Le 04/01/2016 à 02:21 par Victor De Sepausy
Publié le :
04/01/2016 à 02:21
Cependant, ces derniers, s’ils sont pris à des postes bien rémunérés, doivent accepter de plus en plus souvent des contrats à durée déterminée. Dans sa synthèse, Julien Calmand, auteur de cette étude, précise qu’« Après trois ans de vie active, les docteurs diplômés en 2010 ont un taux de chômage de 9 %, selon l’enquête Génération réalisée en 2013 par le Céreq.
L’insertion des docteurs s’est améliorée régulièrement depuis une dizaine d’années : le taux de chômage à trois ans, qui atteignait 11 % pour les docteurs diplômés en 2001, a baissé de deux points en près de 10 ans. Les docteurs sont, avec les ingénieurs et les diplômés de la santé et du social, les seuls diplômés de l’enseignement supérieur épargnés par la progression du chômage.
En outre, les docteurs ont, pour la deuxième enquête Génération consécutive, un taux de chômage moins élevé que celui des diplômés de master universitaire. Parmi les facteurs pouvant expliquer cette relative embellie dans un contexte général de dégradation de l’emploi pour les nouveaux diplômés, l’étude du Céreq met en avant l’effort de R&D croissant en France, qui s’accompagne d’une progression des effectifs de personnels de recherche.
Les mesures en faveur de l’insertion des docteurs, mises en place au sein des écoles doctorales et plus largement dans les universités, ont aussi pu constituer un facteur favorable. Pour autant, certains indicateurs évoluent moins positivement.
Ainsi, la proportion des emplois à durée déterminée, trois ans après la fin de formation initiale, atteint 32 % pour les sortants de 2010, soit deux points de plus que pour les sortants 2007, et huit points de plus que pour les sortants 2001. Les boursiers CIFRE constituent à cet égard une exception : parmi eux, la proportion d’emplois à durée déterminée est moitié moindre (16 %) et stable par rapport à celle observée pour les sortants 2001.
Le temps d’accès moyen au premier emploi pour les diplômés de doctorat est de 2,4 mois, inférieur à celui des diplômés de M2 (2,8 mois) ou des diplômés d’école de commerce (2,9 mois), mais légèrement supérieur à celui des diplômés d’écoles d’ingénieur (1,8 mois). Les expériences dites de postdoctorat jouent un rôle spécifique dans le processus d’accès à un emploi stable dans la recherche publique.
Le premier emploi des docteurs est de ce fait très souvent à durée déterminée (67 %), dans une proportion supérieure de 10 points à celle des diplômés de M2 (57 %), de 26 points pour les jeunes issus des écoles de commerce (41 %) et de 33 points pour ceux issus des écoles d’ingénieur (34 %). Trois années après la soutenance de thèse, l’insertion apparait de très bonne qualité : parmi les docteurs en situation d’emploi, la part d’emploi de niveau cadre atteint 93 %, marquant une véritable reconnaissance de la qualité de la formation reçue.
Par contraste, cette part est inférieure de 5 points pour les diplômés d’école d’ingénieur (88 %), avoisine les 2/3 pour les écoles de commerce et atteint 62 % pour les diplômés de master. En outre, avec un salaire net médian de 2 200 euros nets, cette reconnaissance s’accompagne d’un niveau de rémunération substantiellement plus élevé (15 %) que celui d’un diplômé de master.
La rémunération reste légèrement inférieure à celle des diplômés de grandes écoles (-6,5 % par rapport à un diplômé d’école d’ingénieurs et -4 % pour un diplômé d’école de commerce). Les emplois des docteurs en maths/physique, en sciences de l’ingénieur, en informatique/électronique et même en droit et sciences économiques procurent une rémunération nette médiane comprise entre 2 300 euros et 2 400 euros, faisant ainsi jeu égal avec les diplômés d’écoles d’ingénieurs et de commerce, ces derniers ayant cependant eu un cursus plus court que les docteurs.
Une qualité d’insertion et un avantage relatif du doctorat sur le master fortement liés au domaine disciplinaire
Le taux de chômage trois ans après l’obtention d’un doctorat, ainsi que d’autres indicateurs de la qualité de l’insertion, sont fortement liés au domaine disciplinaire. Les diplômés de sciences de l’ingénieur, d’informatique, d’électronique et de mathématiques et physique sont ceux qui, comparativement aux autres docteurs, ont passé sur l’ensemble des trois années le plus de temps en emploi, le moins de temps au chômage, et connu le moins d’épisodes de chômage de longue durée : à peine 4 à 6 % des docteurs dans ces disciplines ont connu une période de chômage de longue durée, et la durée moyenne passée au chômage sur les 36 derniers mois ne dépasse pas 3 mois.
A contrario, les diplômés de doctorat en chimie, SVT et en lettres ont eu plus de difficultés lors de leurs premières années de vie active. De manière générale, les disciplines qui présentent les plus faibles taux d’insertion pour les docteurs sont les mêmes qu’au niveau du master.
La valorisation du diplôme de doctorat, au regard d’un diplôme de master dans la même discipline, se lit notamment dans les salaires obtenus en situation d’emploi. A cet égard, la valorisation se révèle beaucoup plus délicate pour les diplômés de lettres et surtout de SHS. Près de 30 % des docteurs en SHS ont un salaire inférieur au salaire médian des diplômés de master dans la même discipline.
Ce n’est le cas que de 14 % des docteurs en maths-physique ou en informatique-électronique et, respectivement 6 et 12 % des docteurs en chimie et en SVT, disciplines pourtant caractérisées par une difficulté d’accès à un emploi à durée indéterminé. Si l’accès à l’emploi est difficile dans ces disciplines, une vraie césure s’opère dans la valorisation du niveau de diplôme entre docteurs et diplômés de master, une fois un emploi obtenu.
Les débouchés des docteurs (recherche ou hors recherche, secteur public ou secteur privé) révèlent de forts contrastes disciplinaires, en structure et en évolution
La recherche publique constitue le débouché le plus important des docteurs diplômés en 2010 (48 %), la recherche privée arrivant en deuxième position (19 %). Les activités professionnelles en dehors de la recherche dans le secteur privé (17 %) et dans le secteur public (15 %) constituent un débouché pour un tiers des docteurs.
L’équilibre entre ces segments est quasiment inchangé depuis la précédente enquête relative aux diplômés de 2007. Dans la plupart des sciences dures, la recherche, publique ou privée, constitue plus des trois-quarts des débouchés des docteurs.
La proportion est cependant un peu plus faible pour les sciences de la vie et de la terre : seuls deux tiers des doctorants accèdent à un emploi dans la recherche. Enfin, en lettres, en droit sciences économiques et gestion et en SHS, c’est une proportion considérable de docteurs (entre un-tiers et la moitié) qui exercent en dehors de la recherche.
Si l’importance des différents types de débouchés reste quasiment inchangée depuis la précédente enquête Génération, les évolutions sont sensibles par domaine disciplinaire, reflet sans doute à la fois des conditions de l’offre et des aspirations des chercheurs. La biologie est le secteur disciplinaire où les évolutions sont les plus notables : les débouchés dans des emplois de recherche diminuent dans les deux secteurs, public et privé, conduisant les docteurs à devoir se diriger dans des emplois en dehors de la recherche.
Dans les matières scientifiques (maths /physique, chimie), la part de la recherche publique diminue, mais les chercheurs trouvent des débouchés croissants dans la recherche privée : le dynamisme des dépenses de R&D depuis plusieurs années a sans doute permis cet effet de substitution. En droit, sciences économiques, gestion et en lettre et SHS, ce sont les débouchés dans le segment public qui tendent à s’accroître en proportion, dans la recherche comme en dehors, tandis que l’accès à des emplois dans le secteur privé diminue singulièrement.
Conditions d’accès, parcours d’insertion et satisfaction diffèrent selon les débouchés des docteurs (recherche ou hors recherche, secteur public ou secteur privé)
L’étude met en évidence que les conditions de réalisation de la thèse (laboratoire d’accueil, type de financement) influencent nettement le type de débouché, confirmant ainsi l'hypothèse d'irréversibilité des choix formulés dès les premières années de thèse.
Les profils orientés d’emblée R&D (doctorat financé par un contrat CIFRE par exemple) ont, logiquement, une probabilité plus forte d'accéder aux emplois de la recherche privée, tandis que les profils destinant à la recherche publique augmentent la probabilité d'accéder à ce secteur. Au-delà des conditions de thèse, le nombre de publications, qui témoigne de la qualité de la recherche réalisée, influence la probabilité d’accès à un emploi dans la recherche publique et académique.
La qualité de l’emploi est aussi en jeu ici et reflète bien la performance de la recherche réalisée au cours de la thèse : ainsi, la conjonction conditions de thèse orientées vers la recherche publique et académique et nombre important de publications accroissent la probabilité d'accéder aux emplois permanents dans la recherche publique, dans un contexte où les emplois sont globalement caractérisés par une forte proportion d'EDD.
Par contraste, l’accès à un emploi de R&D dans le secteur privé n’est pas soutenu par le nombre de publications réalisées. Si l’on se focalise sur le débouché principal que constitue la recherche académique, l’analyse des parcours durant les trois premières années qui suivent l’obtention de la thèse met en évidence une instabilité pour 27 % des docteurs.
Au demeurant, trois ans après la soutenance de thèse, seulement 53 % des docteurs occupent un emploi permanent dans la recherche académique, alors que le pourcentage s’élève à 88 % dans la recherche privée.
Faisant ainsi gonfler la part des EDD dans la population totale des docteurs, les docteurs en SVT et en chimie sont ceux qui accèdent le moins souvent à la stabilité dans l'emploi. Parallèlement, pour 17 % des docteurs, les trajectoires professionnelles se caractérisent par une file d'attente aux emplois permanents de la recherche académique : le nombre de docteurs en EDD s'estompe à chaque début d'année scolaire, lorsque les recrutements aux postes permanents ont lieu. Rémunération et satisfaction dans l’emploi occupé diffèrent selon les quatre grands types de débouchés.
Trois années après la soutenance de thèse, les docteurs en emploi dans la R&D sont les mieux lotis. Ils sont les mieux rémunérés, les plus souvent stabilisés dans un emploi à durée indéterminée et les plus satisfaits de leur emploi, sur toutes les dimensions considérées (niveau de compétence requis, sentiment de réalisation professionnelle, niveau de rémunération satisfaisant).
Cependant, seuls un cinquième des docteurs accèdent à ce secteur trois années après la soutenance de thèse, majoritairement issus des sciences de l'ingénieur, de la chimie et de l’informatique/électronique. Même en dehors de la recherche (32 % des docteurs en emploi en 2013), dans le privé, les rémunérations sont à la hauteur de celles de la R&D, les emplois sont très souvent stabilisés, et les docteurs apparaissent assez satisfaits de leur situation professionnelle même si plus d'un tiers d'entre eux estiment être employés en dessous de leur niveau de compétences.
Les docteurs en emploi dans le public hors recherche sont ceux qui ont les situations les moins favorables : ils sont les moins bien rémunérés, ont un emploi très peu souvent stabilisé et apparaissent bien souvent insatisfaits de leur situation professionnelle. Dans le public en général, que ce soit dans la recherche ou non, les docteurs ont le sentiment d'être mal rémunérés. Ceci est particulièrement prégnant dans la recherche académique (44 %). Ce facteur contribue, peut-être, à la baisse constatée (-10 points) de la préférence pour la recherche académique au moment de la soutenance de thèse en comparaison de la préférence exprimée par les docteurs sortis en 2007. »
(Crédits photos : CC BY 2.0 - Jean-Pierre Dalbéra)
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