Créée en 2003, l'Association L'Autre livre s'est donnée pour mission de « résister à la marchandisation du livre », ainsi qu'œuvrer à la défense de « l'exception culturelle, la pluralité et la diversité face à la concentration croissante de l'édition ». Dans ces circonstances, l'association a souhaité ne pas se rendre au Salon du livre de Paris, pour deux raisons, tant économiques que politiques. Le message est clairement exprimé dans un courrier dont ActuaLitté a pu prendre connaissance.
Le 17/03/2015 à 18:15 par La rédaction
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17/03/2015 à 18:15
Voici dans son intégralité, le message diffusé par l'Association, à ses membres. Il est suivi d'une liste de revendications, pour la préservation de l'édition indépendante.
Les Salons et autres Foires du Livre sont devenus au fil des années une composante indispensable pour l'édition indépendante, en raison de son absence grandissante dans les librairies et dans les médias, malgré ceux qui prétendent qu'avec internet, nous serions désormais à égalité avec l'industrie du livre. Notre activité de passeurs de mots, d'émotion, d'idées, ne peut vivre que dans le contact humain, l'échange avec l'autre, et ne peut se satisfaire de campagnes publicitaires de toute façon inaccessibles.
Alors, cette absence de « l'autre LIVRE » au Salon du Livre de Paris n'est — elle pas en contradiction avec ce qui vient d'être dit ?
Comme nous l'annoncions déjà l'année passée lors de sa précédente édition, nous ne pouvons poursuivre la présence de « l'autre LIVRE » au Salon de la Porte de Versailles.
Pour des raisons financières : les tarifs augmentent d'année en année par rapport au nombre de jours du salon et aux surfaces proposées, ce qui exclut de fait la plupart des éditeurs indépendants non subventionnés ou présents dans le cadre de leur région. Cette possibilité de présence reste pratiquement la seule pour les éditeurs indépendants. Nous considérons cela, à l'autre LIVRE, comme un acquis à préserver et invitons les visiteurs de ce salon à privilégier les stands où sont présents des éditeurs
indépendants.
Dans ce cadre, pouvions-nous, en tant qu'association vouée à la défense de l'édition indépendante, avec un stand collectif de l'autre LIVRE pour lequel chaque éditeur doit payer « plein pot » pour être présent, montrer ceux qui peuvent encore se payer un stand, en ignorant ceux qui n'en ont pas les moyens ?
"La culture en général et le livre en particulier ne peuvent pas être soumis à la logique de l'argent, du profit et du « peopolisme »"
Pour des raisons politiques : notre association n'appelle pas au boycott de ce salon, mais, si le Salon du Livre de Paris est une vitrine, cette vitrine n'est pas seulement celle de certains livres, et notre présence pouvait cautionner l'absence d'une véritable politique cohérente du livre et de la lecture de la part de gouvernements successifs.
Comment oublier qu'autrefois on appelait le Salon du livre « la plus grande librairie de France » et qu'aujourd'hui la communication se fait par l'annonce de la présence de « vedettes », dites par le salon « Guest art », plus ou moins en rapport avec le livre, et non plus par la possibilité de découvrir ?
La culture en général et le livre en particulier ne peuvent pas être soumis à la logique de l'argent, du profit et du « peopolisme », l'actualité nous a prouvé que la culture est même désormais indispensable pour conserver en cette période de paupérisation le lien social dans notre pays, pour lui éviter de connaître de nouveaux 7 janvier.
Il suffit donc de « presque rien » pour que l'Association l'autre LIVRE, qui représente plus de 180 éditeurs indépendants, revienne à ce salon : une nouvelle politique de ses tarifs, qu'elle redevienne la plus grande librairie de France, et une véritable politique du livre et de la lecture pour notre pays.
C'est pourquoi nous appelons le gouvernement, les élus, les institutions, les collectivités à prendre en compte les revendications des éditeurs indépendants en coordination avec leurs auteurs, leurs lecteurs et le soutien des libraires amis, du personnel des bibliothèques pour faire prévaloir cet esprit nécessaire d'insoumission de la culture face aux idées réactionnaires, à la domination des marchés et du paraître.
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