjourné quelques jours dans la cellule. Libre d'interagir avec l'architecture, la charge intime et la fonction domestique de la cellule, l'artiste a pu s'approprier l'ensemble des espaces, modifier la disposition des meubles et des objets, les faire disparaître, les remplacer par d'autres, changer l'attribution des pièces, faire le vide par endroits, le plein par ailleurs, mais a eu pour contrainte de maintenir valides les fonctionnalités vitales des lieux qui demeurent habités pendant les 3 mois d'ouverture de ce centre d'art particulier. Elle a ensuite donné ses instructions quant au mode d'habitation / cohabitation avec les oeuvres installées. Son intervention dans la cellule516, Sigalit Landau l'a intitulée "Better Place" . La référence à l'entreprise éponyme de véhicules électriques est immédiate : la compagnie israélienne Better Place voulait créer un monde meilleur, un monde libéré de sa dépendance aux produits pétroliers et à leur géopolitique. Plus largement, c'est la pertinence, la naïveté et le danger de penser le changement et le progrès à travers de grandes utopies, comme celles qui ont marqué les XXe et XXIe siècles, que met ici en cause Sigalit Landau. Parmi ces utopies, l'Unité d'Habitation Le Corbusier, en tant que projet d'habitat collectif conçu pour "adapter" l'homme moderne aux conditions de vie économiques et "machinistes" de l'après seconde guerre mondiale, fait figure de parangon. Aux solutions et idéologies totalisantes, Landau oppose des voies singulières et des voix de femmes : après le temps des utopies et de leur démesure, vient le temps d'un retour au récit, à la transmission et à l'intime... temps d'une refonte des mythes civilisateurs au coeur même du foyer. Dans la cellule516, Sigalit Landau prend ainsi position à travers un vaste ensemble d'oeuvres (sculptures, installations, vidéos, dessins...), certaines inédites, d'autres réactivées et ré-agencées spécifiquement pour le lieu et le contexte. Audrey Koulinsky, commissaire de l'exposition La collection "Les actes de la cellule516" rend compte après chaque saison de ce qui s'est joué pour ses résidents permanents et temporaires : comment l'oeuvre d'art impacte - c'est-à-dire fait varier - les déplacements et les habitudes corporelles quotidiennes au sein du logis, les pensées et le vécu subjectifs de ses résidents (permanents et temporaires), autrement dit, comment se (re)définit, dans ce contexte, la fonction "d'habiter" , et simultanément la notion d'oeuvre d'art. Ce troisième opus permet également de dresser le bilan des 3 années d'activité de ce centre d'art si particulier.

03/2018

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Littérature française

Souviens-toi ramier... Contes d'amour kabyles

Ces vingt-deux contes d'amour kabyles ont été recueillis dans les villages de Kabylie dans les années 1980. Leur quête et leur publication furent ardues à cause de la situation politique en Algérie entre 1992 et 2002, qui entraîna déplacements de populations et traumatismes liés au terrorisme. Ces contes appartiennent, pour la plupart, à la littérature orale, ils sont généralement rapportés par les femmes. La société kabyle s'est ingéniée à décharger dans le phantasme le surplus de ses privations. Ainsi, l'amour banni, parce qu'il est absent, parce qu'il est en fuite le jour, est-il représenté majestueusement la nuit… à la lueur timide des dernières braises… La femme dans le conte ne figure pas seulement un objet de désir, elle est reflet de l'amour que le héros porte en lui. Amour miroir choisi par l'homme pour s'y mirer, s'y qualifier. Miroir idéal ou miroir monstrueux tant qu'il n'a pas atteint son but : amour dangereux où il faut affronter l'autre (l'ogre ou l'ogresse). Un des mythes fondateurs de la culture kabyle enseigne que l'univers a été créé (mis au monde) par une femme dite Yemma-s n Ddunit. Mère du monde, Yemma-s n Ddunit avait un réel pouvoir, elle régnait sur tout et tous dans un univers enchanté, mais elle commit une grave faute en laissant échapper un pet, sa magie disparut. Depuis, trois figures de femmes surgissent dans les contes : Settoute, la vieille femme méchante, Tsériel, la femme sauvage, Loundja (fille de Tsériel), la femme divine, qui se métamorphose parfois en perdrix. Mère ogresse, fille divine, le héros prédestiné à la conquérir, un prince ou un garçon pauvre, célibataire, vivant chez sa mère, devra accomplir un périple initiatique, déjouer les maléfices de la méchante, amadouer la sauvage, conquérir sa jeune fille, enfin comprendre le message : le sens de l'existence, que lui délivrera Loundja. Au terme du voyage, le prince sera à l'origine de la fondation d'un nouveau groupe, d'une nouvelle société, d'un nouvel état de conscience…Que mon conte soit beau et se déroule comme un long fil ! Il était une fois un prince… Les contes d'amour kabyles sont présentés et édités par Tassadit Yacine-Ttitouh, spécialiste de la culture berbère, directeur d'études à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales (Laboratoire d'Anthropologie sociale). Elle est notamment l'auteur de Poésie berbère et Identité, de L'Izli ou l'amour chanté en kabyle (Éditions de la MSH), de Les Voleurs de feu et Aux origines du malaise culturel des intellectuels algériens (La Découverte). Elle anime la revue d'études berbères Awal, fondée en 1985 avec l'anthropologue algérien Mouloud Mammeri. Elle a édité les Esquisses algériennes de Pierre Bourdieu (Seuil, 2008) et le Journal 1928-1962 de Jean El Mouhoub Amrouche (Non Lieu, 2009)

03/2017

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Biographies

Jean de Renaud. L'ingénieur militaire de François 1er

Juillet 1494. Les murailles de Turin, Gènes, Florence, volent en éclats sous la puissance des boulets métalliques de l'armée royale française. Il sera désormais vital pour les défenseurs italiens de renforcer les murailles d'enceinte des villes pour que ces boulets métalliques soient moins destructeurs. En rupture avec l'architecture militaire médiévale, les ingénieurs italiens, vont succéder aux maîtres-maçons et architectes pour contrer efficacement les attaquants avec "le tracé à l'italienne" . Le rempart médiéval traditionnel en maçonnerie est remplacé par un mur de terre remparé dans lequel les boulets s'enfoncent dès lors sans causer de dégâts. Des bastions, armés de canons, remplacent les tours pour interdire aux pionniers l'accès au pied de l'enceinte et faire, à terme, disparaître les échelles pour entrer dans une place. Ces deux innovations permettent de rétablir un équilibre entre défenseurs et attaquants. La rivalité constante entre les deux souverains, les plus puissants d'Europe, François 1er et Charles Quint, va faire de Jean de Renaud un officier d'artillerie, spécialisé dans l'attaque des places. De grandes dates marquent la première partie de son parcours : 1515 : victoire de Marignan - 1524 : invasion de la Provence - 1525 : défaite de Pavie. Face à l'agressivité de l'empire germanique, François 1er se doit maintenant de protéger impérativement les frontières du royaume. Le "tracé à l'italienne" va présider à une réfection totale des places fortes stratégiques. C'est une "ceinture de fer" que François Ier initie. A 40 ans, choisi par le roi de France, Jean de Renaud va prendre une autre dimension en se consacrant désormais à fortifier nos frontières. Il va multiplier les déplacements, passant d'un chantier à l'autre, de la Picardie à la Provence. Il va mettre son art au service de deux rois successifs, François Ier et Henri II, comme "commissaire aux fortifications et réparations des places de frontières" . De tous ses chantiers, son chef-d'oeuvre est incontestablement Saint-Paul-de-Vence où il se consacre à la fortification d'un site exceptionnel, resté pratiquement en l'état. Son rôle capital au siège historique de Metz en 1552, où Charles Quint subira sa plus grande défaite, lui vaut d'être honoré par le roi et célébré par le maréchal de Thou qui écrit dans ses mémoires, qu'il était "le plus grand spécialiste des mines de son époque" . Philippe II ayant attaqué Saint-Quentin, Jean de Renaud, en vieux capitaine fidèle à l'esprit provençal, où : "chacun, dans ce péril extrême, se fait soldat depuis l'âge de 14 ans jusqu'à 60" , rejoint cette ville de Picardie. Retranché avec l'amiral de Coligny, Ambroise Paré et moins de 2 000 hommes, il va résister désespérément pendant trois semaines avant d'être blessé mortellement à 60 ans, après plus de 40 ans au service du royaume de France. Dans cette biographie, l'auteur nous fait découvrir dans sa réalité opérationnelle au quotidien, le parcours du premier ingénieur militaire choisi par François Ier pour construire "la ceinture de fer" , étape tout à fait remarquable en sites fortifiés sur les frontières du royaume. Ceinture fortifiée que Vauban terminera, un siècle et demi plus tard, en "pré carré" .

07/2022

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Poésie

Sur la voie abrupte

Jean-Claude Caër a pensé ce recueil durant cet étrange printemps 2020 où le gouvernement nous intimait de nous claquemurer et de limiter nos déplacements à l'essentiel. Plutôt que de rester à Montmartre sans pouvoir n'y rencontrer personne, Caër a décidé de retourner vivre avec sa femme dans la ferme même où il est né, à Plounévez-Lochrist. Ce retour amont sur les terres de son enfance semble l'avoir remis en contact avec tout un pays qu'il avait en partie refoulé lors de ses virées aux bouts du monde, celui, empreint d'une certaine raideur léonarde, de ses parents et grands-parents : "chaque route, chaque talus, chaque sentier / plongent vers les ancêtres" . Ce repaysement forcé est pour l'auteur l'occasion d'une inhabituelle mise à nu, alors même qu'il écrit depuis toujours une sorte de journal de sa vie en poèmes. Entre les ancêtres et lui s'établit un dialogue fait tantôt de connivence tantôt d'effroi : il faut d'ailleurs entendre ce mot d' "ancêtres" dans un sens large, qui recouvre à la fois ceux que la nature lui a donnés pour parents, et ceux qu'il s'est donnés pour maîtres parmi les grands morts : poètes, architectes ou sculpteurs (au cours de ses voyages d'avant et d'après le confinement, Caër se rend par exemple à Saint-Pétersbourg au musée Anna Akhmatova ou au cimetière non catholique de Rome où il se recueille sur les tombes de Shelley et Carlo Emilio Gadda). Reste que ses souvenirs les plus marquants lui sont redonnés en 2020 à travers le paysage immémorial de la Bretagne, où l'intermittent voyageur des confins qu'il est, angoissé par le désert d'hommes alentour, s'attache aux bernaches, ces oiseaux migrateurs en partance pour la Sibérie. Il y a quelque chose d'émouvant à voir Caër faire alors un usage quasi-magique d'objets, au premier rang desquels il y a la machine à écrire étiquetée du Vietnam qui lui vient du grand-père d'une amie, administrateur autrefois sur le territoire des Moï. En voyageant, en écrivant, Caër aura peut- être accompli sous le signe du bonheur ce que ses ancêtres, eux, auront fait, plus ou moins, par nécessité : au séjour contraint de son père en Allemagne pendant la guerre de 40 répond son propre désir - alors empêché - d'une marche en Forêt noire. Le recueil est composé de sept parties ; celle du confinement occupe le centre et donne la tonalité générale au volume qui, s'ouvrant sur une suite de poèmes en hommage discret à sa femme, s'achève, comme dans son précédent opus, sur une évocation de sa mère à l'agonie. Pour autant, ce livre quasi testamentaire, d'adieu au voyage ("Sur la voie abrupte, le monde ne reviendra pas".) n'est pas lugubre ; il est porté par une passion de la vie et un art de la légèreté qui se veut un peu japonais. Cäer évoque, dans l'esprit des haïkus, les sujets les plus graves sans jamais peser : "Après la pluie, les amis. / Après les amis / La neige. / Ah, quel délice ! "

04/2023

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Sciences historiques

Dans le sillage de La Pérouse. Hommes de mer et d'outremer du Tarn

"Hommes de mer et d'outremer du Tarn" est un sous-titre qui interpelle, s'agissant d'un département continental d'où l'on accède par voie d'eau à l'Atlantique et à la Méditerranée par le Canal du Midi, depuis 1681. On est pourtant rapidement convaincu à la lecture de ce livre que ce territoire a fourni plus que sa part démographique au monde maritime et d'outremer. Mais le cadre départemental est assez récent, et c'est aussi dans celui du Languedoc du Nord-Ouest, et de ses évêchés, que se sont développés des vocations maritimes ou de longs séjours outremer, à l'époque Royale. La Pérouse, connu internationalement, n'est pas sa seule gloire locale. Les officiers de Marine assurent naturellement une part prépondérante de cette participation maritime et ils ont même fourni cinq Ministres de la Marine et plusieurs Maires de villes assez importantes, après la Révolution. Pendant la Royauté, il était également assez naturel de nommer de hauts gradés de la Marine comme gouverneurs de territoires d'outremer, puisque les navires étaient les seuls moyens de s'y rendre, et que la vie de marin les leur avait fait découvrir depuis leur jeunesse. On est d'ailleurs assez impressionné par leur extraordinaire mobilité, à une époque où les déplacements étaient lents, en les observant successivement dans des parties du monde très éloignées les unes des autres, à seulement quelques années de distance. Des officiers moins gradés (car ils sont morts prématurément pour la France) méritent aussi d'être signalés. Sont concernés par cet ouvrage, non seulement les officiers qui assument la fonction d'épée et de conduite des navires mais aussi les médecins-chirurgiens, fréquemment employés dans des travaux de zoologie ou de botanique, les hydrographes embarqués ou non, les officiers de plume assurant la logistique à terre, les officiers des troupes coloniales et les ingénieurs du génie embarqués qui organisent la défense à terre, ou observent celles de leurs concurrents. La vie sur les navires n'est pas le seul état qui peut rapprocher ces hommes de la mer. Par exemple, les Protestants tarnais, souvent contraints à un exil régional, ont brillamment réussi comme armateurs dans les grands ports de Bordeaux ou de Marseille, voire même à l'étranger quand ils ont dû abandonner la nationalité française. II y a aussi les marins civils qui ont travaillé pour eux ou pour d'autres armateurs. Des membres du clergé ou des moines catholiques ont été conduits vers l'exil par la laïcité du début du XXe siècle ou par le développement colonial. Le goût de l'aventure ou l'esprit missionnaire sont d'autres causes d'expatriation transocéanique et ils ont aussi leurs représentants dans le Tarn. Pierre Bérard, ancien administrateur général des Affaires maritimes, retraité dans le Tarn, a gardé le goût de l'eau salée, et s'est intéressé à ceux qui, ici, se sont voués à la mer... Cette synthèse, déjà riche, est nécessairement incomplète, mais il s'agit d'une première publication sur ce sujet; il n'existe par conséquent aucune référence. L'auteur espère que cette première étude suscitera l'émergence d'informations complémentaires.

06/2012

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Ethnologie

Les Pandé de Bali : la formation d'une "caste" et la valeur d'un titre

Avant-propos Brève note sur la transcription et la prononciation des mots balinais Introduction Première partie Le positionnement du fait Pandé Chapitre I : Le repérage des groupes Pandé 1. Les artisans et les Pandé dans l'ancienne société 1. 1 Présentation des sources 1. 2 Les chartes des anciens rois de Bali 1. 3 Les sources javanaises 1. 4 Les sources néerlandaises 2. Les métiers de Pandé, la parenté et le titre de Pandé dans la société contemporaine 2. 1 Groupes d'artisans et groupe de parenté 2. 2 Différences et similitudes des groupes Pandé 2. 3 Les Pandé Bali Aga Chapitre II : Les cadres de l'identité Pandé 1. Groupes locaux ou localisés et unités translocales 1. 1 Introduction au contexte de la parenté 1. 2 Unités de résidence, sanggah, sanggah gedé et dadia 1. 3 Les unités translocales : parenté et hiérarchie 2. Déformations et déplacements des groupes de parenté 2. 1 Fusions et scissions 2. 2 Localisation et délocalisation Deuxième partie Le cas des Pandé Bratan Chapitre III : La formation d'un groupe titré 1. Les groupes localisés et leurs temples 1. 1 Les dadia et familles du Nord et du Sud 1. 2 Les différences inscrites dans les temples 2. La tradition des origines et l'origine de la tradition 2. 1 Les nouveaux Pandé Bratan du Sud 2. 2 Les Bratanais et l'ancien village de Bratan 2. 3 Changements sociaux et glissements d'identité Chapitre IV : La mise en écriture du récit des origines 1. La version de Jadi 1. 1 Mpu Bumi Sakti, l'ancêtre de Madura 1. 2 Les voyages à Bali 1. 3 Les circonstances du départ de Madura 1. 4 Le châtiment de Brahma 2. Les différences de la version de Mengwi 2. 1 Les références au fonds littéraire javanais 2. 2 Les emprunts à la chronique de Gélgél 2. 3 L'appel à la tradition des Pandé Tusan 2. 4 Autres distorsions et réajustements Troisième partie L'idéologie Pandé Besi et ses fondements Chapitre V : Le mouvement Pandé et son contexte social 1. L'affirmation de la différence Pandé 1. 1 Les signes d'un statut noble 1. 2 Le refus de l'eau lustrale brahmanique 1. 3 L'impulsion en faveur de l'unité 2. Conformité et opposition aux valeurs de la société de castes 2. 1 L'attraction du statut de Satria 2. 2 Les implications de la dissidence religieuse Chapitre VI : La double tradition écrite des Pandé Besi 1. Présentation des manuscrits étudiés 1. 1 Les textes non-retenus 1. 2 Les textes de la tradition Pandé Besi 2. L'histoire des guerriers de Majapahit 2. 1 Le fait et le dit des ancêtres javanais 2. 2 La conformité au modèle Triwangsa 3. Le "Trésor Révélé" 3. 1 Aji Besi, le forgeron primordial 3. 2 Antériorité, supériorité et séparation des Pandé Besi 4. Acceptation et contestation de la hiérarchie des castes Conclusion Appendice A : Le texte balinais de l'histoire des origines des Pandé de Serongga Appendice B : Traduction du texte et commentaires introductifs Appendice C : Quatre documents sur l'affaire de Ben

01/1987

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Sociologie

L'attestation

" Je soussigné(e) certifie que mon déplacement est lié au motif suivant... " Chacun d'entre nous se souvient de ces auto-attestations à remplir comme du confinement qui les accompagnait. Cet ouvrage a pour ambition de revenir sur ce moment littéralement extra-ordinaire au regard des questions qu'il a soulevées en matière de suspension des libertés et d'obéissance collective. Les sociologues Théo Boulakia et Nicolas Mariot reviennent sur ce temps si particulier du printemps 2020 durant lequel les habitants de ce pays n'eurent plus le droit de sortir de chez eux que sous des conditions très restrictives. Le livre met en avant la singularité de l'expérience alors vécue : en quelques heures, tout un chacun, quel que soit son lieu de vie, son métier ou son niveau de revenu, s'est retrouvé soumis aux mêmes obligations. En ce sens, le confinement constitue une occasion historique rare d'étudier l'obéissance et le conformisme vis-à-vis de l'Etat. Ces enjeux, souvent posés sur un mode très général et abstrait, prennent pour l'occasion des formes concrètes : les personnes les plus aisées et éduquées ont-elles vraiment été plus respectueuses des règles que les plus précaires et fragiles ? Celles qui sont habituées à donner des ordres plus que celles qui, en temps normal, les reçoivent ? Si l'ouvrage apporte des réponses claires à ces questions, c'est parce qu'elles s'incarnent dans une situation observable et mesurable : le contrôle par la police de la présence en extérieur. Du jour au lendemain en effet, des gens qui n'étaient d'habitude jamais contrôlés se sont retrouvés soumis au regard inquisiteur des forces de l'ordre. C'est cette extension du contrôle de police à toutes et tous qui représente à la fois la principale nouveauté imposée par l'événement et le fil directeur du livre. Pour ce faire, les deux auteurs ont mené une enquête fondée sur des matériaux originaux : réponses de plus de 15000 personnes, dans le temps même du confinement, à un questionnaire en ligne, données statistiques sur les contrôles et les verbalisations, ou encore innombrables " histoires du confinement " tirées de la presse locale et de la communication des forces de l'ordre. De façon très originale, afin d'entrer dans le coeur du sujet, les auteurs ont imaginé une " foire aux questions " qui permet de poser des définitions et de situer la spécificité du printemps français au regard des choix opérés ailleurs dans le monde, notamment chez nos voisins européens - on pourra même se faire son propre avis sur où... passer le prochain confinement ! L'argumentation est constamment étayée et vivante : chacun. e pourra s'y retrouver, notamment dans le rappel de l'exubérance de certaines restrictions locales décidées par les préfets et les maires. Parmi les nombreux apports de l'ouvrage, on peut mettre en avant le chapitre central qui montre comment l'omniprésence policière a produit un " inquiètement " du dehors, rendant aussi bien compte des décisions d'enfermement que de la tentation des excursions interdites. Mais encore l'effort mené pour décrire l'ampleur du travail de surveillance déployé sur tout le territoire : dans le Lot, par exemple, le nombre de contrôles de l'attestation fut plus élevé que celui de la population adulte du département ! Le livre propose aussi une riche réflexion sur la délicate question de la mesure du conformisme (qu'est-ce qu'obéir ? comment repérer " la triche " ? ). Enfin il soulève celle, tout aussi complexe, du rôle du genre : comment expliquer, sans tomber dans des stéréotypes, que les femmes se soient montrées plus " respectueuses " du confinement que les hommes ?

09/2023

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Histoire de France

Des tranchées à la guerre de l'ombre : le général Sauzey, un espion français

Que cherche-t-on dans la biographie d'un "agent secret" ? Sans doute, à découvrir quelques clefs ouvrant les tiroirs de l'Histoire cachée, dévoilant certains des mécanismes qui y seraient dissimulés. Le lecteur est comblé lorsqu'une action occulte lui est révélée. Face cachée de la marche du monde, le mystère enfin percé peut expliquer bien des choses. La vie de Jacques-Abel Sauzey, durant laquelle les missions menées tout au long de sa carrière de militaire pour le compte du très discret "Deuxième Bureau" de l'Armée tiennent une place essentielle, est l'exemple parfait des récits d'aventures d'espions et autres "honorables correspondants". Elle est cependant plus simple, plus belle et surtout authentique. Né à l'extrême fin du XIXe siècle, au sein d'une famille traditionaliste de traditions militaire et catholique, Jacques-Abel Sauzey s'orientera tout naturellement vers le métier des armes. Engagé à 18 ans, dès le début de la Grande guerre, il fera toute sa carrière au sein de l'Armée, gravissant tous les échelons, depuis le statut de simple soldat jusqu'au grade de Général. Sa biographie n'a cependant pas grand-chose à voir avec la vie militaire traditionnelle mais relève du roman d'aventures. Dès la fin la première guerre mondiale, il est envoyé à l'étranger, dans des villes souvent pleines de séduction, Constantinople, Alexandrie, Varsovie, Helsinki, Tokyo, Shanghai, ou parfois dans des contrées moins hospitalières : l'Afrique équatoriale, le cercle polaire. Aux quatre coins du monde, il est journaliste, commis-voyageur, géographe ou simple touriste. Et pourtant, ses déplacements correspondent souvent, comme par un extraordinaire hasard, à des épisodes troublés : il est là où le destin semble hésiter. C'est le cas en 1922-1924, à Constantinople puis à Alexandrie, alors que l'Empire ottoman s'effondre, faisant place aux fondements explosifs du Proche-Orient moderne ; c'est encore le cas lorsqu'il rejoint Varsovie, en 1926, quelques jours avant le coup d'Etat du maréchal Pilsudski. La mission emblématique entre toutes, à cet égard, est l'observation de la guerre de Mandchourie, en 1931-1932, vécue tant auprès des Japonais que des Chinois. En bien des occasions, ces "voyages" deviennent de véritables explorations, raids à la fois agités, discrets et dangereux. Bien entendu, l'intervention de notre "honorable correspondant" n'est pas décisive dans le cours des évènements auxquels il est mêlé, mais son rôle est d'autant plus important. Sur des terrains parfois très éloignés des lieux traditionnels de l'influence française, il voit, note et informe sa hiérarchie. Ses descriptions, plus tard ses conférences et ses articles rendent une image si vivante et juste des lieux, des personnages et des situations, qu'ils peuvent être aujourd'hui considérés comme des témoignages incontournables. La place accordée dans tous ses récits aux leurres militaires, aux rumeurs et à la désinformation, à la propagande et la contre-propagande lancés par les partis rivaux est d'une grande importance et feront de lui, durant les heures tendues de la Guerre froide, l'un des spécialistes français de l'action psychologique. Douée d'une solide personnalité supportant difficilement la hiérarchie, et pourtant militaire dans l'âme, Jacques-Abel Sauzey fut un personnage atypique passionné d'inventions et de machines liées à la protection du secret. L'accumulation des barouds aura raison de sa santé. Le Général de brigade Jacques-Abel Sauzey, commandeur de la Légion d'honneur, est mort à l'âge de 69 ans.

11/2018

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Histoire de France

Ces Alsaciens qui ont infiltré Vichy

Les ouvrages historiques n'ont pas manqué sur la brutalité de l'annexion de l'Alsace-Lorraine par le Ille Reich, le drame des Malgré-nous, le Struthof, la Résistance alsacienne, les combats de la Libération, les compromissions des "autonomistes"... Avec cet ouvrage, Jean-Claude Streicher revient une nouvelle fois sur l'autre versant de cette période, très, très rarement abordé : la relation alsacienne avec l'Etat français et Vichy. Elle avait une importance qu'on n'imagine pas. Le 1er octobre 1943, la direction vichyssoise des réfugiés avait en effet estimé à 142 472 le nombre des Alsaciens et Lorrains réfugiés en zone sud, à 24 659 ceux de la zone nord. Il s'y ajoutait 50 à 60 000 évacués de septembre 1939 non rentrés en Alsace ; plus 45 à 50 000 expulsés alsaciens et 90 000 expulsés de Moselle. Soit au total de 352 135 à 367 135 personnes pour les trois départements. Dix parlementaires alsaciens, sur les 16 qui avaient voté le 10 juillet 19401es pleins pouvoirs constitutionnels à Pétain, étaient de plus restés en zone libre. Cette diaspora a continué de profiter des institutions mises en place par la Ille République lors de l'évacuation de septembre 1939. Elle avait des intérêts matériels à défendre et vivait de l'espoir de revenir dans ses foyers libérés des Allemands. Espoir que les autorités vichyssoises ne négligeait pas d'entretenir, mais le plus discrètement possible, afin de ne pas réveiller la fureur de l'occupant. Ces intérêts matériels et moraux avaient leurs défenseurs - Alsaciens - à la périphérie et jusque dans le coeur de l'appareil d'Etat pétainiste. Ce livre remonte patiemment le fil de ces réseaux d'influence que le régime ne traquait pas, bien au contraire, puisqu'il tenait à leur marquer sa fidélité française. On découvre ainsi que ceux qui purent se hisser aux plus hautes fonctions (chefs de cabinet, de services ou préfets...) se connaissaient dès avant la guerre, notamment pour avoir combattu ensemble en Alsace par la presse et l'action politique l'autonomisme, le communisme et la germanophilie. Ils étaient maréchalistes avant l'heure, catholiques nationaux, Engagés volontaires de la Grande Guerre, Action française, Camelots du roi ou Cagoulards... Mais nullement collaborationnistes, façon Darnand, Déat ou Doriot. La grande révélation de cet ouvrage est que le concepteur de la francisque gallique, le capitaine Robert Ehret, était lui-même d'origine alsacienne, preuve généalogique à l'appui. C'est aussi le premier travail à apporter toute la lumière sur les déplacements très controversés à Vichy du député clérical autonomiste de Colmar, Joseph Rossé. Il éclaire par ailleurs des figures moins pétainistes (Alfred Gaessler, Schiesslé, Eugène Schueller...) pour mieux faire ressortir la diversité des engagements de ce temps. Marc Bloch, François-Georges Dreyfus, René Hirschler et Isaïe Schwartz, enfin, illustrent, le cas bien plus tragique des Juifs d'Alsace qui ont eux aussi été en contact direct avec l'Etat vichyssois, le dernier d'entre eux, grand rabbin de France, ayant même eu deux entretiens avec le Maréchal pour tenter de freiner Ies persécutions Comme à son habitude, Jean-Claude Streicher réalise ici un travail pionnier, factuel, très documenté, bien sourcé, se gardant de toute extrapolation à prétention psycho-psychanalytique.

10/2018

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Histoire régionale

Dictionnaire historique de la Franche-Comté sous les Habsbourg. Tome 2, les matieres. 1493-1678

Ce Dictionnaire historique de la Franche-Comté sous les Habsbourg (1493-1678) comprend trois tomes : Tome 1 : les personnages ; parfois connus ou célèbres, il s'agit surtout d'hommes et de femmes représentatifs de leur milieu social ou pro­­fessionnel. Tome 2 : les matières, dans tous les domaines : géographie, politique, diplomatie, administration, religion, économie, société, culture, art, sciences naturelles. Tome 3 : les lieux ; villes, bourgs, forteresses, abbayes, prieurés, etc. ; un atlas complète la présentation. Ce dictionnaire ambitionne de rassembler toutes les connaissances accu­­mulées par diverses recherches depuis une trentaine d'années. L'époque des Habsbourg a été peu étudiée. Il n'existe, pour l'instant, aucune synthèse globale, depuis le règne de Philippe le Beau ou celui de Charles Quint jusqu'à l'annexion de la province par le roi de France Louis XIV. Cinquante historiennes et historiens ont participé à la réalisation de cet ouvrage. Ce dictionnaire en trois tomes est d'abord un instrument de travail. Il ambitionne de rassembler toutes les connaissances accumulées par diverses recherches depuis une trentaine d'années. L'époque des Habsbourg a été peu étudiée. Il n'existe, pour l'instant, aucune synthèse globale, depuis le règne de Philippe le Beau jusqu'à l'annexion de la province par le roi de France Louis XIV. Tout reste à faire, grâce aux archives abondantes disponibles. C'est la raison pour laquelle nous avons accordé beaucoup d'importance à la bibliographie, aux livres et aux articles. Chaque notice est suivie, si possible, d'une ou plusieurs références. Chemin faisant, nous voulons aussi lever des malentendus, défendre quelques idées fortes, mettre en évidence des caractères originaux : La Franche-Comté, correspondant au comté de Bourgogne, n'était pas un Etat indépendant, autonome ou souverain, mais une province. Cette province était unie aux Pays-Bas (issus des anciens Etats bourguignons des ducs Valois), d'où l'abondance et la fréquence des liens avec les Flandres, terme familier pour désigner à l'époque l'ensemble des Pays-Bas. La Franche-Comté n'était pas espagnole ou hispanique mais elle avait des liens très étroits et très fréquents avec les souverains espagnols, puisque les comtes de Bourgogne étaient aussi (très souvent) en même temps rois de Castille et d'Aragon. En dépit de ce rattachement dynastique, la Franche-Comté ne fut pas hispanisée ; en réalité, les influences politiques, religieuses, artistiques, économiques, situent la province au coeur des liaisons entre les Pays-Bas (Malines, Bruxelles, Louvain, Lille, Arras, Tournai, Valenciennes, etc.) et les Etats de l'Italie du Nord (Milan, Gênes, Turin, etc.). L'hostilité envers le royaume de France n'empêchait nullement les échanges économiques et sociaux ; les possessions de fiefs de part et d'autre de la frontière, les déplacements de population, la fréquentation des universités françaises, les influences artistiques et les approvisionnements alimentaires (aux foires de Lyon et par la Saône, au port d'Auxonne) en témoignent. La "guerre de Dix Ans" n'a pas existé, pas en tant que telle ; il s'agit de la partie comtoise de la grande déflagration européenne appelée guerre de Trente Ans (1618-1648). Les liens entre la Franche-Comté et la couronne espagnole se sont fortement renforcés à partir de 1635 et surtout entre 1668 et 1678. Enfin, Besançon, cité impériale et métropole (siège d'un archevêché), était une enclave qui entretenait des liens étroits avec le comté de Bourgogne mais aussi avec les institutions de l'Empire des Habsbourg, notamment la Diète et la cour impériale.

05/2023

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Histoire internationale

Dans l'ombre de l'Occident et autres propos / Les Arabes peuvent-ils parler ?

Avec Yasser Arafat et Mahmoud Darwich, Edward W. Saïd est sans doute l'un des trois palestiniens les plus célèbre du XXe siècle. Bien que la plupart de ses textes soient traduits en français, la pensée de ce Palestinien de nationalité américaine, dont Tzvetan Todorov disait qu'il était l'un des intellectuels les plus influents du monde, est encore peu connue du public non académique francophone. À l'heure où éclatent les révolutions arabes, où les nationalismes s'affirment sans fard un peu partout en Europe, où la France est en proie aux polémiques sur « l'identité nationale », la pensée d'Edward Saïd s'impose dans toute sa puissance, son acuité politique, et permet de porter un regard critique sur l'actualité occidentale ; manière, en somme, de regarder sous le tapis d'un occidentalo-centrisme décadent. Blackjack éditions publie ainsi Dans L'ombre de l'Occident, titre générique d'un recueil de trois entretiens, inédits en français (extraits du recueil Power, politics and culture, interviews with Edward W. Saïd, publié en 2004 par Bloomsbury) qui offrent une approche transversale de l'univers d'Edward Saïd et permettent de comprendre comment le statut d'exilé est intrinsèquement lié au développement de cette réflexion originale. Edward Saïd parle depuis l'exil, sa parole est « entre mondes ». Et c'est de cette position qu'il critique les systèmes de représentations, la manière dont l'Occident construit des images de l'Orient, du Moyen-Orient. Il discerne, par extension, la manière dont l'Occident construit son rapport à l'Autre. Ces constructions se révèlent radicalement politiques, directement dominatrices. Edward Saïd montre ainsi comment la culture, dans son ensemble, est travaillée par les rapports de forces et d'instrumentalisation. Émanciper l'altérité au sein même des représentations, introduire la parole d'un Autre qui ne serait pas réductible ou manipulable, tel est sans doute l'enjeu majeur de l'oeuvre de Saïd dont il est question dans ces entretiens. « Pris entre “salamalecs” et “charabia”, les Arabes n'intéressent pas “le monde”. Les musulmans non plus. Si l'islam retient politiquement l'attention, le “monde arabe” est décor et paysage ». À travers ce texte au titre provocateur, Seloua Luste Boulbina, philosophe et politiste, ne se demande bien sûr pas si les Arabes sont, dans l'absolu, en capacité de parole, mais cherche des territoires où les paroles des Arabes peuvent trouver des résonances singulières dans une culture occidentale historiquement dominatrice. « Les frontières coloniales, écrit-elle encore, ne sont pas géographiques, elles sont avant tout humaines ». Dès lors, les « entre-mondes », concept forgé par Edward Saïd, ces lieux de l'art et de la littérature, deviennent un fil conducteur pour dire les déplacements et les migrations qui permettent de construire un langage commun et d'instaurer une réelle esthétique de la parole. Dans Les Arabes peuvent-ils parler ?, Seloua Luste Boulbina engage des dialogues, met en écho des voix aussi diverses que celles de Frantz Fanon, Sigmund Freud, Joseph Conrad, Edward Saïd, Hannah Arendt, Henri Michaux, Mallarmé, Arjun Appaduraï, Jean Josh Rabearivelo, Victor Segalen, Jacques Derrida, Frantz Kafka, Yoko Ogawa, Theodor Adorno, René Descartes, Samuel Beckett, Michel Foucault, Gilles Deleuze, Mahmoud Darwich, Sayed Kashua, Marcel Detienne, Amin Maalouf, Nietzsche, Joyce, Clément Rosset, Edgar Poe, Charles Baudelaire, Alexis de Tocqueville, Roland Barthes ou encore d'Ovide. La diversité des figures de l'exil met alors en question anciennes divisions coloniales et stéréotypes contemporains. Ici, les Arabes sortent de l'ombre, trouvent place dans l'expérience commune. Les philosophes, écrivains, poètes, artistes, exilés dans leur propre langue, seraient-ils tous des Arabes se demandant en français s'ils peuvent parler ? Entre esthétique et politique, le texte de Seloua Luste Boulbina est comme une respiration, au style précis, organique : il nous invite à tendre l'oreille.

11/2011

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Immigration

Vacances au bled. La double présence des enfants d'immigrés

- Un nouveau regard sur les transformations de l'immigration algérienne, en restituant conjointement les politiques d'Etats (Français et Algériens) et les contextes sociaux de part et d'autre de la méditerranée. - Une ethnographie concrète et attachante des descendant. e. s d'immigrés dans leurs voyages en Algérie et en s'appuyant sur une série de documents et d'objets orignaux : les usages des albums photographiques, de la maison, de la langue, du bronzage, du mariage... Débats politico-médiatiques et études scientifiques ont longtemps questionné l'appartenance à la nation française des enfants de l'immigration postcoloniale. Ce livre propose un renversement de perspective en étudiant le sentiment d'appartenance à la nation algérienne. Que signifie " être algérien " quand on a toujours vécu en France, et qu'on a gardé avec ce pays un lien surtout indirect, réactivé à l'occasion de courts séjours sur place, dans l'enfance et en tant qu'adulte ? Que vont chercher ces Français d'origine algérienne qui partent en Algérie à l'occasion de séjours de vacances ? C'est l'expérience binationale que ce livre entend éclairer en allant enquêter du côté du pays d'émigration des parents, en Algérie. Ce parti-pris implique aussi de s'intéresser aux politiques mises en oeuvre par l'Etat algérien à l'égard de ses ressortissants, politiques qui évoluent entre les années 1960 et les années 2000, et qui contribuent à remodeler l'idée du retour chez les descendants d'immigrés et leur famille. A partir d'un matériel original d'archives, des observations et des entretiens, cette enquête donne à voir comment les populations binationales vivent leurs sentiments d'appartenance. L'analyse des pratiques de vacances, et des discours qu'elles suscitent, permet d'accéder à une définition plus éclatée des identités : on peut se sentir davantage lié à une ville, un quartier ou un village qu'à un pays dans son ensemble ; des appartenances autre que nationales s'expriment dans ces séjours, en premier lieu des affiliations familiales. Plutôt que de se concentrer uniquement sur des " spécificités culturelles " potentiellement entretenues ou activées pendant ces séjours (langue arabe, religion musulmane), l'auteure analyse plus largement les manières d'être en vacances, incluant le style vestimentaire, l'emploi du temps de la journée, le type d'alimentation privilégiée, les modes d'hébergement ou encore les sociabilités. Ces pratiques vacancières se rapportent alors tout autant, si ce n'est plus, à la trajectoire sociale globale de ces personnes (origine sociale, niveau de diplôme, sexe, âge, situation familiale) qu'à leurs origines nationales. Enfin, ces appartenances renvoient plus largement à un double positionnement dans des hiérarchies de classe, de sexe et ethno-raciales partiellement disjointes, entre la société française et la société algérienne. Ce point de vue invite à faire éclater la fausse homogénéité de cette catégorie des " descendants d'immigrés " en constatant la différenciation des pratiques selon les trajectoires sociales familiales et individuelles. Parallèlement, cette approche implique d'appréhender autrement la société algérienne, en ne la définissant pas centralement par des critères culturalistes comme la religion (aujourd'hui vue comme l'opérateur central de distinction entre sociétés) mais en portant une attention particulière aux hiérarchies sociales propres à cette société. Les séjours passés sur place jouent le rôle de révélateur des dynamiques de mobilité sociale qu'occasionnent les déplacements entre deux sociétés nationales. Ce livre propose à la fois de voir comment les vacances passées en Algérie prennent des formes distinctes selon les caractéristiques sociales et sexuées des personnes rencontrées, mais aussi comment en retour, ces séjours modifient temporairement, ou de manière plus durable, leurs positions dans les rapports sociaux.

11/2021

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Histoire internationale

Géopolitique de la Côte d'Ivoire

Le 21 mai 2011 à Yamoussoukro, se tenait la cérémonie d'investiture du Président ivoirien Alassane Ouattara en présence d'une vingtaine de chefs d'Etat dont Nicolas Sarkozy et de Ban Ki-moon, Sécrétaire général de l'ONU. Cet événement qui symbolise le retour à la démocratie en Côte d'Ivoire intervenait après dix années d'une crise qui, d'économique était devenue politique puis globale, car au cours de ces deux dernières années on avait pu constater l'effondrement du pays dans pratiquement tous les domaines. Le refus pendant cinq ans de Laurent Gbagbo d'organiser des élections présidentielles puis sa volonté par la suite d'en ignorer le verdict parce qu'il lui était défavorable, laissera sans aucun doute pour longtemps des traces profondes et traumatiques dans ce pays qui avait été le phare de l'Afrique noire francophone au lendemain des indépendances. Faut-il rappeler que cette ancienne vitrine de la coopération française est encore aujourd'hui confrontée aux problèmes du sous-développement, en même temps qu'elle doit relancer une économie tombée au plus bas et rasséréner des esprits encore choqués par des souvenirs de pillages, d'exactions, de déplacements de population. Certes, le milieu naturel ivoirien est riche. Mais il est aussi en danger. Certes, la population du pays est jeune, dynamique, de plus en plus citadinisée. Mais elle est demeurée un puzzle d'ethnies encore trop souvent rivales, comme l'a montré la guerre civile qui a ravagé ces dernières années les espaces et les esprits. Pourtant, le père de la nation, Félix Houphouët-Boigny avait su en faire un pays en plein essor en choisissant dès le début de l'indépendance l'économie de marché alors que plusieurs de ses voisins s'enlisaient dans les déboires d'un socialisme à l'africaine, disparu aujourd'hui. De fait, ce sont des turbulences économiques qui ont provoqué peu après la mort du " vieux " la fin du " miracle ivoirien ", et ce, parce que le pays était sans doute trop dépendant des cultures de rente. Cette dégradation a eu pour conséquence une lente désagrégation des structures politiques de la nation qui s'est parallèlement traduite par l'émergence d'une forte hostilité vis-à-vis des étrangers. Le pays allait même jusqu'à connaître la guerre civile, la partition et le jeu de pouvoirs factieux. Cela est d'autant plus étonnant que la tolérance politique et religieuse avait auparavant facilité l'installation sur le sol ivoirien de plus de 4 millions d'immigrés. On a pu croire un moment, à partir des années 2007, que la reprise économique était au rendez-vous dans un contexte national et international apaisé. Il n'en fut rien et ces deux dernières années furent sans doute les plus mauvaises que les Ivoiriens aient connues depuis l'indépendance, malgré les efforts développés par le gouvernement d'Union nationale dans l'attente d'élections présidentielles sans cesse repoussées. Enfin organisées, elles donnèrent la victoire à Alassane Ouattara. Les troubles qui s'en suivirent menèrent la crise à son paroxysme. L'arrestation de l'ancien chef d'Etat donna un coup d'arrêt à cette descente aux enfers. Exsangue aujourd'hui, la Côte d'Ivoire devra se relever, panser ses plaies tant physiques que morales et retrouver son unité. C'est la tâche ardue qui attend le Président Alassane Ouattara. Il reste aussi à espérer que revenue à la démocratie, la Côte d'Ivoire puisse, aidée par des pays amis et les institutions internationales, reprendre en matière économique sa place de " poumon vital " de l'Afrique de l'Ouest. Le pari est difficile. Il peut être tenu.

06/2011

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Beaux arts

Les Cahiers de l'Agart N° 2 : Machine

Avant-Propos au seuil du visible ses propres dispositifs discontinus : montage, déplacement, épinglage, techniques mixtes etc. : le brouillon et la bouillie. La technique s'installe dans la forme : forme et technique s'assemblent en une "bouillie" où Deleuze voyait l'action propre au dispositif. Je d irai p lutôt u ne "émulsion" : u ne p art résiduelle de la forme, proprement technique et fonctionnelle qui n'accède pas au visible, poursuit sa course au coeur de la durée processuelle : elle a une vie propre et peut donc déployer ainsi un mode d'exposition autonome, en soi. En ce sens dispositifs et machines occupent la place de "l'esquisse" à ceci près que leur destination n'est pas d'être simplement au service du projet mais de créer un lieu nouveau de l'oeuvre, entre l'oeuvre elle-même et les conditions de sa réalisation. Ils sont ainsi une "nouvelle expression artistique" , ni dessin, ni peinture, ni sculpture, ni photo, ni cinéma, mais un lieu commun à toutes ses disciplines : à la fois "machine à comprendre" (expériences de Brunelleschi) et "machine à voir" (le Modulateur spatial de Moholy-Nagy). La mémoire, par sa nature même est le modèle intégrécomplexe de tout dispositif. Sa mécanique s'exerce depuis la plus ancienne antiquité, depuis Simonide de Céos jusqu'à Giordano Bruno, dans l'art de la rhétorique. Au Moyen- Age la Machina Memorialis e st un outil e ssentiel pour la pensée théologique ou philosophique, pour l'histoire, l'art et la poésie. Elle est sans doute la raison, en grande partie perdue aujourd'hui, de ce qui dans l'enluminure trame la lettre à l'image. Le collage adopte un grand nombre de ses fonctions, articulations, découpages, ainsi que sa structure faite de couches superposées. Il est aussi contemporain de l'invention de la psychanalyse et de La Recherche du temps perdu, deux modes de réactualisation de l'ar t de la mémoire. Le collage serait un troisième mode : l'inscription de la Machina Memorialis d ans le corps d e peinture. "Méditatif : Il est (tisonne-t-on), un art, l'unique ou pur . . ". . Mallarmé, "Crayonné au théâtre" . "Le mouchage de torche est la trace charbonneuse laissée par l'homme préhistorique après avoir frotté la torche sur les parois pour enlever la partie carbonisée qui asphyxiait la f lamme et la raviver". Si le dispositif est selon Deleuze "l'unité artificielle... d'un ensemble multilinéaire" , i. e. au minimum le lien construit (imposé par décision ou s'imposant de lui-même, par sa nature) entre au moins deux effets diffractés à partir d'une source commune, ne faudrait-il pas voir dans le "mouchage" le paradigme du dispositif pictural : une marque laissée sur une paroi de grotte avec la seule intention de ranimer le tison, et perçue dans un second temps comme trace, c'est-à-dire comme déjà du dessin ? Et si le dessin, tout au long de l'histoire, éclaire à sa manière, par la distinction des formes, c'est qu'il conserve en lui à travers son outil, le fusain et sa trace charbonneuse à la surface de la paroi, la mémoire du feu dont il est une mutation. A l'autre bout de l'histoire Matisse renouvelle la scène primitive dans une chambre, qui est une sorte de grotte, où, alité, on le voit tracer au plafond les figures de ses petits-enfants à l'aide d'un fusain attaché à une perche. On voit un même phénomène inaugural, la terre et l'eau pour médium cette fois, avec les traces de doigts creusant l'argile molle des parois de la grotte : d'abord une empreinte de la main posée accidentellement puis par insistance et répétition, par plaisir, le glissement de l'index dans l'épaisseur de la matière molle, poussant en avant et abandonnant sur ses bords le léger relief qui comme un talus ou les rives d'un ruisseau encadre sa marche en avant au but indécis. On retrouve ce doigt errant avec Miss Froy dessinant son nom dans la buée d'une vitre de wagon-restaurant. Ce nom -fantôme, apparaissant ou disparaissant selon le degré d'humidité ou de ventilation de la pièce est l'objet énigmatique de Lady vanishes d'Hitchcock. Le dispositif minimum conserve la "multilinéarité" qui a présidé à sa construction : il est maintenant le pivot de récits multiples que seule la résolution de l'énigme va réunir en un seul. Sans doute aussi la parole a erré longtemps dans le labyrinthe des sons purs et des onomatopées, jusqu'au Livre de Mallarmé. Face à ces dispositifs minimums fondamentaux et quasi originaires, à portée de mains, le collage introduit, historiquement et stratégiquement, une complexité maximale qui pulvérise la traditionnelle et antique unité et homogénéité du geste pictural en laissant affleurer

06/2019

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Sociologie

Pierre Bourdieu. Points de vue

Si la collection "Champ social" des éditions du Croquant réédite le n°47-48 de février -mars 2015 consacré à Pierre Bourdieu de la revue Regards sociologiques, c'est à la fois parce que ce numéro est devenu introuvable, mais surtout parce qu'il rassemble un dossier d'une grande diversité et d'une exceptionnelle densité. La revue Regards sociologiques avait consacré un numéro à Pierre Bourdieu pour honorer une dette symbolique à un chercheur dans lequel elle se reconnaissait et qui l'avait soutenue dès ses débuts, mais surtout parce qu'elle voyait, comme beaucoup d'autres, dans le travail de Bourdieu une contribution majeure au développement de la sociologie. Les contributions rassemblées dans cet ouvrage, agrémentées de l'oeuvre d'artistes qui se sont intéressés à Bourdieu, multiplient les perspectives sur son oeuvre : étude des conditions de production des enquêtes, des concepts et des modèles, développement des concepts-clés, construction d'un modèle cohérent de l'Etat, retour sur tel aspect de la domination masculine, explicitation de ce qu'implique un engagement politique réflexif, restitution de la vivacité de ses cours et de la cérémonie de remise de la médaille d'or du CNRS, exploration des rapports de Bourdieu avec l'oeuvre de Mauss, de Wittgenstein et de Marx, etc. Un premier ensemble d'articles montre dans quelles conditions Bourdieu réalise ses premiers travaux en Algérie où il est confronté aux effets du colonialisme, du racisme et de la guerre. La contribution d'Andrea Rapini retrace les déplacements de Bourdieu et de Sayad au cours de leur enquête sur Le Déracinement. Elle est complétée par un entretien de Tassadit Yacine avec Jacques Budin (un étudiant enquêteur de l'équipe de Bourdieu et de Sayad). Christian de Montlibert met en évidence un triple combat dans les travaux "algériens" de Bourdieu : contre la méconnaissance des cultures qui coexistent alors en Algérie, contre le mépris raciste et contre des conceptions politiques dont il pensait qu'elles risquaient d'obérer l'avenir. Dans le contexte des années 1980, Remi Lenoir s'interroge ensuite sur "le dit et l'écrit" dans l'oeuvre de Bourdieu : quel statut accorder aux transcriptions de ses cours et séminaires ? Comment restituer par écrit la vivacité verbale qui caractérisait Bourdieu enseignant ? A propos du discours qu'il prononce à l'occasion de la cérémonie de la remise de la médaille d'or du CNRS, Loïc Wacquant souligne l'accent qu'il met sur les tensions entre science, autorité et pouvoir, la puissance symbolique de l'Etat et les raisons qui conduisent le sociologue à s'engager dans le débat civique. Rémi Lenoir développe les différents niveaux impliqués dans le concept de capital social et montre l'importance qu'a eue pour Bourdieu l'oeuvre de Mauss. A propos du concept d'habitus Gaspard Fontbonne met en évidence les effets épistémologiques de la lecture de Wittgenstein. Quant à la domination masculine, Rose-Marie Lagrave éclaire les contradictions, paradoxes et malentendus engendrés par ce livre : il faut tenir compte, selon elle, du contexte scientifique et du rapport de Bourdieu aux recherches féministes. Un autre ensemble de travaux présente son modèle d'analyse de l'Etat et s'interroge sur l'engagement politique de Bourdieu. Patrick Champagne analyse le cheminement de Bourdieu pour penser la construction de l'Etat au fil d'un double processus de concentration des différentes espèces de capital dans un petit nombre de mains. En grande partie par le système scolaire, l'Etat unifie, homogénéise, standardise les manières de faire et de penser. A propos d'une intervention de Bourdieu sur la crise de l'Etat, Rémi Lenoir souligne l'importance qu'il attribuait aux transformations des représentations des agents dominants. Lucien Braun, alors directeur des Presses Universitaires de Strasbourg, questionne Bourdieu sur l'avenir de l'autonomie universitaire dans un contexte où l'édition universitaire est de plus en plus dépendante de groupes financiers. Cet ouvrage se clôture par des analyses de la dimension critique de la sociologie de Pierre Bourdieu qui n'a pas cessé d'insister sur la nécessité d'une démarche réflexive. Après avoir rappelé les prises de position "messianiques" de Marx sur l'avènement d'une société sans classes, Gérard Mauger souligne l'importance accordée par Bourdieu au "travail de représentation" dans toutes mobilisations collectives, à commencer par celle du "peuple" , objet de prédilection pour des intellectuels. Après avoir rappelé les confusions autour de l'appellation "sociologie critique" , Louis Pinto montre qu'elle n'est ni un accessoire, ni un abus de pouvoir, mais une sorte de nécessité qui conduit à s'interroger premièrement sur les pouvoirs, les limites et les prétentions de la connaissance, deuxièmement sur les capacités à dire le vrai des connaissances "indigènes" , troisièmement sur les effets de dévoilement de l'ordre social. Enfin ce livre est ponctué par le travail de deux artistes, Joëlle Labiche et Yves Carreau, qui offrent leurs interprétations des "regards" de Pierre Bourdieu : de ceux de prédécesseurs, de contemporains et de membres de ses équipes de travail.

10/2022

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Théâtre - Pièces

Théâtre 2002-2017. Tome 2

Ce volume fait suite à Théâtre 1987-2001 et reprend huit pièces de Pascal Rambert déjà publiées entre 2005 et 2017. Mon fantôme (cantate), Toute la vie, L'Art du théâtre, Répétition, Lac, Libido sciendi, Argument,. Mon fantôme (cantate) (2005) Où est la nuit ? qui m'aimera ? et la girafe ? et le grand cerf ? et les abeilles ? et l'ours et les colonies de choses volantes et rampantes ? et le ciel ? et l'étendue ? qui peindra l'étendue ? Pour s'endormir, un enfant s'invente un personnage imaginaire avec lequel il discute. Il l'appelle Mon Fantôme. Commande de France Culture, ce texte est à destination des enfants. Toute la vie (2007) Tu m'aimes je t'aime on s'aime on est qui quand on s'aime on est qui ? on est où quand on s'aime ? on est où ? on est qui ? on est devenu qui ? Ah ! parcourt le monde. Ah ! parcourt des formes artistiques. La question : "Qu'est-ce qu'être soi-même ? " rythme son voyage. Une seule réponse : "J'avance" . Pièce d'anticipation, Toute la vie est une fresque à jouer, danser et chanter dans le futur. L'Art du théâtre (2007) L'Art du théâtre est construite en parallèle de Toute la vie. Dans cette pièce, présentée tel un manifeste par Pascal Rambert, un acteur raconte l'art du théâtre à son chien cocker. Les deux textes peuvent être indépendants ou se monter ensemble, le premier étant comme un petit Dogma du second. Répétition (2014) Je suis issu du rêve de Denis qui lui-même est issu du rêve d'Emmanuelle qui elle-même est issue du rêve d'Audrey. Nous sommes chacun des habitants du rêve de l'autre nous croyons vivre dans le monde réel mais nous vivons notre vie nous la passons dans le rêve des autres Dans l'intimité d'une répétition de théâtre, quatre acteurs s'observent. L'un après l'autre, ils prennent la parole et enflamment une mèche dévastatrice qui ne s'éteindra qu'après que les mots aient accompli la tache précise qui leur était assignée. Lac (2015) Je pensais que je ne pouvais imaginer beaucoup on m'avait toujours dit ne rêve pas on m'avait toujours dit l'imagination c'est bien beau on m'avait toujours dit ce genre d'idioties or j'ai décidé de monter sur le théâtre pour combattre cela et ça me paraît aussi important en tout cas pas moindre que de s'engager sur des terrains de conflits réels dont la mort est la sanction Pascal Rambert a écrit cette pièce pour les étudiants comédiens de la Manufacture (Bachelor Théâtre, 2012-2015), après les avoir rencontrés. "Une histoire de langue mettant en ligne seize corps moins un face à la mort, au sexe et au crime" (PR). Libido sciendi (2015) Ils montent l'escalier ils s'arre^tent ils regardent le lustre Giacometti ils respirent elle enle`ve son tee-shirt il enle`ve le sien elle de ? boutonne son pantalon les pantalons tombent ils respirent je vois la rampe en fer forge ? dix-septie`me ils se regardent ils sont nus dans le grand escalier elle monte quelques marches elle respire il la regarde elle e ? tire ses bras elle respire ils regardent le lustre Giacometti Libido sciendi est une pie`ce de danse créée au festival Montpellier Danse en 2008, dans une mise en scène de l'auteur, réactualisée en 2014 au Musée Picasso à Paris. Argument (2015) Cessez voulez-vous Annabelle ce chant funèbre l'air est lugubre le ciel bas la nuit épaisse j'ai peur si je ferme les yeux j'entends j'entends si je me concentre bien fermez les yeux écoutez écoutez entendez-vous ces coups de canons ces tirs secs des fusils l'air comme un gaz porteur met dans nos oreilles les sons de Paris écoutez écoutez on s'y bat les murailles cèdent les corps tombent on dresse la barricade ça claque l'artillerie sera sortie elle aura anéanti vos amis aux grandes idées Argument renvoie à l'histoire de la Commune, au travers d'une scène tragique et magique où les convictions conservatrices s'opposent aux forces révolutionnaires, sur fond imaginaire de toile de Jouy. Une vie (2017) Pourquoi on va au théâtre ? Pour dévorer du visage. C'est des cibles mouvantes les acteurs. On les regarde. On les suit comme ça. Ces déplacements. C'est fantastique. On voudrait pouvoir les descendre comme des cols-verts en plein vol. Pan. Pan. Leur prendre leur jolie petite gueule et les fixer. C'est ça que je fais. Je fixe. Je fixe pour les autres. Pour que les autres voient. La porosité entre l'art et la vie, entre la vie et la mort, est au centre de cette pièce qui se déroule dans un studio de radio, le temps d'une émission monographique sur un artiste. Création par La Comédie-Française dans une mise en scène de l'auteur.

11/2023

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Poésie

Narcisse. Précédé du Dialogue du Prince et de la Chimère

Entre lyrisme, mysticisme et symbolisme : le "Narcisse" de Joachim GASQUET (1873-1921). Profondément philhellénistes ou cultivés, enclins aux questionnements de leurs époques, à la place que l'homme revêt sur terre ou encore habités par une étrange spiritualité, quelques grands artistes et écrivains ont revisité le cas Narcisse, mi-homme, mi-fou, mortel et divin, amoureux d'une image... Joachim Gasquet va lui aussi se pencher sur ce miroir, ce symbole : "ce mince monde" tel qu'il évoque à la fois la porte de la connaissance et le seuil d'un ailleurs, se focaliser sur l'hypothèse d'une Unité telle qu'elle n'existe qu'en nous ou plutôt dans l'instant suspendu de la révélation. Motivé par une lutte intérieure cherchant à réconcilier la réflexion et l'action et par celle extérieure offrant une controverse au symbolisme de salons, sa critique dérive en un chant gorgé de symboles innés, une cascade remplie d'échos, un hymne naturel et grandiose offert à la polyphonie des Idées. L'onde limpide renvoie l'image du corps mais aussi du microcosme intérieur en parfaite harmonie avec la nature, réfléchit le macrocosme et suggère la perfection qui les relie ; mais cette ressemblance (cet "à l'image du Tout") est fugace, insaisissable, l'effleurer suffit à la brouiller. Qu'en est-il alors de la vie, de la durée et de ce à quoi Narcisse aspire ? L'intérêt que l'auteur porte très tôt, aux Maladies de l'Imagination et sa découverte des cahiers verts d'un jeune aixois interné, vont donner légitimité à son lyrisme, lui permettre d'abuser des comparaisons, autoriser l'ambiguïté et provoquer la métaphore. Le langage devient passage, l'esprit de l'homme un verre transparent à mi-chemin entre la nature et le divin, et le "comme" s'efface au profit d'un déplacement, d'un monde vers un autre monde. L'imagination est en liberté, elle plonge, elle saute, elle défie le temps, elle enjambe les espaces brimés et confie ses résonances mystérieuses susceptibles d'interprétations multiples, elle métamorphose les préjugés. Est-il donc folie de se complaire en l'Amour puisqu'il est impossible ; folie de se réfugier en la Beauté perçue qu'on ne peut embrasser ; folie de s'acharner à maintenir la grâce en la Nature humaine ; folie de tenter une fusion entre panthéisme et monothéisme ; folie de recevoir autant d'informations simultanées, précises qu'on ne peut que parcimonieusement traduire ; folie de désirer le bonheur comme on rêve d'une femme, de le chercher à toutes les sources d'où pourra sourdre l'âme, la dulcinée, la quête... ? Joachim Gasquet appartient à ce Grand XXe siècle ébranlé politiquement et socialement, qui sort des guerres napoléoniennes, accumule les changements de régimes et se reconnaît dans un réalisme inspiré par les découvertes scientifiques ; il s'agit de peindre la société telle qu'elle est, entre cupidité et misère sociale, hérédité et modernité...Tout un programme contre lequel les poètes vont s'insurger... Entre 1891 et 1906, divers courants tentent de prononcer la mort du symbolisme et notamment celui que Mallarmé incarnait. L'Ecole romane, l'Ecole française, l'humanisme, le Naturisme, les Toulousains... tous participent finalement à l'essor d'une nouvelle vision, à cette unité possible entre l'homme et le monde, à cette harmonie musicale réconciliant le passé et l'avenir, la vérité et la beauté, les idéaux et leurs formes, le symbole et la vie. Le langage innove en rapprochant l'Antiquité, la nature, l'ésotérisme et les mystères, les légendes et les mythes, les sensations humaines et leurs correspondances qui deviennent synesthésie ! Quant au poète, il se fait mage ou chaman toujours investi de sa haute fonction visionnaire mais au service des Idées primordiales et du questionnement métaphysique (l'existence, l'essence, l'âme, l'origine et la fin...), il suggère et propose une énigme, il évoque les analogies infinies qui se tissent cachées entre le monde sensible et le Sens (entendu comme vérité ineffable -réalité de l'insensé), il dévoile alors une nouvelle langue ! Le romantisme allemand, avec Goethe ou le mysticisme de Novalis inspire ce possible contre-pied qui va justifier et conforter l'émergence du symbolisme de la fin du XIXe. Ce sera Maeterlinck et non Gide qui délivrera une traduction de Friedrich von Hardenberg (1772-1801) et qui inspirera le surréalisme. Tous se lisent et se côtoient, les salons vont bon train, la poésie classique est morte et le langage de la folie revendique le droit d'être plus "vrai" que le réalisme, d'être au plus juste s'il devient intuitif et ancré dans l'archaïque, le primitif, le légendaire, le mythologique, le passé, le rêve... Les "Narcisse" de Paul Valéry et Joachim Gasquet émanent de ce contexte, décliné en variations de 1891 à 1941 pour l'un, écrit et retouché de 1893 à 1921 pour l'autre. Tous deux symbolistes et disciples de Mallarmé, pétris par des Maîtres proches (André Gide ou Paul Cézanne), ou d'entourage (Edouard Manet et Frédéric Mistral), leurs destins de provinciaux se séparent pourtant dès 1894. Tandis que Valéry monte à Paris, délaisse la poésie et reste donc à l'écart des querelles (jusqu'à la parution de "La jeune Parque" en 1917), Gasquet lui, participe aux tentatives littéraires disparates de l'époque. Directement mêlé aux ascensions de groupes et aux dissensions, impliqué dans la direction de Revues, son syncrétisme poétique, philosophique et religieux ne sera pas compris qui englobe toutes ses lectures et toutes ses amitiés. Puis vient l'heure de la guerre également et Joachim lui seul, part et reviendra blessé, hors NRF, transformé encore et dédaigné ; maudit ? laissant à sa mort les fragments retouchés d'un Narcisse somptueux, pétales rassemblés et publiés à titre posthume par Edmond Jaloux en 1931. Le symbolisme réclame un "je" chercheur qui tente d'évoquer l'indicible, l'invisible, le voilé, l'étrangeté, l'indéfini et l'infini... il crée des ponts, rapproche des termes qui appellent des associations inédites, provoquent des connexions et convoquent l'irréalisé ! C'est ce que le poète et critique d'art aixois (ami de Paul Cézanne) nous propose en effet dans cette oeuvre lyrique délibérément rédigée en prose. Alors ce symbolisme tient au coeur plus qu'aux recettes de quelconques gloires, il est à NOUS TOUS, et s'éveille à la lecture d'oeuvres mystérieuses tel que le Narcisse de Joachim GASQUET, fussent-elles oubliées ou reconnues, anciennes ou à venir... Clarisse FRONTIN Publication web Apologie du poète Printemps des poètes 2016

12/2014

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Critique littéraire

Revue de littérature comparée N° 354, 2/2015 : Les Littératures du Nord de l'Europe

Sylvain BRIENS, La mondialisation du théâtre nordique à la fin du XIXe siècle. Le fonds Prozor de la Bibliothèque nordique de Paris lu au prisme de la sociologie de l'acteur-réseau, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 137-150. Le fonds Prozor de la bibliothèque nordique de Paris témoigne de la percée du théâtre scandinave en France et en Europe à la fin du XIXe siècle. Par l'analyse du travail du traducteur Prozor, des porte-paroles et intermédiaires agissant comme médiateurs, des points de passage, cet article examine les mécanismes de diffusion internationale du théâtre nordique, il s'articule autour de trois acteursréseaux : Prozor dans sa fonction complexe d'agent littéraire ; Paris et ses chaines de traduction ; le réseau de théâtres libres dans sa fonction de diffusion mondiale du théâtre nordique. Thomas MOHNIKE, "Le Dieu Thor, la plus barbare d'entre les barbares divinités de la Vieille Germanie" . Quelques observations pour une théorie des formes narratives du savoir social en circulation culturelle, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 151-164. En 1915, l'imprimerie d'Epinal, connue pour ses estampes amusantes, publia un résumé symbolique des événements de la première année de la Première Guerre mondiale. Sur cette gravure, le dieu norrois Thor est présenté comme le dieu du Kaiser allemand, détruisant des cathédrales gothiques et ainsi la civilisation. Thor symbolisait ainsi la nature prétendument barbare des Allemands. Cet article se propose de cartographier les chemins et opérations historiques qui conduisirent le dieu nordique Thor de l'Islande du XIIIe siècle en France du XXe siècle en le transformant en symbole de l'hostilité allemande. Des contextes importants sont l'Anneau de Nibelung de Richard Wagner et tout particulièrement la philologie comparée. Ces observations peuvent servir de point de départ pour une théorie des formes narratives du savoir social en circulation culturelle. Régis BOYER, Méditation sur Rosmersholm, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 165-173. De l'avis de tous les connaisseurs, Rosmersholm (1886) est le chef-d'oeuvre d'Ibsen, même si ce n'est ni la plus connue ni la plus fréquemment jouée de ses pièces. On peut se demander pourquoi. Cette pièce, extrêmement difficile à jouer, est favorable à toutes les confusions ou erreurs d'interprétation possibles, pièce dont il est permis d'avancer qu'Ibsen n'est jamais allé aussi loin dans sa quête du tragique. Cet article cherche à élucider les modalités et les raisons d'un tel chef-d'oeuvre dans une perspective moderniste. Sans entrer dans la discussion sur le post-tragique, il s'agit de cerner ce qui fait en soi l'originalité moderne de cette étrange pièce. Corinne FRANCOIS-DENEVE, Anne Charlotte Leffler, dans l'ombre portée de Strindberg, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 175-186. "Auteure" prolifique du "genombrott" suédois, "féministe" affichée, dont les pièces étaient davantage populaires que celles d'August Strindberg, Anne Charlotte Leffler a peu à peu disparu des anthologies de la littérature scandinave. En a-t-elle été chassée par des critiques phallocrates, comme ont pu le clamer les partisans des gender studies dans les années 1970 ? Son oeuvre était-elle trop datée ? La redécouverte récente de son théâtre, en Suède, puis en France, permet de recontextualiser cette "oubliée" qui a sans doute toujours des choses à dire. Harri VEIVO, Cosmopolite en crise. Décentrements de modernité et fractures de subjectivité dans les récits de voyage d'Olavi Paavolainen, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 187-203. Dans les années 20 et 30, l'écrivain finlandais Olavi Paavolainen (1903-1964) s'est donné la tâche d'interroger et analyser la modernité dans toutes ses manifestations et dans tous les lieux où elle se fait ressentir. Ce projet l'amène à s'intéresser d'abord à la modernité jouissive et émancipatrice des années folles, ensuite à la montée du totalitarisme en Europe et, après ce tournant dysphorique, aux pays de l'Amérique latine, jugés capables de transcender les conflits européens. Les récits de voyage de Paavolainen produisent ainsi un décentrement de la modernité ; en même temps, ils expriment la crise de la subjectivité de l'auteur, fondée sur l'idéal européen du cosmopolitisme. Philippe CHARDIN, Un beau roman d'éducation estonien : Vérité et Justice d'Anton Tammsaare, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 205-217. Le long chef-d'oeuvre de Tammsaare, écrit durant l'après-guerre et retraçant 50 ans d'histoire de l'Estonie, apparaît comme une synthèse extraordinairement originale de plusieurs genres européens différents parmi lesquels un roman rural dans sa première partie et un roman du Crime et du Châtiment, sorte de tragédie familiale du péché originel ; mais on remarque aussi de fortes analogies avec trois formes de romans d'éducation : un roman pédagogique tragi-comique à l'Ecole de M. Maurus, le roman d'une éducation sentimentale douloureuse et par-dessus tout un roman de la transformation d'un jeune homme qui vient de son village en intellectuel avec son ironie dévastatrice contre toutes les valeurs sociales et religieuses, sa "conscience malheureuse" et ses engagements à demi forcés dans la vie politique ou dans sa vie privée qui rappellent d'autres grands romans contemporains, de Musil, de Proust, de Thomas Mann et de Svevo. Frédérique TOUDOIRE-SURLAPIERRE, Phèdre et la Suède : un "décentrement de modèles" ?, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 219-230. Cet article examine, à partir de la pièce de l'écrivain suédois, Per Olov Enquist, Till Fedra, les modalités et les enjeux de ce transfert culturel que constitue cette réécriture de la célèbre tragédie de Racine. Utilisant les ressources scientifiques de l'imagologie et de l'ethnocritique, cet article met en évidence les différentes opérations de ce que nous avons appelé un "décentrement de modèles" , par le biais de la déconstruction de la langue française, de l'oedipianisation du mythe, un transfert d'images et un déplacement de concepts. Mickaëlle CEDERGREN et Ylva LINDBERG, Vers un renouvellement du canon de la littérature francophone. Les enjeux de l'enseignement universitaire en Suède, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 231-243. Même si la circulation de la littérature francophone est aujourd'hui en pleine expansion à travers le monde, sa diffusion et, par conséquent, sa place dans les circuits de canonisation, reste encore inégale. Cet article analyse la place octroyée aux lettres francophones dans l'enseignement universitaire du français langue étrangère en Suède. Proposant une réflexion sur le canon littéraire traditionnel et montrant la nécessité de reconsidérer sa valeur dans un contexte universitaire étranger, la Suède apparaît tantôt comme le pays promoteur de la haute-culture française tantôt comme le bastion des littératures francophones souvent contemporaines et/ou de la littérature couronnée de prix littéraires. Sylvain BRIENS, The globalization of Nordic Theatre. The Prozor collection at the Nordic library in Paris read through the Actor-network Theory, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 137-150. The Prozor collection at the Nordic library in Paris demonstrates the breakthrough of Scandinavian theatre in France and Europe at the end of the 19th Century. Through an analysis of Prozor's translations, the work of spokespeople and intermediaries acting as mediators, and points of passage this article will attempt to understand the mechanisms promoting Nordic theatre's international distribution. The study is centred on three actor-networks : Prozor in his complex function as literary agent ; Paris and its translation supply chains ; the network of free theatres in its role in the worldwide distribution of Nordic theatre. Thomas MOHNIKE, "The god Thor, the most barbarous of all barbarous gods of the Old Germany". Some observations for a theory of narrating forms of social knowledge in cultural circulation, RLC LXXXIX (in French), no. 2, apriljune 2015, p. 151-164. In 1915, the Epinal printing company, known for its often amusing illustrated one page prints, published a summary of the first year of the First World War, depicting the Old Norse God Thor as the god of the German Kaiser, destroying gothic cathedrals and thus civilization. Thor thus served as symbol for the supposedly barbarous nature of the Germans. In my article, I try to map some of the ways and historical operations that took the Old Norse god Thor from 13th century Iceland to 20th century France and transformed him to a symbol for German warfare. Major contexts appear to be Richard Wagner's Ring of the Nibelung and particularly comparative philology. These observations, I propose, could serve as a starting point for a theory of narrating forms of social knowledge in cultural circulation. Régis BOYER, Meditation on Rosmerholm, RLC LXXXIX (in French), no. 2, apriljune 2015, p. 165-173. In the opinion of all the experts, Rosmersholm (1886) is the masterpiece of Ibsen, even though it is neither the most famous nor the most frequently performed of his plays. One may wonder why. This piece, extremely difficult to play, supports all the confusions and errors of interpretation possible, and it is permitted to put forward that Ibsen never went as far in his tragedy quest. This article seeks to clarify how and why such a masterpiece in a modernist perspective. Without going into the discussion of the post-tragic, we try to identify what is in itself modern originality of this strange room. Corinne FRANCOIS-DENEVE, Anne Charlotte Leffler, the forgotten one, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 175-186. A prolific female writer belonging to the Swedish "genombrott" movement and a staunch feminist, Anne Charlotte Leffler, whose plays were even more successful than Strindberg's, slowly disappeared from Scandinavian literature anthologies. Did male critics expel her from them, as researchers in "gender studies" began to claim in the 1970s ? Or was it that her works were thought to be too old-fashioned ? Her theatre has been recently re-discovered, in Sweden as well as in France : it is high time to put again into perspective this "forgotten one" , who has still many things to say. Harri VEIVO, Cosmopolite in Crisis. Decentring Modernity and Fracturing Subjectivity in Olavi Paavolainen's Travelogues, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 187-203. In the 1920s and 30s, the Finnish writer Olavi Paavolainen (1903-1964) took up the task of exploring and analysing modernity in all its manifestations and in all the places where it was felt. This project focalised first on the emancipatory and joyful modernity of the années folles, then on the rising of totalitarism in Europe and, after this dysphoric turn, on Latin America, considered capable of transcending the European conflicts. Paavolainen's travelogues produce thus a decentring of modernity, while leading at the same to the crisis of the author's subjectivity, based on the European ideal of cosmopolitism. Philippe CHARDIN, Truth and Justice, a beautiful Estonian novel of education, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 205-217. Tammsaare's long masterpiece, written after the first world war and retracing 50 years of Estonian history, is an extraordinary and original synthesis of several different literary European genres among which in its first part a "Rural Novel" and also a novel of "Crime and Punishment", a kind of Tragedy of Original Sin in a family but there is also a strong analogy between Taamsaare's Justice and Truth and three kinds of Educational Novels : a tragi-comical pedagogical novel in Mr Maurus's College, a painful sentimental apprenticeship and above all the novel of a young man coming from his village who becomes an "Intellectual" with his devastating irony against all social and religious values, his "Unhappy Consciousness" and his half forced bad commitments in political or private life which recall other great contemporary novels by Musil, Proust, Thomas Mann, Svevo. Frédérique TOUDOIRE-SURLAPIERRE, Phaedra and Sweden : a "shift model" ?, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 219-230. This paper examines, from the part of the Swedish writer Per Olov Enquist, Till Fedra, terms and issues of this cultural transfer : the rewriting of the famous tragedy of Racine. Using scientific resources of imagology and ethnocritic, this paper shows the various operations of what we called a "shift model" through the deconstruction of the French language, the oedipalization of the myth, the image transfer and the movement concepts. Mickaëlle CEDERGREN - Ylva LINDBERG, Towards a renewal of the Francophone literary canon. The role of higher education in Sweden, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 231-243. Even though francophone literature is expanding its territory throughout the world, its status remains ambiguous on the global field and in canonization processes. The analysis is focusing on a re-evaluation of the literary canon in the academic context abroad. Various didactic demands are revealed as essential criteria for a selection divergent from the traditional canon. It is also found that Swedish universities promote both French high-status literature, extra-occidental francophone literature and prize-winning literature, which is often commercial.

09/2015