Lors de la dernière Foire du livre de Francfort, l’Iran avait décidé d’un boycott général : la présence de Salman Rushdie en tant qu’invité d’honneur, et chargé du discours inaugural, était une insulte pour le pays. Et depuis quelques heures, la fatwa lancée contre le romancier est relancée : quarante médias iraniens se sont regroupés pour offrir une récompense de 600.000 $.
Sur le stand de l'Iran, durant la Buchmesse 2015 - ActuaLitté, CC BY SA 2.0
« Les responsables ont choisi pour thème la liberté d’expression, mais ont invité quelqu’un qui a insulté nos croyances (...). Les insultes de Salman Rushdie et de certains caricaturistes sont une violation de la liberté d’expression », déclarait l’Iran, en octobre 2015. « L’invitation d’un auteur qui insulte les croyances sacrées de plus d’un milliard de musulmans au prétexte de la “liberté d’expression” à la conférence de presse de la Foire de Francfort est une violation de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme », affirmait un panneau, posé sur le stand de l’Iran.
600.000 $ de mieux pour une mise à mort...
Au cours du week-end, on a ainsi appris que quarante médias avaient collecté plusieurs milliards de rials, pour augmenter la prime pour la mort de Rushdie. En tout, une cagnotte de 600.000 $ est proposée, annonce qui coïncide avec l’anniversaire de la fatwa que lançait l’ayatollah Khomeini, fondateur de la République islamique.
Bien entendu, les quarante médias sont contrôlés par l’État : depuis février 1989, le pays célèbre le triste 27e anniversaire du décret juridique mettant à mort l’auteur des Versets sataniques. L’ancien président, Mohammad Khatami avait pourtant déclaré en 1998 que la fatwa était officiellement levée.
Pourtant, en 2012, l’Iran avait rappelé que la mise à mort de Rushdie était toujours à l’ordre du jour. Le pays ajoutait en effet 500.000 $ de récompense, aux 2,8 millions $ déjà proposés.
Et encore, début 2015, un représentant du pouvoir religieux, Mohsen Gharavian qui confirme la menace : « Salman Rushdie est un mercenaire de l’arrogance mondiale... Des années se sont écoulées depuis que Khomeini a pris cette décision, mais le décret est toujours valable et en vigueur, et personne d’autre que le Velayat-e faqih [sorte de procureur général juridico-religieux, incarné par Khomeini, NdR] n’est en mesure de l’annuler. »
Rushdie, originaire d’Inde, avait dû fuir en Angleterre pour échapper aux menaces, et durant des années fut placé sous la protection de la police, vivant dans la plus totale clandestinité. Salman Rushdie avait quitté l'Inde en 1987, après le tournage d'un documentaire. Il écrit dans ses mémoires, en évoquant son alter ego clandestin : « Il ne le savait pas encore, mais c'était le début d'un long exil. »
En décrivant les impacts de tous les malheurs l'ayant frappé, depuis l'interdiction de son livre et jusqu'à la condamnation à mort par l'ayatollah Khomeini, l'écrivain confie : « Les blessures infligées par l'Inde étaient les plus profondes. »
L’agence Fars présente la liste des quarante médias impliqués dans cette nouvelle décision. Elle-même a décidé d’abonder à ce fonds lugubre, à la hauteur de 30.000 $.
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Pour approfondir
Editeur : Plon
Genre : littÉrature...
Total pages :
Traducteur : gérard meudal
ISBN : 9782259214858
Joseph Anton. Une autobiographie
de Salman Rushdie