Le Sénat adopte une loi contre les “dérives” de l'écriture inclusive
Portée par une sénatrice Les Républicains, la proposition de loi « visant à protéger la langue française des dérives de l’écriture dite inclusive » a été adoptée, ce 30 octobre 2023, grâce à la mobilisation de ce même groupe. La constitutionnalité de certaines dispositions reste toutefois questionnable, comme l'a suggéré la ministre de la Culture.
Le 31/10/2023 à 10:58 par Antoine Oury
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Publié le :
31/10/2023 à 10:58
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Quelques heures après l'inauguration de la Cité internationale de la langue française, à Villers-Cotterêts, le Sénat a adopté la proposition de loi de Pascale Gruny (Les Républicains, Aisne), à 221 voix pour, face à 82 contre. À la droite sénatoriale (Les Républicains, LIRT) se sont associés les centristes (Union centriste, Rassemblement Démocratique et Social Européen).
La langue à l'œil
Quelques jours après le Rassemblement national, qui s'était passablement ridiculisé sur la question, la droite sénatoriale se soucie d'écriture inclusive, à travers une 9e proposition de loi (PPL) sur le sujet depuis 2018, comme le rappellera Yan Chantrel (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain) lors de son intervention dans l'hémicycle.
Remontant à janvier 2022, le texte de Pascale Gruny entend modifier la loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française, connue sous le nom « Loi Toubon ». Il exclurait ainsi l'écriture inclusive de la langue française, considérant qu'un document l'utilisant serait écrit en langue étrangère.
L'article 1er de cette PPL définit l'écriture inclusive comme « les pratiques rédactionnelles et typographiques visant à introduire des mots grammaticaux constituant des néologismes ou à substituer à l’emploi du masculin, lorsqu’il est utilisé dans un sens générique, une graphie faisant ressortir l’existence d’une forme féminine ». Le texte se limiterait donc aux néologismes (comme le pronom iel, par exemple) et au point médian ou à l'ajout d'un accord entre parenthèses.
Le texte s'appliquerait aux personnes publiques et aux personnes privées chargées d'une mission de service public, mais aussi, en suivant le périmètre de la loi Toubon, à des documents qui s'adressent au public. Documents commerciaux, contrats de travail, règlements intérieurs, accords collectifs ou encore documents d'information seraient ainsi concernés...
Une « police de la langue » ?
Au cours des débats, partisans et opposants se sont affrontés avec des approches différentes de la langue, qu'il s'agit de protéger de modifications violentes pour les premiers ou de laisser en liberté, sujette aux évolutions, pour les seconds. Les deux camps citeront en tout cas... Victor Hugo.
« Une langue ne se fixe pas. L'esprit humain est toujours en marche, ou, si l'on veut, en mouvement, et les langues avec lui », écrit-il ainsi dans la préface de Cromwell (1827), citée par des sénateurs et la ministre de la Culture. Cédric Vial (Les Républicains, Savoie) le convoque pour sa part pour défendre l'interdiction de l'écriture inclusive : selon lui, la langue meurt quand « une orthographe vicieuse attaque les racines irrévocables, de mauvais usages malmènent ce qui reste du bon vieux fonds de l’idiome ».
Citation tronquée, issue du texte Les Traducteurs, dans lequel Hugo écrit aussi : « La mort des langues commence par un épaississement de l’idiome qui lui ôte sa transparence. [...] Cet épaississement tient à la quantité de temps écoulé qui frappe la langue de sénilité, et non, comme on le dit si frivolement, à l’introduction des idées nouvelles. Les idées nouvelles, étant jeunes, sont saines, communiquent leur verdeur à l’idiome, et loin de le ruiner, le conservent. Quelquefois elles le sauvent. » Ce qui défend plus difficilement la proposition de loi soutenue par son groupe...
L'intervention de Rima Abdul-Malak était particulièrement attendue, surtout après le discours d'Emmanuel Macron, à Villers-Cotterêts, suggérant un soutien implicite à la proposition de loi de Pascale Gruny. Cependant, la ministre de la Culture se montrera nuancée, avec un avis de sagesse du gouvernement sur le texte.
Rappelant les difficultés de lecture et de compréhension liées à certaines graphies, en particulier le point médian, elle fera référence aux circulaires de 2017 et 2021, relatives à l'écriture inclusive et à la féminisation des métiers, qui ont d'après elle « posé les limites nécessaires ».
Favorable aux interdictions étendues à l'ensemble des collectivités publiques, « à condition de la compatibilité avec la libre administration des collectivités territoriales », le gouvernement est « très réservé » sur son extension aux personnes privées, contrats et autres documents adressés au public : « Cela nous semble une mesure excessive », indique Rima Abdul-Malak.
À LIRE - Au Sénat, un nouveau front s'ouvre contre l'écriture inclusive
Elle appuie notamment son argumentaire sur la décision n° 94-345 DC du 29 juillet 1994 du Conseil constitutionnel, sur la loi relative à l'emploi de la langue française, cette même loi Toubon. L'institution avait en effet rappelé la distinction entre personne publique, personne privée chargée d'une mission de service public et les personnes privées, en limitant ce que l'État pouvait imposer à ces dernières.
Le Conseil convoquait alors l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen, qui proclamait : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Comme le président quelques heures auparavant, la ministre de la Culture soulignera enfin l'aspect mouvant de la langue française, concluant : « Votre rôle n'est pas d'être une police de la langue, mais d'être garant de l'évolution de la langue. »
Chiche ?
Photographie : au Sénat, ce lundi 30 octobre 2023 (capture d'écran)
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27 Commentaires
Aurelien Terrassier
31/10/2023 à 16:21
En refusant l'écriture inclusive l'extrême-droitisation des LR est en marche. Heureusement que la Ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak à eu les mots justes face à cette loi que le Conseil Constitutionnel pourra toujours invalidé si possible.
azalée
01/11/2023 à 09:45
Une phrase et 2 erreurs grammaticales...concentrez-vous sur d'autres priorités!
Marie
01/11/2023 à 11:15
Bravissimo, il en est qui ne comprennent rien de rien...
rez
02/11/2023 à 12:21
tiens, un autre erreur: reac'!
Aurelien Terrassier
02/11/2023 à 15:11
Rez Ou en effet sur un post concernant l'écriture inclusive, nul doute, on sait d'avance que les militants neo-reacs et autres d'extrême droite vont se défouler en étalant leur ignorance et leur profonde mauvaise foi.
NAUWELAERS
02/11/2023 à 20:02
«un (sic) autre erreur, reac»...plaît-il ?
De qui, de quoi ?
CHRISTIAN NAUWELAERS
Aurelien Terrassier
02/11/2023 à 15:09
Azalée je n'ai pas besoin de troll réactionnaire pour voir mes fautes grammaticales. Mais j'ai l'habitude avec des gens de votre genre idéologique néfaste.
NAUWELAERS
02/11/2023 à 00:45
Stupide commentaire politique, un de plus !
Plein de gens non d'extrême droite rejettent l'écriture inclusive.
Mais pour faire comprendre quelque chose aux idéologues fanatiques déconnectés de la vie réelle...
CHRISTIANNAUWELAERS
rez
02/11/2023 à 12:28
les valeurs d'extrême droite se résument dans l'ensemble des mesures, plus ou moins autoritaires et fascistes selon le besoin, de maintenir un système cruel et oppresseur en place.
dire si les néolibéraux degueulasses au pouvoir sont de centre ou du fond des egouts peu importe, sont clairement assez élastiques pour aller d'un centre droite à son extrême selon besoin. On a des assassins et des violeurs dedans, non?
de toute façon le débat sur l'écriture inclusive est simple:
on a 3 femmes tués parce que femmes tous les 2 jours.
Pour cela, il faut des dizaines de femmes arrivant aux urgences moitié mortes par jour.
Pour cela, il faut des centaines de femmes agressées physiquement par jour.
Pour cela, des milliers agressées et oppressées au quotidien.
Donc le débat c'est simple à en crever: il y a ceux prêts a changer la langue et tout ce qu'il faut pour améliorer petit à petit cet monde de merde et ceux qui ne veulent pas. Ces derniers vont utiliser des arguments forcement pourris, mais aussi et surtout des faux comme la prétendue neutralité du masculin et l'ancienneté des "règles", etc etc
NAUWELAERS
02/11/2023 à 20:00
rez,
Incroyable votre faculté à délirer complètement !
Avec l'écriture inclusive, les auteurs de féminicides se changeront en féministes militants.
Bravo pour votre magnifique clairvoyance !
Hallucinant, la décrépitude intellectuelle d'extrémistes comme vous...
CHRISTIAN NAUWELAERS
Aurelien Terrassier
12/11/2023 à 18:53
Entièrement d'accord avec vous Rez. Il y a des gens comme vous qui ont des vrais arguments. Le problème de certains ce n'est pas tant qu'ils relaient une bien-pensance médiatique conservatrice, c'est surtout qu'ils n'ont que des avis et non des opinions et tout le monde peut le voir quand ils se mettent à psychologiser voir criminaliser les gens avec qui ils ne sont pas d'accord.
NAUWELAERS
12/11/2023 à 21:39
Rez, de vrais arguments...!
L'écriture pseudo-inclusive changera le monde...
Et les poules ont des dents !
Et demain, on rasera gratis !
Mdr !
CHRISTIAN NAUWELAERS
Marie
13/11/2023 à 09:07
C. Nauwelaers@, me permets-je? Sauf à prendre une réel plaisir- au second degré s'entend- à répondre à des inepties réitérées, vous avez bien compris avec qui vous aviez affaire? Alors la vacuité abyssale du cerveau de certains nécessite ma désinscription du suivi de cette info sénatoriale.
NAUWELAERS
13/11/2023 à 11:39
Marie,
De toute façon, ce n'est plus sur le site depuis un moment...
Il y a eu deux attaques récentes contre l'écriture inclusive -une dans Le Soir, l'autre en édito au dos des journaux de Sud Presse (différentes éditions) -dans deux journaux belges.
Et dans Le Soir, la défense de cette lubie par l'inévitable linguiste idéologue qui enrobe ces inepties avec de longues explications spécieuses et emberlificotées qui abusent les crédules...
Et qu'il faut déconstruire (à leur tour de subir une déconstruction qui là leur plaira moins...) !
Enfin vous avez raison, on arrête ici mais la bêtise de certains ne doit pas empêcher les autres de s'exprimer, Marie, sinon on leur donne raison, voyez-vous !
Mais on en a fait le tour...avant que la polémique ne manque pas de renaître, on n'y coupera pas.
Une bonne semaine à vous !
CHRISTIAN NAUWELAERS
Larissa
31/10/2023 à 17:43
"Avec l'anglais on va au bout du monde. Avec le français on va au fond des choses".
On ne va donc pas bouder son plaisir de lire une bonne nouvelle. A suivre ...
Marie
01/11/2023 à 08:50
Enfin l'intelligence, et pas artificielle, réanime cette "nôble" assemblée trop souvent endormie...
NAUWELAERS
02/11/2023 à 00:47
Bravo Marie mais après cette assemblée-là -le Sénat -il s'agira de convaincre l'Assemblée nationale...
Croisons les doigts...
CHRISTIAN NAUWELAERS
rez
02/11/2023 à 12:29
vous avez fait tomber votre tétine.
Marioniet
02/11/2023 à 17:09
Il y en a "des" qui prennent des vessies pour des lanternes...et des tétines pour le sein maternel, , n'est-il pas zer?
Lyo
06/11/2023 à 20:24
C'est tellement la priorité en cette période de crise.
En-dehors de l'écriture inclusive, la langue française est influencée de toute façon par le monde entier : les anglicismes que certains haïssent ne sont pas prêts de s'en aller, mais on a aussi des mots d'origine arabes (alchimie, alcool, abricot..), chinois, russe et sûrement plein d'autres.
L'écriture inclusive est utilisée pour la traduction de certains romans de SF en français car effectivement c'est bizarre de genrer des extra-terrestres au masculin sous prétexte que c'est neutre alors que pas du tout.
Tout comme les lois évoluent, c'est pareil pour la langue française et cette loi n'est que de l'encre sur le papier en définitive juste pour que nos vieux croûtons du gouvernement puissent se sentir utiles.
NAUWELAERS
07/11/2023 à 19:28
Lyo,
Vous avez tout faux.
L'écriture pseudo-inclusive sert à des idéologues très bas de plafond de croire se sentir utiles.
L'intelligence ne peut être dissociée du vrai progressisme, ne vous en déplaise.
CHRISTIAN NAUWELAERS
Marie
08/11/2023 à 10:10
A 200% d'accord avec vous. Quoiqu'il en soit, au fait ( et au fond), qui est tenu d'"inclusiver" son écriture? "Ceux" qui pensent que la règle grammaticale selon laquelle "le masculin l'emporte sur le féminin" est sexiste sont selon moi des illettrés. C'est rigolo "celles et ceux" employé par? Au moins le président dans ses discours. Je ne me rappelle plus dans quel sketch P. Desproges répétait un terme identique...j'allais écrire "asexué", s'adressant à une assemblée.
NAUWELAERS
08/11/2023 à 20:30
Bonjour Marie,
Vous vous adressez peut-être à moi mais il est mieux, pour plus de clarté, d'indiquer le nom de la personne à qui on s'adresse...
Un bel édito du journaliste Romain Goffinet dans les éditions du w-end passé (4-5 novembre) des quotidiens (belges !) de Sud Presse.
En gros, il soutient que cette écriture est en fait excluante, pour les dyslexiques, pour les «primo-arrivants» (les immigrés de fraîche date qui doivent apprendre le français)...
L'écriture pseudo-inclusive correspond pile-poil au vieil adage plus vrai que jamais: «L'enfer est pavé de bonnes intentions» !
Et de nombreuses vraies féministes sans lien avec l'extrême droite sont d'accord.
Laissons patauger dans leurs délires les idéologues -un terme épicène -à front bas.
Bien à vous.
CHRISTIAN NAUWELAERS
Marie
09/11/2023 à 07:47
NAUWELEARS @ bonjour, ce me paraissait évident, une réponse en décalé sous un commentaire...Nous sommes sur la même longueur d'onde, "happy few". Mon féminisme à moi se contente du droit à la différence, je ne milite nulle part, je prends ce qui me plaît, d'où que cela vienne. Comme j'apprends le français à des analphabètes migrants, l'"inclusivité" des mots me parait une ineptie . Je souhaite que cette loi fasse long feu, à l'AN de se prononcer. Au plaisir d'être encore d'accord avec vous.
PS Les injures des "pas d'accord" ne salissent que ceux qui les profèrent, n'est-il pas?
NAUWELAERS
09/11/2023 à 13:45
Merci Marie...qui n'êtes pas un vieux misogyne d'extrême droite, c'est contrariant...(!).
Bien d'accord bien sûr !
CHRISTIAN NAUWELAERS
Marie
10/11/2023 à 08:57
C. Nauwelears@ bonjour... j'ai enfin retrouvé comment s'exprimait Pierre Desproges, procureur dans "le Tribunal des flagrants délires" : "Françaises, Français...extrêmes, extrêmes..."(sic); Le Pen était le prévenu et rigolait comme un fou...
Larissa
07/11/2023 à 10:48
Ecriture inclusive ou pas, il y a des gens très instruits qui ne sont pas particulièrement intelligents, avec les conséquences connues, et d’autres qui n’ont pas eu la chance d’être instruits mais qui étonnent, voire brillent, par leur intelligence.
L’un est foncier, l’autre inné.
Cela étant, la culture c'est dangereux, cela fait réfléchir. Place aux jeux du cirque pour détourner le bon peuple des réalités.