À l’initiative de Michel Demeulenaere, des éditions Mijade, le trimestriel Je dirais même plus vient de voir le jour. Cette publication réunit cinq éditeurs jeunesse – quatre belges et un québécois. Objectif ? Proposer 32 pages d’informations sur les nouveautés, le fonds, les auteurs. Le tout à destination des libraires et des bibliothécaires.
ActuaLitté, CC BY SA 2.0
« Je dirais même plus », célèbre formule de Dupond et Dupont, était originellement le nom d'une parution lancée par la librairie Mijade, basée à Namur. « Nous y proposions des articles sur la bande dessinée, écrits par des libraires », se souvient Michel Demeulenaere – qui fut également éditeur BD avec les Éditions du miroir.
Depuis, Mijade est devenu une maison d’édition, « qui a eu la chance de franchir certaines étapes, notamment dans le chiffre d’affaires, pour être suffisamment à l’aise ». Conscient de ce qu’il pouvait apporter, l’éditeur décide alors d’encourager et soutenir les nouvelles pousses de l’édition jeunesse belge.
Mélanie Roland, directrice d’Alice jeunesse, qui prend part à la revue explique : « Quand on prend les chiffres de vente de nos distributeurs, on se rend compte qu'au prorata du nombre de francophone dans chaque pays, nos livres s'achètent plus en Belgique, puis au Québec, en Suisse et la France vient en dernier. » Un constat étonnant, bien qu'au final ce soit la France qui fasse le plus de ventes : « Le fait qu'on vende si peu, proportionnellement, en France est bien triste. Mais comme il y a plein plein de Français, ça compense. »
Pourtant, cela intrigue et l’on en vient à questionner le comportement des représentants, chargés de diffuser la bonne parole auprès des librairies. Pour Simon de Jocas, directeur des 400 coups, maison québécoise, l’explication reste claire : « Quand ils ont des sacs énormes de livres, et peu de temps, il faut être expéditif. On comprend qu’il faille favoriser les titres de la maison mère, les gros vendeurs. » Les autres passent plus facilement alors à la trappe...
Face à « un esprit mercantile presque incontournable », que faire s'interroge Simon de Jocas ? « Si l’on parvient à se fédérer à quelques-uns, tout le collectif y gagne », affirme Michel Demeulenaere. « Et plutôt que de créer une bête feuille de chou publicitaire, nous avions à l’esprit de faire un vrai magazine, où l’on parle du fonds, des nouveautés et surtout des auteurs. »
Je dirais même plus est alors revenu, avec une nouvelle mission : « Nous sommes poussés à la mutualisation, pour faire connaître nos catalogues différemment auprès des libraires et des bibliothécaires », poursuit Mélanie Roland.
Conclusion, le magazine fut lancé durant la Foire du livre de Bruxelles, avec 25.000 exemplaires imprimés et envoyés dans 4600 bibliothèques et 1400 librairies françaises, ainsi que 50 librairies et 200 bibliothèques de Suisse. « Cela répond et correspond à plein de petites choses : en Belgique, nous avons pris l’habitude d’informer directement bibliothèques et écoles de nos sorties », note Michel Demeulenaere. Et la dimension collective sert finalement l’image de marque des cinq maisons.
Outre Mijade, Alice et 400 coups, on retrouve Ker Editions et Éditions NordSud. Et le numéro un du trimestriel a reçu un excellent accueil. « Les libraires belges se sont plaints de ne l’avoir pas reçu : il est vrai que nous pensions avant tout à le distribuer dans les pays où nous vendons moins – la France, en priorité », relève Mélanie Roland.
Si les éditions Mijade assurent le financement de la revue, elles refacturent au prix coûtant les pages occupées par les autres maisons. « Ce trimestre, les 400 coups n’ont occupé que quatre pages, et donc payé pour ces seules quatre pages, mais je pourrais avoir besoin de plus le trimestre prochain », indique Simon de Jocas. « Nous avons toute latitude de produire ce que l’on souhaite, et à la fin, Mijade prendra en charge les pages restantes. »
Une diversité qui résulte avant tout d’une vision partagée de ce que doit être l’édition : impossible de collaborer sur un pareil projet si les caractères ne s’entendaient pas. En outre, les maisons ont certains auteurs en commun, ce qui facilite les échanges. « C’est autant une complémentarité qu’une solidarité qui s’établit : ce catalogue est le fruit de nos affinités », insiste le directeur des 400 Coups.
Michel Demeulenaere développe : « En Belgique, les livres de Mijade sont distribués par MDS, et on connaît bien l’exemple de Stephen Carrière, qui était parvenu à une mutualisation pour le Collectif. Plusieurs éditeurs regroupant leurs ressources pour être plus forts ensemble. Avec la revue, nous n’avons pas atteint le même niveau, mais le partage s’effectue dans le même esprit. »
Dans Je dirais même plus # 1, on parle...
Chez Alice de Clémentine Beauvais et Antoine Deprez, qui sortent leur splendide album Ameline, joueuse de flûte. Les 400 coups font un focus sur Marion Arbona, dessinatrice, qui a sorti Dans la jungle amazonienne, il y a...., NordSud met en avant Richar Byrne, qui a travaillé avec Kathty Wolf pour Tu n’as rien oublié, Victor ?
Mijade met l’accent sur Grégoire Mabire et Le Monstre sur le lit, qu’il cosigne avec Caroline Roque quand Ker Editions raconte la vie de Léon accordéon, d’Yves Barbieux et Yves Dumont.
Le premier numéro aura nécessité une dizaine de jours de travail pour sortir, et probablement le prochain – ou celui d’après ? – pourrait également intégrer une maison suisse. « D’un pays à l’autre, nous ne sommes pas véritablement concurrents : notre métier, c’est aussi partager nos expériences », pointe Michel Demeulenaere.
L’opportunité de présenter spécifiquement 30 titres chaque trimestre, et de toucher différemment librairies, bibliothèques... « Certains libraires nous ont même demandé des exemplaires pour leurs clients », s’étonne Mélanie Roland. Qui a fait sienne la devise de Mijade : « Michel nous répète souvent : “Ne perdez pas de temps à chercher des subsides : vendre des livres rapporte plus.” Avec la revue, nous le mettons en pratique. Et surtout, nous restons maîtres de ceux avec qui nous collaborons. »
Et il est bien connu que l’union, en francophonie comme ailleurs, fait la force... Et pour s'assurer de toucher le plus grand nombre, Je dirais même plusdispose aussi d'un site. « Avec ces quelques pages, nous espérons mieux informer les bibliothécaires et nous rapprocher des libraires dans le but avoué d’offrir à nos auteurs et illustrateurs une meilleure visibilité », y expliquent les cinq maisons.
On n’en attendait pas moins.
Léon accordéon (1CD audio) – Yves Barbieux (Auteur), Yves Dumont (Illustrations) – Ker Editions – 9782960125801 – 22 €
Dans la jungle amazonienne, il y a... – Melanie Perreault (Auteur), Marion Arbona (Illustrations) – Editions Les 400 coups – 9782895407157 – 12 €
Tu n'as rien oublié Victor ? – Kathy Wolff (Illustrations), Richard Byrne, Nelle Hainaut-Baertsoen (Traduction) – Editions – 9782831101156 – 12 €
Ameline joueuse de flûte – Clementine Beauvais (Auteur), Antoine Deprez (Illustrations) – Alice Editions – 9782874263354 – 15 €
Paru le 08/04/2016
32 pages
Ker Editions
22,00 €
Paru le 22/03/2018
24 pages
Les 400 Coups
12,00 €
Paru le 15/02/2018
24 pages
Nord-Sud
12,00 €
Paru le 25/01/2018
44 pages
Alice
15,00 €
1 Commentaire
Michel Vanda
29/01/2020 à 16:42
La véritable histoire de Je dirais même plus. Le trimestriel Je dirais même plus a vu le jour dans les années 90 sous l'impulsion de la librairie-galerie "La marque jaune" (Liège). Les libraires BD Mijade (Namur) et Brussels (Bruxelles) sont venus se joindre à l'édition de "Je dirais même plus" dont j'étais l'éditeur "responsable". Je voulais rendre compte d'une "autre" réalité de la BD.