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Sciences historiques
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Le café est aujourd’hui un des produits qui font la fortune ou l’infortune des pays tropicaux, à côté du thé, du sucre, du cacao. Cultivé dans de grandes exploitations il amène les producteurs à négliger les cultures de subsistance et lorsque la récession arrive, l’ouvrier agricole ne peut plus acheter sa nourriture, les prix montent tandis que son salaire baisse. Cependant, contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’élasticité-prix et l’élasticité-revenu du café sont faibles. Autrement dit l’augmentation du prix du produit ou celle du revenu du consommateur ou leur diminution ne font guère varier les quantités consommées. Cette boisson qui n’est pas indispensable à la vie, est devenue, du fait des mœurs, une sorte de nécessité quotidienne. C’est d’ailleurs la boisson la moins chère qu’on puisse trouver à absorber dans un bar ou une brasserie. Elle apparaît dans certains pays — à commencer par la France —, comme plus nécessaire que le thé ou le cacao. Par contre, elle est moins utile que le sucre à une alimentation équilibrée.
Plus encore que le sucre et autant que le thé ou le chocolat, le café est destiné à flatter le goût des hommes et à changer celui des aliments. On le mélange à l’eau, parfois au lait. Si on veut augmenter sa consommation il faut la faire triompher dans des pays qui ne la connaissent guère — la Chine par exemple ou l’Europe de l’Est qui en a été privée. C’est aussi un stimulant et, sur ce point, il gagne contre l’alcool dont on redoute le pouvoir inhibiteur et les effets cancérigènes. Mais il a connu la concurrence de boissons nouvelles comme le coca-cola. Il n’est pas à l’abri des modes. Dans l’ensemble la consommation varie peu et après avoir progressé lentement elle tend à se stabiliser aujourd’hui. En revanche la production tend à croître plus vite. L’entrée en masse de l’Afrique et plus récemment du Vietnam dans le camp des pays caféiers, la volonté du Brésil de ne pas réduire le contingent alloué par les accords intermédiaires, (jusqu’à ce que les conditions climatiques en 1994 n’entraînent une baisse de la production de 50 %), ont fait descendre le prix du café à une vitesse vertigineuse jusqu’en 1992, véritable catastrophe pour l’Angola ou la Côte d’Ivoire, qui vivaient en grande partie de cette ressource. Un accord de 1995 visant à stabiliser les cours a donné des résultats significatifs permettant d’espérer une situation meilleure pour les pays producteurs.
L’étude d’un grand produit relève de ce que certains ont appelé la méso-économie ou économie de secteur et, quand on s’arrête au niveau de l’entreprise, de la micro-économie. Nous avons adopté ces points de vue mais nous avons voulu aussi brosser une véritable histoire géographique de la production caféière, sans négliger pour autant l’anthropologie du café, le café dans les mœurs et la consommation — du Procope au café concert. Le résultat est un livre sans doute plus enrichissant pour la connaissance d’un aspect important de l’économie mondiale et des rapports entre le Tiers-monde et les deux autres.
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