
En effet, dans ce recueil composé et traduit par Jacques Finné, qui s'est établi comme spécialiste de l'auteure (1862-1942), les six récits choisis et retenus pour ce qu'ils expriment de plus juste et de meilleur de l'oeuvre de Violet Hunt, offriront en effet un regard complet sur ses thèmes, ses recherches, bref, son style et son écriture.
Dès le premier, Le coche, le ton est donné : on se retrouve dans une calèche avec différentes personnes, de rangs sociaux, d'extractions, de comportements et de manières diverses. Pas évident dans un endroit si étriqué de se donner une contenance, et pourtant chacune aurait tort de le chercher. « Nous sommes des fantômes », confie l'un d'eux. Et cette calèche n'est autre que celle du Nocher des temps modernes, qui transporte les âmes, mais ne traverse plus le Styx.
On en profite pour égratigner bien volontiers la société anglaise de l'époque, à travers le récit de chacun des protagonistes – on ne manquera pas de sourire en retrouvant cet éternel principe lancé dans le Décameron, mais qui ici sera immédiat, fulgurant, puisqu'achevé en quelques pages à peine.
Effectivement, dès lors que les fantômes se déclarent comme tels, on n'est plus dans le fantastique, cette frontière indéfinissable entre le raisonné et le fou, mais c'est bien pour cela que nous ne souhaitions pas parler de canon littéraire et moins encore de genre.
Tout au long de ces nouvelles, l'écriture est anglaise, c'est un fait, autant que les personnages sont empruntés aux contemporains de Violet. Et oui, pour les curieux, on y retrouvera du Maupassant, du Poe, de ces petites choses croustillantes qui régalent l'esprit et enflamme un peu la lecture. On retrouvera aussi une sorte de tic d'écriture, puisque tout récit débute avec une longue ouverture descriptive, qui se prolonge parfois au-delà de la deuxième page. Rien de grave, mais une coutume qui s'est oubliée...
Dans La nuit des saisons mortes, le seul récit qui m'a moins emballé, on plonge dans quelque chose de plus contemplatif, mais c'est dans Le baromètre que le lecteur avide prendra toute la mesure de l'horreur simple, celle des petites gens. Dans un village suffoquant sous une chaleur accablante depuis plusieurs jours, les habitants n'ont plus la force de travailler, de parler aux enfants, de se débattre. On implore la pluie, comme la mort du bourreau qui doit nous tuer. Même le révérend est désemparé : que fait Dieu. Et la pluie doit tomber, il ne peut plus en être autrement.
Oh, oui, elle tombera : et même l'éclair avec elle. Lequel emportera un sacrifice, deux sacrifiés, pour exaucer les attentes des villageois. Comment en serait-il autrement ? Coïncidence, malheur, fatalité ou destin ? Peu importe, quand la mort frappe, il n'est plus lieu de s'interroger sur ses motifs...
Retrouvez La nuit des saisons mortes, sur Place des libraires
Pas de commentaires