Des Français amoureux, épris de leur patrimoine, la vision est celle de Stéphane Bern. Invité dans l’émission C’est à vous, sur France 5, le Monsieur du Loto déplore ainsi l’annulation des Journées européennes, prévues les 19 et 20 septembre. Mais pose aussi dos à dos l’ancien et le moderne…

Avec 14 millions de sites fermés au public, l’alternative de visites virtuelles pour préserver l’événement devient l’option privilégiée. Encore faut-il chercher des parades, ou le vouloir, souligne Stéphane Bern. « Je n’accuse personne, cette maladie nous touche tous. […] Les préfectures donnent des indications » qui permettent de malgré tout préserver une offre.
Et si l’on respecte les règles, tout se passera bien.
Le passage dans l’émission donne également l’opportunité d’attirer l’attention sur les petites mains, celles du spectacle vivant, ou les guides conférenciers, privés de travail. « Parce que derrière les pierres, il y a des artisans, qui n’ont pas accès au chômage partiel. Ils ont besoin des chantiers du patrimoine : ils en vivent, mais peuvent en mourir. »
Sauver les emplois du patrimoine
Son Loto du Patrimoine aura rapporté 90 millions € en deux ans, et permis de sauver quelque 180 monuments. Dans le même temps, Roselyne Bachelot a annoncé quelque 600 millions — pour les monuments classés et protégés. « Je fais le job pour tous les autres », poursuit celui qui officie désormais sur Europe 1.
Et de souligner d’ailleurs que la ministre dispose de « l’assise médiatique, quand on a besoin d’arbitrages avec Bercy ».
Reste que l’on vit « un moment douloureux pour la culture », et paradoxal. « Nous sommes tous dans des trains et des avions bondés, avec un masque », note-t-il. Mais pourquoi empêcher plus de spectateurs dans les salles de théâtre ? La France aura tendance à « imposer des règles strictes et définitives », qui ne « sont pas respectées parce que pas comprises ».
Même le président Emmanuel Macron sera sollicité pour le Loto. Et « s’il gagne, il ne peut pas garder l’argent. J’exigerai qu’il le rende au patrimoine ».

Défense et illustration des “vieilles pierres”
La réaction est mesurée, mais l’agacement palpable : Bern rectifie, « durant des années, on n’a rien fait. 9 % du patrimoine est en péril grave ». C’est donc « la première fois » que l’on agit, en sauvant des traces du passé, y compris des maisons d’écrivains — comme celle de Colette — « un passé très récent, un patrimoine contemporain ».
Et de rappeler que sous ce nom de patrimoine, on parle aussi d’identité, « de convivialité dans les villages, des régions entières dans les territoires ruraux qui en vivent ». Et puis des femmes et des hommes, soit 35.000 emplois et des dizaines de milliers impactés.
Quant à parler de vieilles pierres, « non. C’est de la culture gratuite à portée de main. Ça me déchire le cœur de voir dans certains villages ruraux des églises qui tombent en ruine », reprend-il. « Alors… qu’est-ce qu’on va faire ? Une médiathèque où il n’y a personne ? » Avant de conclure : « On marche sur la tête, parfois. »
ActuaLitté a tenté de joindre l’Association des Bibliothécaires de France pour une réaction.
La chose aurait pu s’arrêter là, et sentir le vilain dérapage. Mais Bern en rajoute une couche : « Vous êtes allé à la Bibliothèque François Mitterrand », interpelle-t-il, en s’adressant aux présentateurs de l’émission ? Et reprenant les propos de l’animatrice : « Oui, pour faire du roller à l’extérieur avec les enfants. Or, le patrimoine se partage avec les enfants, avec tout le monde. »
Rires de connivence, ou de dépit... on ne saura jamais.
mise à jour 18h50 :
L'intéressé s'est retrouvé au coeur d'une avalanche de messages, de soutien ou de critiques : « Je crains d’avoir été mal compris... d’autant que j’ai créé moi-même une bibliothèque médiathèque ! Sans doute n’ai-je pas été assez clair ou trop provocateur, mais il n’y avait aucun mépris pour les livres et les bibliothèques... bien au contraire », indique-t-il à ActuaLitté. Et répondant aux interrogations, il ajoute :
Vous avez raison il faut réconcilier les Français avec la culture et non les diviser. Je garde une reconnaissance éternelle à ma bibliothèque municipale de m’avoir permis dans mon enfance de dévorer les livres... et de faire ensuite des études. Merci pour votre compréhension
— Stéphane Bern (@bernstephane) September 17, 2020