
Quand, par un appel téléphonique, le Ministre Huang vient lui parler de Shang, une actrice qui s’est suicidée au début la Révolution Culturelle après avoir « dansé avec Mao », Chen comprend rapidement que l’enquête qui lui est ainsi confiée, en marge des interventions de la Sécurité Intérieure, pour approcher Jiao, la petite fille de Shang, dont le train de vie vient subitement et de manière incompréhensible d’atteindre des dimensions fastueuses, va devenir une « affaire Mao » ! Une affaire destinée à éviter toute calomnie contre Mao qui serait de nature à affecter la légitimité du Parti.
Tout cela parce que Shang aurait bien pu garder, de ses relations avec Mao, des documents dont Jiao aurait pu finalement devenir la détentrice malgré les perquisitions faites par des équipes des Gardes rouges lors de la disgrâce de sa grand-mère, comme lors des poursuites dont a également été victime sa mère peu après sa naissance, poursuites qui se sont terminées par son décès.

C’est bien maigre pour développer un polar.
Et pourtant, c’est suffisant et rudement bien mené au fur et à mesure de l’avancement de l’intrigue.
QIU Xiaolong nous fait côtoyer (découvrir pour ce qui me concerne) toutes les facettes de la Chine (qui vient aujourd’hui de s’offrir la vitrine de JO) où perdurent toujours, comme on peut l’imaginer, l’extrême richesse et l’extrême pauvreté, bien loin des ambitions du communisme.

Au détour des pages, c’est la cuisine chinoise qui est mise en lumière (on est presque dans un livre de cuisine à certains moments !), puis la face cachée de Mao (dont l’auteur, lui-même victime de la Révolution Culturelle, semble se délecter en nous dévoilant à foison ses côtés mégalomaniaques, franchement machistes et manipulateurs) ou encore l’omniprésence de la poésie tant dans l’œuvre de Mao que dans l’univers chinois d’une manière générale.

J’y ai aussi découvert une culture de la parabole et du sens caché où les interprétations des mots et des textes foisonnent, où un poème amoureux peut être amoureux ou politique, où « le faux est vrai et le vrai est faux ». Car les mots peuvent être ce qu’ils disent et être tout autre chose à la fois selon un code d’initiés très précis.
Mais le roman reste policier et le héros se frictionne aussi bien avec la politique et ses effets pervers (« liberté, que de crimes commet-on en ton nom ! ») qu’avec le milieu, la pègre locale, les fameuses triades (les « connexions noires et blanches ») ou avec des cadavres qui n’ont rien d’exquis.
Cette « danseuse de Mao », fil conducteur du récit, nous fait danser jusqu’au bout. Et si le texte n’a pas le liant de ceux d’Agatha Christie, il n’en demeure pas moins agréable.
C’est un très bon polar qui donne envie de retrouver le camarade Chen dans ses autres aventures.
Retrouvez La danseuse de Mao, sur Place des libraires
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