Voici l’homme que tous les bibliothécaires des États-Unis ont fini par haïr : John Sargent, précédemment PDG de la maison Macmillan, vient d’annoncer son départ. Pas certain que le lobbying des bibliothèques en soit la cause. En revanche, on sait que des désaccords avec sa direction ont conduit à cette décision.
À compter du mois de janvier, John Sargent quittera donc Macmillan, un choc dans l’industrie du livre américaine. Figure éminente, il sera remplacé par Don Weisberg, autre vétéran de l’industrie, indique le New York Times.
Depuis des mois et des mois, les conditions tarifaires que Macmillan impose aux bibliothèques sont dénoncées par les organisations professionnelles. Et, quel que soit le charisme du futur ex-PDG, ces tensions ont porté préjudice à l’entreprise — la campagne de boycott déclenchée sur la toile en est l’une des preuves.
Il aura fallu un coronavirus et une pandémie mondiale pour que le groupe éditorial décide de modifier ses conditions économiques pour le prêt d’ebook. Et là encore, les professionnels ne l’ont pas vraiment digéré.
D’autant que durant cette période, Macmillan a imposé des chômages techniques aux salariés, quand la plupart des grands groupes étaient parvenus à l’éviter. Les employés de Farrar, Straus & Giroux, filiale du groupe, avaient même déclenché une grève durant l’été — dénonçant également l’iniquité raciale et le manque de diversité dans l’édition. Macmillan, encore une fois, semblait cristalliser les tensions de l’interprofession.
Notons toutefois que la politique de vente d'ebooks aux bibliothèques avait été modifiée dans le courant de l'été.
Tiens bon, la barre et tiens bon le vent...
Stefan von Holtzbrinck, directeur général de Holtzbrinck Publishing Group, propriétaire de Macmillan, assure que Sargent s’est toujours acquitté honorablement de sa tâche. « Les principes et le leadership exemplaire de M. Sargent ont toujours été fondés sur des causes valables et essentielles : que ce soit la liberté d’expression, l’environnement ou le soutien aux personnes vulnérables. Puisque Holtzbrinck partage ces idéaux, ils continueront de vivre. »
Certes, mais cela ne dit pas vraiment pourquoi Sargent, aussi admirable qu’il fût, doit partir. Et quitter également son poste au sein du conseil d’administration de Holtzbrinck — où il occupait l’un des trois sièges.
Sa carrière, débutée dans les années 80, commença chez Doubleday, filiale du groupe Hachette aujourd’hui. John Sargent était d’ailleurs le petit-fils du fondateur. Passé par Simon & Schuster ou encore Dorling Kindersley, Sargent intégra St. Martin’s Press, filiale de Macmillan, en 1996 au titre de directeur général.
Il s’était pourtant distingué dans le combat sur le prix des livres numériques, où Apple fut mis en procès pour distorsion de concurrence, sur des accusations jamais reconnues d’Amazon.
Pour les salariés, le coup est dur, mais se voyait venir : en juin dernier, un courrier de Sargent en personne indiquait que la société connaitrait des changements prochains, avec la mise en place d’un nouveau comité de gestion.
L’objectif de Weisberg qui prend la place vacante sera de renforcer, indique-t-il, les réussites de Sargent. « Je suis arrivé dans l’entreprise pour travailler avec John Sargent et j’ai énormément appris de lui. En raison de ce qui se trame avec le Covid, nous ne sommes pas sortis d’affaire, mais tous les signes indiquent une très bonne année. Nous avons de très bons livres qui fonctionnent. »
Méthode Coué ?
photo : John Sargent - ActuaLitté, CC BY SA 2.0
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