Je n’avais franchement jamais entendu parler de Roger de Lafforest qui a pourtant eu une longue vie, né sous Emile Loubet et mort sous François Mitterrand. Il fut journaliste, écrivain, puis abandonna la littérature pour se consacrer à …la magie. Une magie sophistiquée mais de la magie quand même à laquelle il dédia plusieurs ouvrages dont l’un fut, semble-t-il, un succès de vente : « Les Maisons qui tuent », dont on retrouve même une traduction en espagnol.
Le 15/10/2017 à 09:00 par Les ensablés
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15/10/2017 à 09:00
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Par Henri-Jean Coudy
Dans « La réalité magique » , il écrivait : «La science et la magie peuvent être comparées à bien des titres. Leurs buts sont identiques. La magie a été inventée pour répondre au rêve de puissance que tout homme nourrit en soi. C’est son péché inexpiable, c’est aussi sa noblesse luciférienne. Elle a été utilisée pour satisfaire l’appétit de confort et de jouissance, c’est son aspect commercial et méprisable. Remplacez le mot« magie» par le mot« science » , l’analyse reste exacte. Il s’agit dans les deux cas d’une tentative faite pour découvrir et maîtriser des forces naturelles invisibles ou des rapports de forces insolites… car la magie n’utilise que des forces naturelles encore inexploitées et se contente de les canaliser vers un but choisi. ».
Bien, pourquoi pas, mais je suppose que ce n’est pas par magie qu’il obtint en 1939 le prix Interalliépour « Les Figurants de la Mort », roman picaresque et hilarant, et primé alors que la Franceétait en guerre.
C’est à une étrange variation sur le thème d’ « Il faut savoir cultiver son jardin ».
Cela commence à Saint-Maury-sur-Yveline, quelque part en Seine et Oise : « Le fou hurlait deux fois par jour : à l’aube quand le premier avion, ronflant à hauteur des cheminées, réveillait le village ; au crépuscule, après que trois coups de trompe prolongés eurent chassé les carriers des meulières. ».
Le narrateur , un homme encore jeune qui pense qu’ « une vie calme et sédentaire ne valait pas la peine d’être vécue » et à qui « l’aventure paraît la seule forme d’existence digne d’un homme » décide d’aller voir qui est l’étrange hurleur. Il est bien reçu car l’homme n’est pas fou, le cri bi-quotidien lui permettant simplement de rétablir un équilibre nerveux fortement éprouvé par la vie, la vie d’aventure justement.
Il s’agit d’un capitaine de navire, le capitaine Petitguillaume dont, heureux hasard, le narrateur a assisté comme journaliste au procès au tribunal maritime de Brest devant lequel il devait répondre de la façon dont il avait dirigé le « Libertador » , un navire marchand, dans les eaux agréables qui séparent le Vénézuela des Antilles françaises. Le capitaine lui confie que devant le tribunal il n’a rien dit : que n’a-t-il pas dit ? Le roman va nous l'apprendre, car iléprouve le besoin de se livrer au journaliste.
L'histoire commence à Hambourg en 1930, grand port d’Allemagne du nord noyé dans la période interlope d’un pays en crise où s’étend la peste brune.
Mais de l’uniforme des SA, il ne sera pas question ; en revanche, comme on est dans un récit de marine, il y a des tavernes à matelots, et, bien sûr, une bagarre ; bagarre dans laquelle Petitguillaume va se précipiter en s’apercevant que l’un des protagonistes, seul contretous, est français ; bagarre qui tournerait mal s’il n’était poussé un cri miraculeux : « A moi , la Légion » qui paraît-il fait passer une partie de vos adversaires, ceux qui ont été de la Légion, de votre côté du combat.
Ce qui arrive ; Petitguillaume et le Français, un breton du prénom de Jérôme, sortent vainqueurs du combat, font connaissance avec leurs sauveurs, messieurs Kock et Schutz, qui ont porté le képi blanc.
Mais l’aventure ? Eh bien, l’aventure, c’est la rencontre de cette fine équipe, dans un nième bar du grand port avec un « grand monsieur vêtu d’une redingote, coiffé d’un feutre noir aux larges bords… Des moustaches grises et une mouche lui donnaient un air martial. Son port ne manquait pas de majesté et ses mains fines chargées de bagues dénonçaient un homme de grande race. Ses yeux noirs brûlaient de fièvre dans un visage de cire. »
On saura vite que le « prince noir » n’est autre que le général Gonzalès Clarriarte y Equipa, et qu’il est banni « du Vénézuela pour avoir tenté de rendre la liberté à ( son) malheureux pays qui gémit sous le joug d’un dictateur sanguinaire » ; on pense évidemment aux tout aussi célèbres généraux Alcazar ou Tapioca, de l’univers d’Hergé …
Et que fait-il à Hambourg ? Il cherche des hommes ! Des hommes pour l’accompagner dans une énivrante expédition bolivarienne pour restaurer la liberté (on s’attendait au slogan, la Patrie ou la Mort, on n’est pas déçu) dans le grand pays déjà pétrolier d’Amérique latine.
On se doute que l’hétéroclite groupe du capitaine Petitguillaume ne va pas rater l’occasion d’abandonner leurs situations, ayant appris que le peuple vénézuelien attendrait l'arrivée du général pour lui ouvrir les bras.
Petitguillaume, authentique commandant breveté prend la direction du navire appartenant au général, le bien nommé Libertador.
Tout y passera. Une épouse du générale, nymphomane barbue, un exilé russe homosexuel affligé d’une fille, aussi jolie qu’indifférente au monde ; pour un peu, on dirait une colonne guévariste d’autant plus que pour faire de l’infanterie, créer un effet de masse, on recrutera au petit bonheur des gens en leur faisant croire qu’ils seront figurants dans un film ! Leurs armes seront à la hauteur de l’équipage, de vieux flingots hétéroclites et des munitions qui ne correspondent pas…
On ne dira pas l’aboutissement politique et militaire de l’aventure ; la traversée sera émaillée d’évènements comiques et tragiques, puisqu’on meurt à bord du bateau , et on y meurt même quelquefois salement…
L’arrivée au Vénézuela, pays qui a l’habitude des tragédies comme son actualité récente le démontre encore,sera à la hauteur de la maladie qui a emmené des hommes aussi différents, venir se perdre à des milliers de kilomètres : « le goût de l’aventure : vivre autrement, vivre ailleurs, vivre dangereusement ».
C’est une mise en garde pathétique que Petitguillaume livre,« contre ce mal terrible, qui fait des ravages qu’on ne soupçonne pas, et contre lequel hélas ! la société ne prend aucune mesure de prophylaxie ».
Vaut-il mieux, dans une vie qui est courte, être Guevara ou Henri Queuille (modèle ancien de François Hollande et comme lui président du conseil général de Corrèze), vivre en hystérique suicidaire ou en partisan des mares stagnantes ? On en jugera en méditant la leçon qu’en tire le narrateur qui a eu l’imprudence d’aller voir ce qui pouvait bien rester de l’expédition du Libertador : « Je voudrais par des exemples…vous dégoûter de l’Aventure, vous guérir, pauvres frères par un récit de bonne foi,de vos dangereux désirs d’évasion. On s’évade du bagne, mais on ne s’évade pas des emmerdements de la vie ni de son propre désespoir, même par le suicide : le seul remède, c’est l’immobilité. ».
C’est sans doute Roger de Lafforest lui-même qui parle, qui alla se réfugier dans les études magiques et dans l’usage (qui n’exige pas de mouvement) d’objets comme un « pentacle de jeunesse » capable d’émettre l’onde qui réactive le principe d’immortalité que chacun porte en soi. L’éternelle jeunesse ne serait en effet pas autre chose qu’une éternelle immobilité. ( Anne Denieul- La magie est naturelle- Entretien avec Roger de Lafforest in Le Sorcier assassiné -1981).
Henri-Jean Coudy
NB : oublié lors de la publication de la chronique, mais aimablement souligné par l’éditeur dans les commentaires, la réédition du texte en mai 2009 chez L’arbre vengeur, avec une préface de François Ouellet.
Roger de Lafforest François Ouellet (Préfacier), Hugues Micol (Illustrateur) – Les figurants de la mort – L’Arbre vengeur – 9782916141404 – 5,10 €
Paru le 11/05/2009
250 pages
L'Arbre Vengeur
5,10 €
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BONNES FEUILLES — À l'époque des croisades, un redoutable guerrier arabe et un chevalier chrétien s'allient afin d'affronter les puissances obscures. Cette histoire, mêlant fantastique et réinterprétation historique, nous plonge au cœur des croisades. Les frères Mammucari donnent vie à un héros légendaire, tourmenté par un passé sombre, qui doit transcender ses propres limites pour terrasser des ennemis maléfiques menaçant l'existence même de l'Humanité.
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Hervé Bel anime dans nos colonnes le rendez-vous (presque) hebdomadaire des Ensablés. Mais il arrive aussi que notre ami écrivain se plonge dans les ouvrages de ses contemporains. Voici sa lecture du dernier ouvrage d’Armel Job, Le Passager d’amercoeur.
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À l'occasion des 150 ans de la naissance de l'important Karl Kraus, les éditions de l'Herne rééditent leur numéro 28 de 1974, dirigé par l'essayiste et traductrice disparue en 2022, Eliane Kaufholz. La citation mise en exergue dans le bandeau de ce riche ouvrage rend bien compte de la puissance krausienne : « La tragédie tire son origine du refus d'obtempérer. »
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BONNES FEUILLES — Des épisodes sanglants de la guerre du Pacifique aux avancées les plus récentes en aéronautique, l'aviateur Buck Danny, accompagné de ses compagnons, navigue à travers un demi-siècle d'histoire américaine et internationale, de péripétie en péripétie. Mariant une précision remarquable pour le détail authentique avec l'élan des grandes sagas, les péripéties de Buck Danny captivent et révèlent, au fil de l'histoire, les arcanes de la géopolitique mondiale.
27/03/2024, 17:13
Un hiver froid, glacé même, uniformément blanc, au sol et dans le ciel, comme seules semblent savoir le faire les chaînes montagneuses du Montana. Nous voilà transportés dans les dernières années d’un XIXe siècle où la loi des hommes, qui se cachent derrière les volontés (prétendues) de Dieu, est fort expéditive et peu encline à prendre en considération tout élément qui pourrait être présenté au titre de la défense de celui ou celle qui est d’abord condamné...
27/03/2024, 17:11
Un grand roman adapté par un grand bédéiste donne-t-il forcément une bande dessinée magistrale ? Impossible de généraliser, mais dans le cas de La route de Cormac McCarthy racontée en images et en bulles par Manu Larcenet, la réussite est indubitable. Elle provoque chez les lecteurs le même désespoir sidérant que l'œuvre originale. La grisaille et la crasse en plus.
27/03/2024, 12:17
« En 1910, Gustav Klimt peignit le portrait d’une très jeune femme, de trois quarts, cheveux lâchés, affublée d’un grand chapeau marron, une étole de fourrure autour du cou, les épaules dénudées. » Un portrait qui, on ne l’apprendra que plus tard, fut le seul et unique tableau repeint par Klimt. Sous cette couche supplémentaire de peinture, une femme à l’apparence toute autre. Plus d’un mystère existe autour de ce portrait, qui a disparu pendant près de 100 ans…
27/03/2024, 10:54
Transférée dans le poste de police de Millau, dans le sud de la France, Sophie Cauchy enquête sur la disparition d'une adolescente nommée Jessica Borie. D’après ses parents, elle serait partie vivre dans une communauté isolée appelée La Bergerie après avoir quitté un squat à Nantes. Un départ en écho au parcours de Sophie : elle a plaqué la région parisienne et un couple toxique, pour se sauver…
26/03/2024, 09:28
BONNES FEUILLES — La montée en puissance de la Chine suscite des préoccupations croissantes, marquée par des tensions géopolitiques, une guerre commerciale avec les États-Unis, des initiatives ambitieuses telles que les Nouvelles Routes de la soie, une compétition militaire dans la région de l'Indopacifique, et une rivalité dans le domaine des semi-conducteurs. Cette escalade de rivalité avec les États-Unis menace de perturber l'ordre mondial existant.
26/03/2024, 07:55
BONNES FEUILLES — « Il m’arrivait souvent de penser à elle. Un frisson dans l’air, une éclaircie, ou, comme dans ce cas précis, une ressemblance, il n’en fallait pas plus pour la faire apparaître. J’avais alors le sentiment qu’elle était vraiment là, tout près, vivante, que son regard, son sourire s’adressaient à moi. L’espace d’une seconde, je retombais en enfance, car j’entrais dans son univers plus qu’elle ne surgissait dans le mien. »
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BONNES FEUILLES - Tout a commencé avec des livres et des rencontres. Dans les années 1990, après la fin officielle de la guerre civile au Liban, Laurent Sorcelle croise le chemin de Désirée Sadek, une jeune journaliste qui venait de sortir Le Cèdre du Liban, un ouvrage militant pour la préservation de l'ultime forêt de cèdres anciens et millénaires du nord du Liban et du monde.
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Après Madrid, traversons l’Europe pour gagner Londres, pour un tout autre polar, dans le quartier de Soho. Geats, détective obsessionnel, dont les enquêtes ont passablement entamé l’esprit. Dans les différentes affaires qu’il a traitées, crimes et bien d’autres l’ont entraîné vers des chemins obscurs. En cette année 1935, ce policier des mœurs traite les malfrats avec un esprit à géométrie variable… jusqu’à un meurtre plus choquant que d’ordinaire.
25/03/2024, 14:33
Le 28 février, lors d’une rencontre organisée à La Libreria, créée en 2006 par Florence Rault et Andrea De Ritis, on a parlé de Venise, mais pas de la Venise que l’on connait, avec Piazza San Marco, les touristes, les pigeons et les « gondoles » sur les canaux… On a parlé plutôt d’une Venise de lagunes, une terre de frontière interprétée comme une « petite Méditerranée » imaginée par les auteurs de la bande dessinée Le passeur de lagunes.
25/03/2024, 13:12
Jon Gutiérrez et Antonia Scott travaillent comme enquêteurs pour un projet gouvernemental secret appelé Projet Red Queen, consacré à l’investigation sur des crimes. Le décès d’une femme nommée Raquel Planas, découverte à son domicile de Madrid quatre ans plus tôt serait banal… si la capitale espagnole n’était pas en proie à une série de crimes violents, répandant une véritable terreur…
25/03/2024, 13:07
« [Novembre 2023, gare de Przemyśl, à l’est de la Pologne.] Dans quoi je me suis embarqué ? ». Après s'être introduit dans l'Assemblée nationale (Palais-Bourbon), Kokopello dévoile le tumulte européen. Mais tout commence un an et demi plus tôt, le 24 février 2022, dans le bureau du secrétaire général des Républicains…
25/03/2024, 13:00
Une semaine pour prouver l’innocence d’un condamné : la chose semble impossible, surtout lorsque le dossier est clos depuis dix ans. Le meurtrier présumé menace : si, dans une semaine, son innocence n’est pas prouvée, il se suicidera. Victor Caranne, le héros des deux premiers romans policiers de Max Monnehay, sonne son retour dans une nouvelle enquête à haute teneur psychique.
25/03/2024, 12:40
One-shot exceptionnel, Silver Surfer — L’Obscure clarté des étoiles porte déjà un titre emprunté au Cid de Corneille. Un oxymore qui résonne à 250 ans d’intervalle, loin de la puissance SF du dessin de l’Italien Claudio Castellini. Et pourtant, ce vers revêt soudain une dimension fantastique qui épouse parfaitement le projet éditorial remontant à 1996.
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24/03/2024, 07:00
BONNES FEUILLES - Lesley Blanch (1904-2007), à la fois femme indépendante, artiste accomplie et exploratrice passionnée, a consacré une grande partie de sa vie à deux figures marquantes de son existence : le dramaturge Théodore Kommissarzhevsky et l'écrivain Romain Gary, ce dernier étant son premier mari.
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BONNES FEUILLES - Bruxelles, 1977. En proie à l'ennui, le jeune Riton Liebman, âgé de treize ans, décide de tenter sa chance à un casting organisé par Bertrand Blier pour son film à venir, Préparez vos mouchoirs. Dès ses premiers mots, le réalisateur est convaincu d'avoir trouvé son personnage.
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23/03/2024, 06:30
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Imaginez : notre monde, dans un bon nombre d’années – combien précisément, on ne le saura jamais. Un monde désormais complètement chamboulé, où l’équilibre s’articule autrement. Le capitalisme est une notion vétuste, notre société telle qu’on la connaît aujourd’hui s’est tout bonnement écroulée. La cause ? Une révolution.
21/03/2024, 16:57
2 Commentaires
Arbre vengeur
25/03/2018 à 17:11
Etonnant que vous ne preniez pas la peine de citer la réédition de ce titre avec une préface de François Ouellet, actif participant aux Ensablés. Négligence bibliographique ? Cordialement, L'AV.
Team ActuaLitté
25/03/2018 à 18:07
En effet, un malencontreux oubli de notre part, immédiatement rectifié à la lecture de votre message.
Merci de votre intervention !