Images pédopornographiques : deuxième plainte contre Vivès et ses éditeurs
La Fondation pour l'Enfance, née en 2012 de la fusion de deux structures, ajoute une nouvelle plainte contre Bastien Vivès et ses éditeurs Glénat et Les Requins Marteaux, pour « diffusion d'images pédopornographiques ». Les albums mis en cause l'ont déjà été dans une précédente procédure dévoilée ce lundi 19 décembre.
Le 22/12/2022 à 10:53 par Antoine Oury
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Publié le :
22/12/2022 à 10:53
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Les Melons de la colère (2011), La Décharge mentale (2018) et Petit Paul (2018), respectivement publiés par Les Requins Marteaux pour les deux premiers, et Glénat, motivent une nouvelle plainte pour « diffusion d'images pédopornographiques ». La Fondation pour l'Enfance a fait parvenir le dossier ce mardi 20 décembre au procureur de la République de Nanterre.
D'après Franceinfo, la fondation y pointe des bandes dessinées qui « livrent des représentations de mineurs, dans des situations sexuellement explicites, présentant indubitablement un caractère pornographique ».
Les mêmes albums sont au cœur d'une autre demande, reposant sur le même argument, mais ajoutant l'« incitation à la commission d’agressions sexuelles sur mineurs » et la « diffusion à un mineur de messages violents ». Cette démarche est portée par l'association Innocence en Danger.
Rappelons que l'ouvrage Petit Paul, paru en 2018 chez Glénat, avait fait l'objet d'une plainte cette même année, classée sans suite, en raison d'une « absence d'infraction », par le Parquet de Nanterre, justement.
Variations et Code pénal
Les différents délits cités par les plaintes sont sanctionnés par des peines assez lourdes. La diffusion d'images pédopornographiques, par exemple, peut déboucher sur 5 années de prison et 75.000 € d'amende, selon l’article 227-23 du Code pénal.
Il appartiendra au procureur de qualifier juridiquement, bien entendu, avec une approche très attendue. De fait, l’article du Code pénal qui permet de l’incriminer a été modifié le 21 avril 2021, soit postérieurement à la publication des livres considérés. Une stricte application de la législation dans le temps permettrait, à titre personnel, d’échapper à l’incrimination — reste à savoir si le procureur utilisera la répétition ou non.
En 2018 la plainte n’avait pas prospéré pour défaut d’infraction caractérisée. Mais les ouvrages visés ne sont pas postérieurs à cette date. En revanche, pour les éditeurs ce serait une autre histoire. En considérant l’œuvre comme un acte ponctuel, alors la modification législative ne s’appliquerait pas. En revanche, si l’on prend en compte l’œuvre appuyée de propos licencieux postérieurs à 2020, l’acte créatif n’est plus ponctuel.
Les “images non réelles” devant la loi
Si des suites judiciaires sont données aux plaintes, la question centrale du procès sera sans aucun doute celle de la liberté artistique face à la législation en vigueur. Cette dernière s'avère assez précise concernant les « représentations » de mineurs : en 1994, elle ne concernait que les images « réelles », comme les vidéos ou les photos. Mais, en 1998, l'adoption du terme « représentation » étend sa portée.
En 2007, un arrêt de la Cour de Cassation statuait que « les images non réelles représentant un mineur imaginaire, telles que des dessins ou des images résultant de la transformation d'une image réelle » permettent de constituer une infraction. Si cet arrêt mentionne toujours une image « réelle » comme base, il pourrait nourrir un jugement contre l'auteur et ses éditeurs. Les déclarations de Vivès par le passé, sur l'inceste ou l'attirance pour les enfants, pourraient aussi le desservir.
À LIRE: De la fiction au réel : Bastien Vivès, auteur de bande dessinée
De leur côté, Vivès, Glénat et Les Requins Marteaux peuvent relier la diffusion des œuvres à la liberté d'expression, notamment protégée par la Convention européenne des droits de l'homme. Le juge chargé du dossier aura alors la lourde tâche de déterminer les circonstances de la création et les conséquences de la diffusion. Ses conclusions constitueraient une nouvelle jurisprudence en la matière, à n'en pas douter.
Photographie : le Tribunal de Paris, saisi le 19 décembre par une première plainte contre Vivès et ses éditeurs (Arthur Weidmann, CC BY-SA 2.0)
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8 Commentaires
jujube
23/12/2022 à 05:50
Je suppose que toutes ces plaintes, actuelles et à venir (et qui se justifient d'ailleurs), favorisent la vente des bouquins de l'auteur. L'argent sale pour les mots sales de ses BD cracra.
Daria Vinault
29/12/2022 à 18:16
De la même manière que j'ai acheté Charlie Hebdo, suite à la menace islamiste pour des dessins du prophète Mahomet en 2006, je vais effectivement acheter les BD sus-nommées.
AuLoup!
23/12/2022 à 07:11
Et voilà comment notre petite France de bobos puritaine et médiocre frappe aveuglément sur la création et sur tout ce qu’elle ne comprend pas, campée sur son ignorance et ivre du pouvoir démesuré que lui confèrent les médias.
Pourquoi s’en prendre à une maison d’édition aussi remarquable que les Requins Marteaux, qui explore depuis des années toutes les facettes de la bande dessinée de création avec passion, courage et sens de la dérision.
Une maison qui doit publier la plupart de ses titres à 3 000 ex. Et en vendre la moitié, quand les millions de déchets produits par les industries culturelles inondent les grandes surfaces et s’accumulent sous le sapin. Un éditeur qui a toujours assumé son rôle de découvreur au service de la bd de création et de ses auteurs, malgré des difficultés financières à répétition.
Entre frais de justice, temps passé au tribunal et tempête médiatique, vous avez sous les yeux la meilleure recette pour mettre à genoux des gens honnêtes qui essaient de donner du sens à leur travail et de présenter au monde quelque chose d’un peu nouveau.
Arrêtez de vous vautrer là-dedans. Recommencez à lire, sur et entre les lignes, arrêtez de donner vos avis débiles toutes les trois secondes parce qu’on vous sollicite alors que vous ne connaissez rien au sujet. Nourrissez-vous d’autre chose que Marvel et Harry Potter. Variez les plaisirs, prenez les chemins de traverse, jouez, partagez vos découvertes, autorisez-vous à penser pour de bon, soyez heureux. Vous pouvez même aller discuter sur des ronds-points. Je suis sûr que ça vous passera l’envie d’emmerder vos voisins.
LND
23/12/2022 à 09:49
La pédocrimalité ruine la vie d'au moins 160 000 enfants chaque année. C'est un réel problème que d'en faire l'apologie, quand bien même ce serait "pour de rire".
On a beau lire ailleurs et développer son esprit critique, cette criminalité en tant qu'expression artistique fantasmée contribue à la culture du viol dont la société gagnerait à se débarrasser.
AuLoup!
23/12/2022 à 11:04
Je ne pense pas qu’on atteigne vos objectifs en abattant tout ce qui dépasse. La création artistique réclame un peu de nuance.
Par ailleurs, il me paraît vital de confronter la situation au réel. Et je ne pense pas que le nom de Bastien Vivès ou la collection BDCUL des Requins Marteaux figure véritablement dans la bibliothèque des pédocriminels.
Dans ce registre, attaquons-nous plutôt à toutes les publicités qui dégradent l’image de la femme et font des ravages dans nos imaginaires collectifs. Il faut savoir où placer son énergie pour agir de façon proportionnée.
LND
23/12/2022 à 22:02
Intéressant votre commentaire : j'évoque la pédocriminalité, vous parlez de l'image de la femme...
Je sais où je place mon énergie, merci.
Aurelien Terrassier
25/12/2022 à 10:16
Je suis bien d'accord avec vous.
Daria Vinault
29/12/2022 à 18:13
Alors comme ça je ne suis plus "Charlie" ?
Le droit de faire des dessins outrageants, dérangeants n'est plus valide ?
Je savais depuis 2015 que cette histoire de "Je suis Charlie" n'était qu'une vaste fumisterie. Le "je suis Charlie" n'est qu'une excuse pour insulter la foi des musulmans et des catholiques - les juifs bénéficiant d'un statut particulier particulièrement protecteur, toute plaisanterie à leur égard étant considérée d'office comme antisémite.
Concernant la pédophilie, en France, on en est venu à panliser de simples dessins issus de l'imagination d'un auteur de BD.
En revanche, si dans Charlie, on présente le dessin du pape sodomisant un enfant, on invoquera le droit à la liberté d'expression !
La justice de ce pays est maintenant dirigé par des associations intégristes.
L'une est connue pour son acharnement contre des innocents lors du procès d'Outreau. L'autre est gérée par la famille Giscard d'Estaing. Ca veut tout dire