Que nous disent les “mots” des livres : au-delà de l’histoire racontée (ou pas…) dans les romans, que découvrirait-on en analysant tant par la sémiologie que la statistique, les titres, images et quatrième de couverture ? La société Motamorphoz s’est lancée avec les 107 livres retenus à travers 10 prix littéraires.
Premier périmètre, les prix en question : il s’agit des classiques Grand prix du roman de l’Académie française, Renaudot, Goncourt, Femina, Médicis, Décembre, Interallié, Flore, Wepler/Fondation La Poste et Hors-Concours. Alors quid ? D’abord, et sans que cela n’ait probablement d’incidence, le titre le plus long, cette année, aura obtenu le prix Goncourt : Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon, de Jean-Paul Dubois.
De même, une palette de guest-star s’est invitée dans la rentrée littéraire : Jésus Christ, le Général de Gaulle, Frida Kahlo, Jack London, Tadeus Reichstein, Ariel Sharon ou encore Samia Yusuf Omar. Reste à retrouver dans quels romans…
En termes de marketing, l’étude indique que l’autopromotion des auteurs serait plus flagrante sur les 4e de couverture cette année. Les couvertures sont à 42 % des photographies. Parallèlement, la modernité se conjugue au passé : « 76 % des histoires sélectionnées par les prix littéraires prennent place dans le présent et 20 % dans le passé. »
Et plus précisément, 41,5 % des histoires se déroulent en France — avec 6,5 % à Paris. Le germanopratisme n’a donc pas verolé les jurés de prix littéraires. Chose amusante : 25 % des personnages n’ont pas de nom, mais 7,4 % sont écrivains, 6,5 % œuvrent dans le milieu artistique et 6,5 % dans le journalisme. 75 % des auteurs présentent leurs personnages principaux en les nommant, par un nom complet ou parfois seulement par un prénom.
Tout l’enjeu de cette étude est alors d’établir une forme de panorama — comme une carotte permettant de sonder le terreau littéraire. 107 titres font-ils une conclusion ? Non, mais présentent certainement un aperçu intéressant : rappelons qu’il n’existe d’ailleurs pas 524 romans de la rentrée, mais vraisemblablement 480 ou 470 si l’on y regarde de plus près.
De l’analyse, on retient que les titres proposés restent à 23 % calqués sur un modèle « Article + Nom Commun + Préposition + Article + Nom Commun », mais 23 % se résument en deux mots. La concision est de rigueur. Chose notable : le mot “monde” se retrouve dans six titres du panel, contre 3 fois l’occurrence “île”, “homme” et “nuit”.
Autre point que Actualitté avait pu analyser : 60 % des ouvrages retenus sont écrits par des hommes, contre 40 % par des femmes. Nous avions observé un panel de 188 ouvrages, mais aboutissions au même ratio… On retrouve en revanche une situation plus équilibrée : 32 occurrences du mot homme, dans les 4es de couverture, contre 29 pour le mot femme. Cela dit, on parle plus souvent de “femmes” au pluriel.
En passant au crible la couleur des couvertures, blanc (25 %), beige (14,9 %) et noir (14,9 %) dominent. Et pour les titres, noir (26 %), blanc (25 %) et rouge (25 %) sont préférés. D’ailleurs, en matière de couverture, 40 % affichent un personnage — dont on ne peut d’ailleurs voir qu’une partie du corps. La traditionnelle couverture typographique qui fait l’identité de plusieurs maisons reste un classique.
Chose moins banale : l’auteur ne verra sa photo apparaître sur la couverture que s’il est… une autrice. Et bien entendu connue.
Enfin, pour la 4e de couverture, on note un mélange des genres : l’ouvrage ne serait plus résumé, mais bien vendu, comme un produit.
« La quatrième devient un espace de promotion. 35,5 % des quatrièmes se composent d’un résumé de l’intrigue, 3,7 % d’un édito promotionnel, et 7,5 % d’un extrait ou citation tirée du roman, mais 54 % présentent une forme hybride : un résumé + un édito promotionnel, un extrait + un résumé, un extrait + un édito promotionnel et parfois même les trois ensemble », pointe l’étude.
La palette d’adjectifs choisis par les maisons pour qualifier la production ne sait plus où donner de la tête : brillante, surprenant, inventif, inattendu ou subtil, voire exaltant.
Mais alors, quels sont les thèmes qui se dégagent cette année ? Le corps revient dans une quinzaine d’ouvrages, tandis que l’amour est présent dans 24 titres. Si 47 % sont des récits de vie, la relation familiale — la filiation, plus précisément — occupe les esprits : famille, père et mère sont largement présents. D’ailleurs, 12 % des titres abordent la question d’un secret familial.
Contre toute attente, l’écologie pas plus que la planète ne figurent dans les thèmes du panel. De même, et l’affaire est rassurante, les faits de société (Trump, etc.) ne se retrouvent pas non plus dans les romans examinés, hormis le Jonathan Coe, préciserons-nous de notre côté, et son étude romanesque vitriolée et irrésistible du Brexit en lice pour le Femina. Manque de recul ou d’histoires passionnantes à envisager ?
L'étude est à consulter ou télécharger ci-dessous
Dossier - Rentrée littéraire 2019 : des auteurs, des livres et des prix
Retrouver la liste des prix littéraires français et francophones
1 Commentaire
Jujube
06/11/2019 à 18:12
Bonjour les statistiques au chevet de la littérature! Puissent-elles insuffler un regain d'imagination aux autrices et auteurs en partance pour de prochains écrits ou prix de tous poils et plumes.
Quand les statistiques font rêver...