Depuis l’affaire Nyssen, première ministre de la Culture considérée en conflit d’intérêts et qui se fait déposséder des sujets liés au livre, politique et édition s’appréhendent avec minutie. Pourtant, l’adjoint au maire de Strasbourg vient de décider d’ouvrir La tâche noire, librairie dédiée au mauvais genre, en septembre prochain…
Eric Schultz, via Facebook
C’est une autre approche politique, mais de la politique tout de même que revendique Éric Schutz. L’adjoint en charge de l’état civil a choisi de donner une place de choix aux littératures policières dans sa ville, et de s'en occuper personnellement. Avec une collection personnelle de 800 à 1000 titres, estime-t-il, l’idée le démangeait.
« Contrairement à la littérature jeunesse, aux bandes dessinées, aux mangas, il n’existait pas à Strasbourg de lieu dédié à la littérature noire. C’est un projet qui me trotte dans la tête depuis deux ans, suite à un séjour en Bretagne où j’ai vu ces nombreux cafés-librairies qui sont autant de lieux de rencontres et d’échanges », indique-t-il à Rue89 Strasbourg.
Lui-même se présente comme un passionné de littératures noires, et souhaitait faire les choses dans les règles. Café ou thé seront ainsi proposés, dans un local qui offrira 8 à 12 places assises.
Pour l’élu écologiste, cette librairie représente en réalité une extension de son engagement politique et citoyen. Mieux, « une continuation logique, puisque les romans policiers sont des vecteurs de critique sociale extrêmement puissants ».
Certes, l’activité de la librairie empiétera quelque peu sur ses activités au sein du conseil municipal, mais les prochaines échéances sont établies en 2020, et d’ici là, il aura accumulé 12 années de politique. « J’ai toujours pensé que la politique ne devait pas être un métier, les élus doivent pouvoir être issus de la société civile et y retourner, avoir une activité privée à côté de leur mandat, sinon ils sont hors-sol », pointe-t-il.
Et difficile de trouver une activité commerciale plus engageante et nécessitant plus d’investissement personnel que la librairie. Toute la force de son établissement résidera dans l’animation et l’accueil, plutôt que sur l’immédiateté de l’offre. « Au final, les livres que nous allons vendre reposeront sur des connaissances et des ressentis qu’aucun algorithme ne sera jamais en mesure de remplacer. »
Première recommandation ? Une poire pour la soif, de James Ross, traduit par Philippe Garnier (Folio Policier – 9782070410040 – 7,25 €), sorti en 1940, et que seul Raymond Chandler reconnut comme une pépite à sa publication. Dans l’Amérique des années 30, après la Grande Dépression, criblée de dettes, chacun cherche midi à sa porte…