Des ouvrages dépourvus de personnages de couleurs
Le 16/04/2019 à 16:50 par Camille Cado
Publié le :
16/04/2019 à 16:50
Les débats sur la diversité dans le secteur de l’édition se sont intensifiés ces dernières années et portent souvent sur le manque de représentation des auteurs et des éditeurs de couleur, mais aussi des personnages issus d’autres catégories ethniques. Une récente étude a révélé que ce problème de diversité touchait notamment le secteur de la littérature jeunesse, avec plus de 98 % d’auteurs blancs au Royaume-Uni.
Commandée par BookTrust, la plus grande association caritative de lecture pour enfants au Royaume-Uni, l’étude dévoile qu’à peine 2 % (1,96 % précisément) des ouvrages jeunesse publiés au Royaume-Uni entre 2007 et 2017 ont été écrits par des auteurs de couleur.
Jill Coleman, présidente de l’association, a déclaré que ce chiffre révélait « un manque criant de personnes de couleur dans l’industrie ». À l’échelle internationale, à peine 6 % (5,48 %) des auteurs et illustrateurs de livres pour enfants étaient issus des BAME (black, asian, and minority ethnic), un chiffre en chute libre depuis deux ans.
En effet, alors que le nombre d’auteurs de littérature jeunesse issus d’autres catégories ethniques avait connu une augmentation entre 2007 et 2015, passant de 3,99 % à 7,8 %, le chiffre est, depuis, en nette régression.
Le rapport révèle aussi que dans le secteur de la littérature jeunesse, les écrivains de couleur sont plus susceptibles de s’autopublier (1/3 des titres de ces auteurs sont autopubliés) que les auteurs blancs (seulement 10,74 %).De tristes constatations qui mettent en lumière une plus grande difficulté pour les auteurs de couleur à se faire éditer. « Au départ, beaucoup d’éditeurs me disaient “nous ne publions pas de poésie noire et rasta. Nous ne savons pas quoi en faire” » confie l’écrivain Benjamin Zephaniah.
Le rapport fait écho à une précédente étude, publiée en juillet dernier, qui avait révélé que seulement 1 % des livres pour enfants avaient un personnage principal de couleur.
Les livres jouent en effet un rôle important en tant que miroirs pour les enfants : avec des personnages qui leur ressemblent, cela affecte l’estime qu’ils ont de soi, mais aussi leur motivation à lire et leurs aspirations à devenir des auteurs et des illustrateurs du futur.
« Il n’y a pas de noirs ou de personnages issus d’autres catégories ethniques dans les livres pour enfants, alors ceux qui ne sont pas blancs grandissent rarement en imaginant pouvoir en fabriquer, alors ils n’en écrivent pas. C’est un cercle vicieux » souligne l’illustrateur John Aggs.
Ou alors faire l’effet inverse, comme pour Malorie Blackman, auteure de la saga Entre chiens et loups (traduit par Amélie Sarn chez Milan) : « J’ai attendu si longtemps pour me voir représenter dans les livres que je lisais. Cela a été l’une des principales raisons et motivations pour lesquelles je suis devenu auteur ».
« Il est important que tous les enfants, de toutes les ethnies, comprennent qu’ils peuvent faire ce métier. Ce n’est pas seulement réservé aux femmes blanches et chic, ou aux vieux blancs barbus », affirme Nadia Shireen, auteure et illustratrice britannique.
BookTrust Represents : contre l’impérialisme blanc dans les livres
À l’occasion du rapport, BookTrust a annoncé son nouveau projet : BookTrust Represents. Il s’agit d’une initiative sur trois ans, qui subventionnera les auteurs et les illustrateurs de couleur afin de promouvoir leur travail par le biais d’événements organisés dans des librairies, des festivals, ou des écoles.
En collaboration avec Speaking Volumes et Pop Up Projects, l’association a créé une brochure qui présente plus de 100 écrivains et illustrateurs britanniques contemporains de couleur à destination des écoles du pays.
« Les enfants ont besoin et méritent de se voir représenter dans les livres qu’ils lisent et d’avoir accès à un éventail de choix riche et varié. Cela pourrait changer leur vie » a souligné Jill Coleman. Le rapport complet est disponible à cette adresse.
Via The Guardian
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