Un tapuscrit inédit de la nouvelle Petit déjeuner chez Tiffany, qui inspira Diamant sur canapé, met en lumière le processus d’écriture méticuleux de Truman Capote. Les feuilles jaunies, abondamment annotées, révèlent notamment que l’écrivain a longuement hésité avant de nommer son héroïne Holly Golightly.
Le nom de Connie Gustafson ne vous dit sans doute pas grand-chose, et pourtant celui-ci est passé à un cheveu de la célébrité. Lors de la rédaction de Petit déjeuner chez Tiffany (traduction Germaine Beaumont) Truman Capote n’a trouvé le nom délicieusement évocateur d’Holly Golightly qu’au dernier moment.
L’ultime brouillon de l’ouvrage, sur lequel l’auteur a rayé son choix initial pour inscrire le nouveau nom de son héroïne, est sur le point d’être mis aux enchères par Sotheby’s. Il sera présenté la semaine prochaine au public et est estimé entre 120 000 £ à 180 000 £.
Fait intéressant : il s’agit vraisemblablement du même document qu’un milliardaire russe avait acquis en mai 2013, pour la somme de 306.000 $ — dactylographié sur papier jaune verge d’or. Sauf que les enchères avaient alors débuté à 10.000 $, et rapidement dépassé les espérances.
Un travail d’orfèvre
Les feuilles dactylographiées sont couvertes d’annotations, de griffonnages et de ratures. Ces multiples corrections donnent une idée de l’obsession du détail qui a été à la fois une malédiction, mais aussi la clé du succès pour Capote.
Comme l’indique Sotheby’s, bon nombre des révisions portent sur des détails assez anodins au premier abord. L’auteur va par exemple s’arrêter sur un point de vocabulaire et changer le mot toucher par caresser ou encore supprimer la fin d'une phrase, changer de place une virgule. Il avait ensuite déclaré à propos de Petit déjeuner chez Tiffany que celui-ci marquait un tournant dans son style vers « un éclaircissement, une prose plus discrète et plus claire ».
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CAPOTE | Breakfast at Tiffany's, revised typescript, 1958 - Sotheby's

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Le tapuscrit montre également comment Capote a supprimé une partie du contenu à caractère sexuel de l’histoire avant la publication. Certains passages sont ainsi entièrement raturés comme la conversation entre Holly et sa colocataire Mag Wildwood, dans lequel Mag révèle que lors de ses rapports sexuels, elle imagine une statue de son ancêtre « Papadaddy Wildwood » dans son uniforme militaire.
Ces efforts pour rendre le texte moins choquant pour l’époque s’avéreront insuffisants. En effet, l’auteur soumettra son manuscrit achevé au magazine Harper’s Bazaar pour le numéro de juillet 1958, mais la revue annulera la publication à la dernière minute, jugeant le contenu de l’œuvre trop problématique. La nouvelle sera finalement publiée dans Esquire en novembre 58. Le film Diamant sur canapé avec Audrey Hepburn verra quant à lui le jour en 1961.
Holly manqua donc d'être Connie. Un nom sans doute plus crédible pour une jeune fille originaire du Texas, comme le souligne le spécialiste des livres de Sotheby’s, Gabriel Heatona, mais qui aurait peut être eu moins d’impact : « C’est un nom magnifique, qui reste dans la tête, nous souvenons tous d’Holly Golightly longtemps après avoir tourné la dernière page du livre ou terminé le film au moment du générique. »
Crédit photo : Prayitno CC BY 2.0
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