Le théâtre de Constance, en Allemagne, accueille une performance sur la jeunesse d’Hitler, nommée Mein Kampf. En plus de distribuer des croix gammées aux spectateurs souhaitant obtenir un billet gratuit, la première de la pièce a lieu le jour de l’anniversaire de la naissance du dictateur. Malgré la colère des associations, et la montée de l’antisémitisme au sein de la société allemande, le parquet de la ville refuse d’intervenir contre la représentation.
Le 20/04/2018 à 17:37 par Laure Besnier
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20/04/2018 à 17:37
Au coeur de la polémique, la pièce Mein Kampf, écrite par le Hongrois George Tabori (1914-2007) et dirigée par le metteur en scène turc Serdar Somuncu. Selon les producteurs, il s'agit d'une caricature de la jeunesse d’Hitler, alors que ce dernier tente de s’imposer sur la scène artistique de Vienne. Un vieil homme juif le prend sous sa protection. Cette pièce dite « farce » a vu le jour en 1987. Mais ce n’est pas tant son sujet que le dispositif du spectacle qui est mis en cause.
Pour l’achat d’un billet, le spectateur se voit proposer une étoile de David « en signe de solidarité avec les victimes de la tyrannie nazie ». Mais si celui-ci souhaite assister gratuitement à la représentation, le théâtre lui offre une croix gammée. Le descriptif de la performance précise qu’à la fin de la représentation, les symboles doivent être rendus.
Malgré les plaintes reçues par la ville du sud du pays, le parquet a refusé d’interdire la pièce au nom de la liberté d’expression artistique. Pourtant, il est interdit en Allemagne de produire et distribuer des symboles nazis. Depuis 1945, le port de la croix gammée est proscrite. Mais la représentation aura donc bien lieu ce 20 avril, jour de l’anniversaire de la naissance d’Hitler.
Comme le rapporte le HuffPost, un porte-parole du théâtre, Daniel Morgenroth, a expliqué que la proposition d’un billet gratuit en échange du port de la croix gammée entend montrer la fragilité des convictions des potentiels spectateurs : « L’art, s'il veut être pertinent, doit parfois être controversé. »
Pour les associations ou communautés juives de la ville, pas besoin de croix gammée pour commencer une discussion politique. Les membres de la Jewish Community of Konstanz ont d’ailleurs appelé à un boycott de la performance.
« Cela a toujours été un tabou d'utiliser les symboles nazis d'une manière artistique » explique Arthur Bondarev, vice-président de la Jewish Community of Konstanz. « Maintenant, la production, bien sûr, a, en quelque sorte, brisé le tabou. C'est une sorte d'ironie ... Mais il y a toujours eu une sorte d'accord tacite sur le fait de ne pas utiliser ces symboles à des fins artistiques – sans plus de discussions ou une démonstration de l'idée sous-jacente. »
La croix gammée a été utilisée à d'autres reprises dans l'art, notamment sur les vêtements des punks britanniques, qui l'utilisait à des fins de provocations. Mais le cas de cette pièce de théâtre s'observe en plus dans un contexte où l'antisémitisme grandit en Allemagne.
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