Depuis 2012, la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse organise un concours qui offre à une douzaine d’auteursillustrateurs l’opportunité de se rendre à la Foire internationale du livre de Bologne (Italie), premier salon professionnel dédié à l’édition jeunesse. L’AR2L Hauts-de-France est partenaire de l’opération. Les postulants doivent avoir publié entre un et dix livres à compte d’éditeur.

À leur retour d’Italie, les deux illustratrices partagent le même enthousiasme pour l’expérience qu’elles viennent de vivre. « Je ne m’attendais pas à ce que l’on soit si bien accueillies », commente Magali Dulain. Les lauréates du concours ont enchaîné les rendez-vous orchestrés par La Charte avec des éditeurs français et étrangers. Un marathon auquel ils ont été préparés à Paris, en janvier, par des professionnels délivrant des conseils sur la manière de se présenter ou d’améliorer leur book.
Laure Van Der Haeghen attendait beaucoup de cette formation : « Je n’avais pas fait cet exercice depuis la sortie de l’école, certains n’en avaient jamais eu la possibilité, or ce regard sur notre travail est très important. »
À la Foire de Bologne, une quarantaine de maisons d’édition françaises sont réunies sur le stand du BIEF (Bureau international de l’édition française). En plus des entretiens prévus, Laure et Magali ont apprécié les rencontres informelles, facilitées par les organisateurs et les artistes parrains et marraines du concours : Géraldine Alibeu, Thomas Baas, Sandrine Bonini et Marie Caudry.
Ce voyage leur a permis aussi de se confronter à d’autres cultures. Magali se rappelle avoir vécu « une rencontre un peu folle » avec des éditeurs chinois admiratifs de son travail. « Je leur ai montré un de mes ouvrages, ils y voyaient des arbres au lieu des sangliers que j’avais dessinés ! » s’amuse-t-elle. Que ces rendez-vous aient des retombées ou non, Laure envisage sa présence à Bologne comme un signe de reconnaissance et une belle occasion de nouer des contacts dans le monde de l’édition.
Passion et formation
Chez nos deux artistes, le goût pour le dessin s’est manifesté dès l’enfance. Née en 1985, Magali Dulain a grandi à Nantes. Après un Bac littéraire option arts plastiques, elle suit une année de mise à niveau en arts appliqués à LISAA (L’institut supérieur des arts appliqués). Elle part ensuite en Belgique : « J’avais envie de voir du pays et je savais qu’il y avait là-bas de bonnes écoles d’art. »

Magali Dulain © Lætitia Galita
« Après mes études, j’ai fait un stage au musée des Arts décoratifs de Paris en tant que graphiste, explique Magali. Mais je me suis rendu compte que c’était l’illustration que j’aimais vraiment. Je suis revenue à Lille et j’ai décidé de me lancer. » En 2011, elle est sélectionnée pour participer à l’Exposition internationale d’illustrateurs de la Foire du livre de Bologne et figure à ce titre dans le livre Illustrators annual 2011. « J’étais très contente ! J’ai créé mon site internet, j’ai pensé que j’avais peut-être ma place dans ce milieu », se souvient Magali.
En 2013, elle est contactée par les éditions Casterman qui lui proposent un projet avec Quitterie Simon. L’année suivante son premier album, Le Renard perché, est publié. Il reçoit le prix Saint-Exupéry Valeurs Jeunesse 2015.
Pour Laure Van Der Haeghen, 26 ans, la fin des études remonte seulement à 2017. Après un Bac STI option arts appliqués à Amiens, suivi d’une année préparatoire à l’Atelier de Sèvres, elle intègre l’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg au sein de la HEAR (Haute école des arts du Rhin). Elle en sort avec un Diplôme national supérieur d’expression plastique.
En fin de quatrième année, le programme Erasmus lui a permis — déjà ! — de se rendre à Bologne. « J’ai fait du stylisme pendant cinq mois. Je ne parlais pas un mot d’italien, mais j’ai pu choisir des cours pratiques. J’en ai profité pour visiter le nord de l’Italie, cela m’a apporté de nouvelles références iconographiques. Je ne me lasse pas de Botticelli ! »

Gil d'Ostrevent pour Laure Van Der Haeghen
L’art et la persévérance
Depuis leur sortie de l’école, les deux illustratrices savent qu’il faut s’armer de patience pour faire rimer passion... et profession. « Je suis une habituée des Rendez-vous Tremplin du Salon de Montreuil qui apportent toujours des critiques constructives, j’ai eu la chance d’avoir beaucoup de contacts avec des éditeurs et un projet se précise avec la maison Thierry Magnier », indique Laure Van Der Haeghen qui aimerait aussi dessiner pour la presse jeunesse. En 2018, elle a travaillé comme graphiste pour les Rendez-vous de la bande dessinée d’Amiens.
Magali Dulain de son côté, a fait des ateliers dans une école maternelle avant de décider, en 2015, de ne se consacrer qu’à l’illustration. Elle a publié cinq livres, parmi lesquels Louise (L’Étagère du bas, 2017), une belle collaboration avec Stéphanie DemassePottier. Elles ont d’autres projets, mais Magali considère l’édition comme un bonus : « Ce n’est pas grave si je ne suis pas publiée, je ne me mets pas de pression à ce sujet. »
Entre les affiches, les dessins pour la presse ou le design graphique d’un spectacle de la compagnie de marionnettes Zapoï, elle a trouvé bien des façons d’exprimer son talent. Puisant son inspiration dans la photographie ou l’illustration (Kitty Crowther, Mélanie Rutten, Jockum Nordström, Klara Persson), elle façonne à l’aquarelle et au crayon de couleur un univers coloré et foisonnant peuplé de paysages, de jungles, de chevelures ondoyantes... Un monde de douceur qu’elle continue à inventer.
Alexandra Oury
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