La seconde édition du Prix Stendhal de la traduction, organisée par l’Institut français d’Italie, s’est achevée ce 20 février avec la remise du prix au Palais Farnèse, siège de l’Ambassade de France à Rome, lors d’une cérémonie rassemblant 150 représentants de l’édition et de la culture italiens. Ce prix est dévolu aux traductions vers l’italien d’oeuvres de langue française d’auteurs contemporains.
Le 25/02/2018 à 12:15 par Cécile Mazin
Publié le :
25/02/2018 à 12:15
Remise du Prix Stendhal à Lorenzo Flabbi par le président du jury, le poète et traducteur Valerio Magrelli et l’Ambassadeur de France en Italie Christian Masset.
Le Prix Stendhal, doté de 3000 €, a été remis à Lorenzo Flabbi, pour la traduction en italien de Mémoire de Fille, d’Annie Ernaux (Memoria di ragazza, L’Orma editore). Cette récompense vient couronner un engagement de 20 ans en faveur du roman contemporain français de la part cet universitaire, Maître de conférences en Littérature comparée à l’Université Paris III - Sorbonne Nouvelle – par ailleurs cofondateur et codirecteur de la maison d’édition romaine L’Orma edizioni.
Lorenzo Flabbi est l’un des principaux artisans du succès d’Annie Ernaux en Italie, laquelle est devenue ces dernières années l’une des auteures françaises les plus lues et renommées dans la péninsule. En atteste par exemple l’attribution à l’auteure du Prix Strega Europeo 2016, la plus importante récompense italienne accordée aux écrivains étrangers.
A l’origine de cette reconnaissance italienne de la romancière et de son éditeur L’Orma, une de ces anecdotes éditoriales qui démontre, s’il en était besoin, combien la combinaison de l’audace et de l’abnégation, notamment des petits éditeurs, contribuent à faire vivre la création littéraire contemporaine. En effet, lors de la parution remarquée du roman Les Années en 2008, Lorenzo Flabbi enseigne la traductologie à Paris et partage l’engouement collectif qui s’empare de la critique et des intellectuels autour de cette oeuvre, et ne doute pas que les droits étrangers auront été cédés à un mastodonte italien.
Lorsqu’en 2012 il cofonde les éditions L’Orma, et alors qu’il s’intéresse à nouveau nouveau à l’oeuvre d’Ernaux, il découvre que les droits sont disponibles. Les Années, ou plutôt Gli anni sera l’une des sensations littéraires de 2015 en Italie et le donc le début d’un phénomène.
Parallèlement au Prix Stendhal proprement dit, une seconde récompense a été attribuée à un jeune traducteur (de moins de 35 ans). Il a été remis à Ursula Manni, professeure certifiée d’Italien près de Grenoble et doctorante de littérature italienne en co-tutelle à l’Université de Turin et l’Université Grenoble-Alpes, pour la traduction des Tablettes de buis d’Apronenia Avitia de Pascal Quignard (Le tavolette di bosso d’Apronenia Avizia, Analogon editore). Elle obtient une résidence de traduction d’un mois au Collège International des Traducteurs (CITL) d’Arles, en vertu d’un partenariat noué en ce sens entre l’Institut français d’Italie et l’Association pour la promotion de la traduction littéraire (ATLAS).
Usrula Manni
Ce prix, qui existe depuis 2016, a été pensé comme un outil de valorisation de la profession de traducteur, très précarisée en Italie, en même temps qu’une occasion pour l’Institut français d’Italie d’accompagner et d’encourager les éditeurs dans la traduction d’oeuvres littéraires de langue française. La participation importante des petites maisons d’édition en fait ainsi un instrument de reconnaissance de la part toujours plus importante qu’ils jouent dans la traduction des oeuvres françaises en Italie.
L’annonce récente faite à la Foire du Livre de Francfort par le Président Emmanuel Macron de la création d’un prix national de la traduction en France démontre cet intérêt et le rôle essentiel des traducteurs dans la circulation des textes de langue française. Un tel prix national existe d’ailleurs en Italie depuis 27 ans (Premi nazionali per la traduzione del MiBACT), reflétant la place très importante de la traduction dans l’édition italienne : les livres traduits représentaient jusqu’à 30% des titres publiés dans les années 1980. Cette part a progressivement régressé, non du fait de la baisse des traductions, mais du fait de l’explosion du nombre de titres publiés (67000 livres parus en 2017, dont 17% de traduction).
Cette cérémonie a par ailleurs constitué le lancement d’une saison particulièrement française de l’édition italienne, annonçant la France invitée d’honneur au Salon international du Livre de Turin (le plus important d’Italie) en mai prochain, le Focus dédié au polar français au festival palermitain “Una Marina di Libri” en juin, et la tenue de rencontres franco-italiennes du Bureau international de l’édition française (BIEF) cet été à Rome et à Milan début juillet.
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