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Genre
Littérature étrangère
Il y avait une vieille à Jérusalem. Une magnifique vieille comme vous n’en avez pas vu de toute votre vie. Elle était vertueuse et elle était sage, elle était gracieuse, et modeste aussi. Ses yeux n’étaient que bonté et compassion, et les rides de son visage, toutes de bénédiction et de paix. N’eût été que les femmes ne peuvent ressembler à des anges, je la comparerais à un ange divin. Et il y avait encore cela en elle qu’elle était vive comme une jeune fille. N’eût été les vêtements qu’elle portait, on n’aurait guère perçu en elle la moindre marque de vieillesse.
Tant que je ne fus pas sorti de Jérusalem, je ne la connaissais pas, lorsque je revins à Jérusalem, je la connus. Et comment se fait-il que je ne la connaissais pas auparavant ? Comment se fait-il que vous ne la connaissiez pas ? Pour cette raison que le destin décide qui chaque homme doit connaître, quand il doit le faire et dans quelles circonstances. Dans quelles circonstances la rencontrai-je ? Un jour je me rendais chez un des sages de Jérusalem qui habitait près du Mur occidental et je ne trouvais pas sa maison. Je vis une femme qui marchait avec un bidon d’eau et je lui demandai son aide. Elle me dit : « Viens, je vais te montrer. » Je lui dis : « Ne vous donnez pas cette peine. Indiquez-moi le chemin et j’irai tout seul. » Elle sourit et me dit : « Cela te dérange-t-il qu’une vieille femme obtienne le privilège d’accomplir une mitsvah(1)1 ? » Je lui dis : « S’il s’agit d’une mitsvah, accomplissez-la, mais donnez-moi le bidon que vous portez. » Elle sourit et dit : « Tu veux donc amoindrir la valeur de ma mitsvah ? » Je lui dis : « Je ne cherche pas à amoindrir la valeur de votre bonne action, mais bien plutôt à alléger votre charge. » Elle dit : « Ce n’est pas une charge, c’est un privilège, car le Saint, béni soit-Il, a donné à Ses créatures la force de porter à la main ce dont ils ont besoin pour leur subsistance. »
Nous bondissions entre les pavés de la rue et glissions d’une ruelle à l’autre ; nous évitions les chameaux, les ânes, les porteurs d’eau, les flâneurs et les fouineurs. Jusqu’au moment où mon accompagnatrice s’arrêta et dit : « Voilà la maison de celui que tu cherches. » Je pris congé d’elle et j’entrai.
Je trouvai l’homme chez lui, assis à sa table. Je ne sais s’il me reconnut ou pas. À ce moment précis, une illumination concernant les textes sacrés lui éclaira l’esprit et il s’empressa de m’en faire part. Cette idée en amena une autre et ainsi de suite. En partant, je voulus lui demander qui était cette vieille femme qui m’avait guidé, dont le visage resplendissait de paix et la voix agréable répandait la joie. Mais peut-on interrompre un sage à l’heure où il révèle ses inspirations ?
Quelques jours plus tard je retournai en ville pour une certaine vieille, veuve d’un rabbin, dont j’avais promis au petit-fils, avant de remonter à Jérusalem, que j’irais prendre de ses nouvelles.
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