Aux États-Unis, des propositions législatives se multiplient pour proposer la mise en place d'un comité consultatif chargé de rendre un avis sur les collections des bibliothèques publiques. Un dispositif qui relèverait de la censure, assurent les opposants, mais qui se répand auprès des législateurs : après l'État du Missouri, un sénateur et un représentant du Tennessee portent des projets de loi similaires.

(photo d'illustration, tracey r, CC BY 2.0)
Deux projets de loi, Senate Bill 2896, porté par le sénateur républicain Paul Bailey, et House Bill 2721, proposé par le représentant républicain Andy Holt, soutiennent la même disposition : faire nommer un comité pour superviser les achats et la constitution des collections des bibliothèques publiques de l'État. Concrètement, 5 personnes seraient nommées par les responsables politiques, pour se prononcer sur les acquisitions.
Ce comité pourrait être saisi par les citoyens eux-mêmes, afin de se prononcer sur tel ou tel ouvrage mis à disposition du public. Les membres seraient en particulier chargés de déterminer si un document présentant des contenus sexuels est approprié pour une certaine classe d'âge, et donc s'il doit être proposé dans une section de l'établissement ou non.
Sont ainsi visées « [t]oute description ou représentation, sous toutes les formes, de la nudité, de la sexualité, d'un comportement sexuel, du désir sexuel ou d'un abus sadomasochiste ». Assez large, le cadre législatif laisse une grande part à la subjectivité, puisque les contenus « qui manquent d'intérêt littéraire, artistique, politique ou scientifique pour les mineurs » pourraient être visés.
Dans le domaine de l'appréciation de la valeur d'une œuvre, la marge selon les individus est très large, les bibliothécaires le savent bien. Aussi, la mise en place de tels comités — à raison d'un par établissement — fait craindre des manœuvres de censure assez évidentes. D'autant plus que la décision des comités ne serait pas contestable.
Une tendance puritaine américaine ?
Quelques semaines après un projet de loi similaire déposé dans l'État du Missouri, la multiplication des tentatives des représentants d'imposer une autorité nouvelle aux bibliothèques fait craindre aux professionnels un retour à peine dissimulé de la censure. Celui-ci s'effectuerait derrière le prétexte très malléable de la sécurité des plus jeunes face à des contenus qui ne seraient pas appropriés.
« Nous soutenons le droit des familles et des individus de choisir des ouvrages parmi un large éventail. Les bibliothèques publiques ont déjà mis en place des procédures qui aident les parents à sélectionner le matériel qui correspond au mieux aux besoins de leur famille, sans censurer le matériel ni porter atteinte aux droits des individus de choisir les livres qu’ils veulent », indiquait notamment la Freedom to Read Foundation, organisation qui défend le pluralisme dans les établissements de prêt.
Pour les opposants à ces législations, ces comités viseraient expressément les ouvrages présentant des personnages issus de la diversité, ou n'affichant pas des orientations hétérosexuelles, par exemple. Au vu des cas de censure qui émaillent régulièrement l'actualité des bibliothèques aux États-Unis, ils n'auraient pas tort : la plupart du temps, les ouvrages visés évoquent des relations homosexuelles ou des personnages transgenres.
via Book Riot
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