Dix ans jour pour jour après la publication au Journal Officiel de la loi du 12 juin 2009 favorisant la protection et la diffusion de la création sur Internet, l'Hadopi a présenté son rapport d'activité 2018 au musée Bourdelle à Paris, ainsi que différentes pistes sur son avenir. Denis Rapone, président de la Haute autorité, a demandé plus de compétences pour lutter contre les nouvelles pratiques de piratage, le streaming et les téléchargements directs.

(photo d'illustration, Gary Denham, CC BY-ND 2.0)
L'Hadopi a marqué son dixième anniversaire ce jeudi 13 juin 2019, en présence du ministre de la Culture, Franck Riester, du Défenseur des droits, Jacques Toubon, et de plusieurs parlementaires réunis pour l'occasion. Le rapport d'activité 2018 de la Haute autorité apprend, pour le secteur du livre, que le média reste toujours bon dernier pour la consommation de bien culturel dématérialisé (17 % en 2018, quasiment constant depuis 2011, avec 16 %).
Le taux global de consommation illicite se stabilise en 2018 à 27 % des internautes, soit 35 % des consommateurs de biens culturels dématérialisés, note le rapport, qui relève que le livre compte tout de même 28 % de consommateurs illicites, devant la musique (17 %) et derrière, bien sûr, les séries (44 %) et les films (42 %).
88 % des internautes ayant des pratiques illicites, soit 24 % des internautes, ont accès en parallèle à des œuvres culturelles dématérialisées de manière légale, précise cependant le rapport : seuls 3 % des internautes ont exclusivement recours aux sites illicites pour accéder à des contenus protégés sur Internet.
Le livre numérique compte le plus de services référencés au sein de l'offre légale, avec 179 services en 2018 (soit 43 des services légaux recensés), loin devant les 78 services légaux de rattrapage TV. Du côté du signalement des œuvres introuvables, le livre est bien loti, avec seulement 61 titres signalés entre 2014 et 2018, soit 4 % du total.
Lutter contre le streaming et le téléchargement direct
Le président de l'Hadopi, Denis Rapone, a profité de la présence de Franck Riester, ministre de la Culture et ancien rapporteur de la loi Hadopi, pour présenter les évolutions de la Haute autorité qu'il juge nécessaire, dans un contexte de pratiques de piratage en évolution.
« Les missions de l’Hadopi doivent aujourd’hui évoluer pour lui permettre de se saisir différemment du phénomène du piratage, en s’attachant à combattre ce fléau non plus seulement par le biais de l’internaute contrevenant mais en allant frapper à la source, là où sont rendus accessibles les contenus illicites », a déclaré le président de l'Hadopi dans son discours.
Premier volet d'évolution, la politique de prévention et de sensibilisation, en partenariat avec l’Éducation nationale, sera poursuivie et prolongée à travers, notamment, des ressources pédagogiques. Cependant, le président de l'Hadopi demande un renforcement du caractère dissuasif de la « phase répressive », avec la mise en place d'une amende de « faible montant mais [...] plus systématique » que l'Hadopi serait habilitée à collecter auprès des internautes contrevenants.
Bien entendu, l'autre évolution fait suite à l'adoption de la nouvelle directive européenne sur le droit d'auteur, qui prévoit la responsabilisation des plateformes et la mise en place de filtres automatisés destinés à empêcher la mise en ligne d'œuvres protégées. Des outils particulièrement controversés, car automatiques et sujets aux erreurs, que l'Hadopi se propose de réguler. « Il lui reviendrait d’évaluer leur efficacité, d’accompagner le dialogue nécessaire entre les plateformes et les ayants droit pour que la conclusion d’accords intervienne équitablement et de constituer une voie de recours pour les utilisateurs en cas de retrait abusif », assure Denis Rapone.
Enfin, pour lutter de manière efficace contre les nouvelles plateformes utilisées pour le piratage, le président de la Haute autorité propose une coopération plus suivie avec les juges pour « prévenir les consommateurs que ces services ne respectent pas les règles », isoler les sites des intermédiaires et ainsi couper leurs sources de revenus, accompagner « les procédures judiciaires conduites par les ayants droit » et enfin s'assurer que la décision du juge s'applique aussi aux sites « miroirs », qui permettent de reproduire rapidement les services d'un site sous une autre adresse web.
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