L’audience opposant Amazon, et sa filiale Audible, aux sept groupes éditoriaux américains n’a pas vraiment tourné en faveur de la firme de Jeff Bezos. Après 90 minutes d’audience, la juge s’est clairement montrée indifférente aux arguments déployés pour justifier l’apparition de Captions, l’outil de sous-titrage des livres audio.

pixabay licence
« Atteinte par excellence au droit d’auteur », déclare l’avocat des plaignants, Dale Cendali, cité par Publishers Weekly qui retrace l’audience. Car au final, et la juge a parfaitement entendu l’argument : présenter des sous-titres, c’est fournir une expérience de lecture. « Affirmer autre chose que cela n’a pas de sens », insiste l’avocat.
Et la juge Valerie Caproni l’a bien entendu. Ces sous-titres n’ont pas besoin d’être présentés comme un substitut à un livre pour s’avérer nuisibles au commerce des éditeurs et aux revenus des auteurs.
Un outil qui fournit du texte, mais pas de la lecture ?
Face à cela, Audible a plaidé l’intérêt public, faisant déborder les questions sur le principe du Fair Use – ou usage équitable, notion juridique qui permet des exceptions au copyright, souvent déplorées par les ayants droit. Accepter un sous-titrage reviendrait en effet à limiter la capacité commerciale des maisons à vendre des licences d’exploitations d’autres formats.
Autrement dit, Captions « dévalue et déprécie » les droits, en offrant gracieusement un service de texte. Plus encore : comme ce sont des IA qui vont interpréter et retranscrire le texte, aucun gage de qualité ne peut être avancé. De quoi offrir une expérience possiblement déplorable aux clients — ce qui retomberait sur les auteurs et les éditeurs.
« Ce qu’ils essaient de faire, c’est d’introduire un changement radical. C’est pourquoi vous avez tous ces éditeurs, auteurs et agents ici réunis. Cela vous montre à quel point c’est terrible », renchérit l’avocat des plaignants.
De son côté, Emily Reisbaum, avocate d’Audible, n’en a pas mené large : tentant de défendre la qualité du rendu, elle argue que le taux d’erreur pointé est inexact. Et ce, sans fournir pour autant une expérience de lecture. Exercice périlleux que d’expliquer qu’afficher des mots transcrits par une machine à partir d’une voix qui lit ne serait pas de la lecture.
Les mots ne font pas un livre
« Le fait de voir des mots n’en fait pas un livre », insiste l’avocate, cherchant même à convaincre que ces « légendes » officieraient simplement comme une amélioration de l’écoute. Et ce, attendu que l’utilisateur ne peut ni stocker le texte ni avancer ou reculer, pour aller à son propre rythme. Il s’agirait simplement de mieux faire comprendre les mots lus.
Sauf que, riposte la juge, les clients « ont payé pour que les mots leur soient lus ». Uniquement.
Tout semblait plié, mais les avocats d’Audible sont revenus sur la question de la plainte pour violation du droit d’auteur. Insistant sur la notion de licences et de leur exploitation, l’accusé se retrouve à inverser les tendances : non seulement les plaignants ont reconnu avoir passé des accords de licences. Mais surtout, sans en connaître l’ensemble des détails, comment la cour pourrait-elle définir si les contrats ne permettant pas cette diffusion de texte ?
Et la juge s’engouffre : elle s’interroge sur le bien-fondé d’une injonction préliminaire, alors que les pièces tiennent la route et permettraient de passer en jugement. Elle propose même une procédure accélérée et une date de procès d’ici la fin de l’année…
Tollé chez les éditeurs : selon eux, l’incertitude qui plane autour du programme a déjà commis des dégâts, empêchant des transactions actuellement négociées. Pour Cendali, cette injonction permet de prévenir d’un lancement dont la date reste incertaine — et ne pas trancher sur ce point accorderait à la firme une fenêtre de tir pour expérimenter son outil…
La décision du juge est pour bientôt…
Commentaires
Manie, le 27/09/2019 à 09:00:27
Répondre
Manie, le 27/09/2019 à 09:15:19
Répondre
Margot, le 27/09/2019 à 15:15:15
Répondre
Poster un commentaire